
La Communauté urbaine de Yaoundé, la capitale camerounaise, a déclaré une guerre sans merci aux motos- taxis, communément appelé "bend-skin", pour les contraindre à rester en dehors de la ville.
Selon les règlements qui régissent leur métier, les motos-taxis doivent limiter leurs activités dans les zones périphériques de la ville, mais ils ont progressivement commencé à envahir le centre de Yaoundé, ce qui a amené les autorités à réagir vigoureusement en mettant à la fourrière tous les motos-taxis pris en faute. Ils ne sont rendus à leurs propriétaires qu'après paiement d'une forte amende.
Les Camerounais, tout en reconnaissant l'utilité des motos-taxis, estiment nécessaires des mesures pour assainir et réglementer le secteur.
Des textes existent pourtant, mais ne sont pas appliqués. Un décret définit clairement les conditions d'exercice de la profession, mais il est foulé au pied autant par les motos- taximen que par les forces de l'ordre.
Les motos-taxis ont fait leur apparition à Yaoundé à la faveur de la première grève des chauffeurs de taxis en 2004, se souvient un responsable de la Brigade routière.
Auparavant, seuls les taxis et les cars assuraient le transport dans le périmètre urbain.
Après cette grève, la communauté urbaine de Yaoundé, à travers ses services compétents, avait réussi à contenir les motos-taxis dans les zones qui leur avaient été prescrites.
La dernière grève des chauffeurs de taxi, au mois de juin dernier, les a ramenés dans la ville en plus grand nombre que la fois précédente. Le prix de la moto varie entre 350.000 à 500.000 francs CFA et le prix de la course est de 100 FCFA.
Enseignante à Yaoundé, Odile B fait partie de ceux qui pensent qu'il ne faut pas laisser les motos circuler en ville.
"Les pouvoirs publics doivent accélérer le processus de création de la société de transport par autobus engagé depuis quelques mois", estime-t-elle.
Pour elle, comme pour bien d'autres, les motos n'offrent pas de sécurité et les laisser s'installer dans le périmètre urbain est un risque pour les enfants qui vont bientôt reprendre le chemin de l'école.
Selon des témoignages recueillis par la PANA, plus de la moitié des conducteurs de motos-taxis n'ont pas vraiment pris le temps d'apprendre à conduire, d'où le manque de maîtrise qui explique le nombre élevé d'accidents. Les motos-taxis seraient à l'origine de 80 à 85% des accidents dans les centres villes. Les accidents sont d'autant plus graves que les conducteurs ne portent jamais de casque comme exigé par le règlement.
Le chômage galopant a attiré beaucoup de jeunes dans le métier, à l'instar de Jean-Pierre, 20 ans, qui a abandonné les études en classe de 4ème, pour devenir laveur de voiture, ce qui lui a permis d'économiser pendant trois ans l'argent nécessaire à l'acquisition d'une moto.
"Dès que j'ai acheté ma moto, le lendemain, j'ai commencé le ramassage, j'ai appris à conduire tout seul. Au début je faisais beaucoup de chutes maintenant cela a diminué", explique-t-il.
Calvin, lui, est devenu infirme suite à une chute de moto. "J'avais un malade à l'hôpital, il me fallait rentrer rapidement chercher de l'argent à la maison, j'ai emprunté une moto, moins d'un kilomètre après, le conducteur a percuté un taxi, je m'en suis tiré avec une double fracture et des dépenses énormes, car la moto n'avait pas d'assurance", confie-t-il.
Berthe, quant à elle, a perdu sa soeur dans une chute de moto et souhaite que ces engins soient réservés uniquement pour le transport dans les zones rurales.
Elisabeth Bitomo, elle, était de ceux qui pensent que les motos rendent de loyaux services parce qu'elles peuvent conduire le client là où ne peut le faire le taxi de ville, cependant, elle a changé de camp le jour où sa soeur s'est fait voler son sac avec plus de 300.000 FCFA qu'elle avait empruntés pour son commerce.
Elle pense que les motos ne doivent pas être autorisées comme moyens de transport parce qu'elles permet aux voleurs à la tire d'opérer en toute quiétude, aussi bien en ville qu'en campagne. |