
Malgré la décision du ministère camerounais de la Santé publique suspendant leurs activités, les centres de santé privés continuent de proliférer à Yaoundé, la capitale.
Connus sous l'appellation de Groupements d'initiative commune( GIC) santé, les centres de santé privés sont des structures appartenant à des particuliers et offrant des services sanitaires aux populations riveraines en fonction de leur bourse.
A l'origine, les GIC santé sont une initiative du ministère de... l'Agriculture, mais ce n'est pas cette étrangeté qui explique que les populations, qui en sont les principales bénéficiaires, aient accueilli la décision de façon mitigée.
Dans le souci de mettre en place des structures d'encadrement des agriculteurs, leur ministère de tutelle avait obtenu l'adoption de la loi 92/006 du 14 août 1992 et son décret d'application du 23 novembre 1992 portant création des GIC.
Seulement la loi ne précisant pas un domaine d'activité précis, de nombreuses personnes se sont ruées sur les GIC santé, du fait de l'importance de la demande exprimée par les populations.
Pour Georges M., responsable de famille à Yaoundé, les GIC santé résolvent le problème de soins de première nécessité qui commençaient à se faire rares dans les structures d'Etat.
Selon la lettre circulaire du ministre de la Santé publique adressée en mars dernier aux gouverneurs de province et aux délégués provinciaux de la santé publique, les GIC santé exercent pour la plupart dans l'illégalité, avec des équipements inappropriés, des installations précaires et du personnel sans formation adéquate.
Pour un médecin de l'Hôpital central de Yaoundé, les GIC santé doivent reconnaître leurs limites et non chercher à passer pour des structures sanitaires capables de résoudre tous les problèmes de santé.
Selon lui, la poussée démographique qu'a connue le Cameroun ne s'étant pas accompagnée de la création d'hôpitaux pour répondre à la forte demande des populations, il est normal que le personnel formé et non recruté par la fonction publique apporte son appui en matière de santé.
Cependant, il regrette que certains des responsables de ces centres de santé, employés de l'Etat, passent leur temps à détourner les malades et le matériel des hôpitaux pour les orienter dans leurs structures.
Beaucoup de personnes interrogées par la Pana disent être allées dans un centre de santé pour un cas de fièvre, pour une injection ou de petits bobos des enfants.
Ceux là pensent que le centre de santé ne peut en aucun cas se substituer à un dispensaire, encore moins à un hôpital, parce que le personnel, parfois, se limite à un infirmier breveté qui, malgré sa bonne foi, ne peut rien apporter à un malade qui a un problème sérieux.
Certains, comme François, gardent de tristes souvenirs des centres de santé. Ce dernier n'a pas oublié que son nouveau-né a perdu la vie dans un centre de santé du fait de l'incompétence de l'"infirmière" qui avait assisté son épouse.
La dame, selon lui, était une ménagère sans aucune notion de médecine à qui l'époux, en fonction dans un hôpital, laissait la gérance du centre pendant ses heures d'absence.
Pour François, la décision du ministre de la Santé publique est salutaire, parce qu'elle va protéger les populations de "ces commerçants qui ne cherchent qu'à s'enrichir sur leur dos".
Cliente régulière des centres de santé privés, Madeleine pense plutôt que le gouvernement ne doit pas décider de les fermer sans proposer une alternative aux populations.
Selon elle, pour un pays comme le Cameroun, les pouvoirs publics devraient mettre sur pied une politique sociale qui permette aux citoyens d'avoir accès rapidement aux soins de santé primaire en créant à chaque coin de la ville un dispensaire pour les riverains.
Pour Me Njiké, juriste à Yaoundé, il est nécessaire de faire un toilettage dans la mesure où certains centres de santé ne respectent pas les règles de l'art, mais il ne faut pas condamner tout le monde car, selon lui, ces structures évitent les pertes de temps et de moyens aux populations.
A son avis, le ministère de la Santé publique doit plutôt chercher à réglementer le secteur comme l'avait fait son homologue des Finances pour assainir la micro-finance. |