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Flash Back |

Mars 2002 : je réside depuis un mois dans le bâtiment M de la cité universitaire de Cachan. Je rentre chez moi vers 21h et, manque de bol, fais tomber la clé de ma chambre dans la fente d’un millimètre entre les portes de l’ascenseur (oui, ça rappelle le fameux effet « tartine » qui tombe toujours du côté confiture…).
Panique à bord ! Dans un premier temps, nonobstant les protestations de mes semblables, je bloque l’ascenseur, bien décidée à récupérer mon bien ; mais il fallut me rendre à l’évidence : ma petite clé était passée à la postérité ! Afin que je ne dorme pas dehors et en attendant de pouvoir obtenir un double, le concierge me donne la clé d’une chambre vacante dans le bâtiment F…
Rappelons que nous sommes à l’époque dans une résidence du CROUS, qui loge encore beaucoup d’étudiants. Je ne me souviens ni de l’étage, ni du numéro de chambre, juste de l’impression que j’ai ressentie en y entrant : la lumière ne fonctionne pas, la peinture tombe en lambeaux, le verrou de l’entrée ne tient plus, quant à la porte fenêtre menant au balcon collectif, il lui manque un carreau et il est impossible de la fermer.
La couleur d’origine du matelas n’est plus détectable, mais si l’on en croit la famille de cafards qui s’en délecte, sa garniture de mousse est délicieuse ! Je conserve mon manteau, n’ose ni m’asseoir, ni toucher quoi que ce soit ; et je m’aventure dans le couloir à la recherche des sanitaires communs, que je ne vous ferai pas l’outrage de décrire. La journée a certes été – et je m’en excuse par avance – merdique, mais il reste quelques unités à mon forfait mobile, que je vais utiliser à bon escient : une brave samaritaine vole à ma rescousse et m’avance 20€ pour passer la nuit au Formule 1. Demain sera un autre jour ! |
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Le squat |

Je n’ai pas tenu plus de 2 minutes dans ce bouge. Je n’ose donc imaginer la vie des familles entières n’ayant d’autre solution que d’y vivre pendant plusieurs années. En effet, depuis 2002, les étudiants ont commencé à déserter l’endroit, rapidement remplacés par des « squatteurs ». Immigrés pour la plupart, beaucoup d’entre eux sont salariés, mais n’arrivent pas à trouver de logements en passant par les filières légales, dans le privé comme le public. D’autres sont sans-papiers et n’ont à ce titre aucun droit. Donc on s’organise tant bien que mal, et les enfants tentent de suivre une scolarité normale malgré la dureté de leurs conditions de vie, ou plutôt de survie.
Des dizaines de nationalités se côtoient, ici. Ils sont venus pour fuir la guerre, la misère, ou parce qu’ils étaient menacés par leurs gouvernements respectifs. Quasiment tous francophones, ils pensaient trouver dans notre pays une vie meilleure, ils s’imaginaient être accueillis en enfants de la République. En somme un juste retour du profit dont ont bénéficié et bénéficient toujours la France et les français au détriment des anciennes colonies.
Ils ignoraient encore l’ingratitude et le déni de vigueur dans l’Hexagone. Le pays des droits de l’Homme souffre d’amnésie volontaire, et continue de vouloir le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la crémière ! Alors on dit oui aux richesses naturelles d’Afrique contrôlées par de grands groupes français, on dit oui à la main d’œuvre bon marché d’après guerre et on dit oui aux coups d’états permettant de garder la main mise sur des nations entières. Mais on ne veut surtout pas des descendants des tirailleurs sur le sol français !
D’où expulsion, le 17 août dernier, des « 1000 » de Cachan.
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A qui profite le crime ? |
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Un dossier politiquement sensible pour Nicolas Sarkozy
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Période électorale oblige, l’enjeu autour de la situation du plus grand squat de France dépasse de loin le simple intérêt des familles qui y vivent…
A droite, Nico s’offre le meilleur coup de pub de l’année avec une expulsion sous forme d’opération coup de poing. Menée bien entendu sous l’œil des médias, avertis et présents sur les lieux bien avant l’arrivée de la police. Le ministre de l’intérieur fait la promo de sa politique d’immigration et se flatte d’avoir déjà fait expulsé une dizaine d’ex-squatteurs dans leurs pays d’origine. Pourtant ministre du même gouvernement, Azouz Begag dénonce quant à lui le sort des sans papiers qu’il compare à « de la chair à canon électorale ».
A gauche, le PS demande la régularisation de tous les ex-squatteurs sans papiers et l’annulation des arrêtés de reconduite à la frontière. L’altermondialiste José Bové, lui, critique le rôle de « la France qui pille les richesses de l’Afrique » et estime qu’elle doit maintenant prendre ses responsabilités.
Les anciens habitants du bâtiment F craignent les arrestations s’ils se séparent les uns des autres en acceptant les hébergements d’urgence en hôtel proposés par l’Etat. Ils ont décidé de jouer la carte de la solidarité, en restant groupés dans un gymnase mis à disposition par Jean-Yves le Bouillonec, maire PS de Cachan. Les hommes dorment dans les couloirs et à l’extérieur pour laisser la place sur les matelas aux femmes et aux enfants. Six d’entre eux sont en grève de la faim depuis maintenant un mois... |
Perspectives… |

De nombreuses associations se sont réunies pour soutenir les ex-squatteurs de Cachan, avec notamment le DAL, la LDH, la LCR, LO, le PCF, les Verts, ATTAC, le collectif des sans-papiers de St Bernard, le MRAP, Ras l’front, RESF… Plusieurs personnalités s’engagent également aux côtés des familles, avec, entre autres : l’abbé Pierre, Josiane Balasko, Joey Starr, Danielle Mitterrand, Laurent Baffie, Mathieu Kassovitz, Lilian Thuram et Patrick Vieira, Benabar, Yann Moix…
Tous réclament la régularisation des sans-papiers et la mise à disposition d’hébergements pérennes, mais en l’attente, deux bâtiments ont été envisagés pour loger les occupants du gymnase :
Un foyer de jeunes travailleurs inoccupé depuis plusieurs mois, situé à Cachan et appartenant à la Caisse des Dépôts et Consignations : au vu de cette demande, les propriétaires en ont accéléré la destruction…
Un immeuble désaffecté du CEA, dans la commune de Limeil Brévanne, sur lequel le maire, Joseph Rossignol, a pris un arrêté de réquisition, avec la volonté d’accueillir les familles victimes de l’expulsion de Cachan : la préfecture lui refuse l’accès aux locaux.
Aucune solution convenable ne semble émerger pour sortir de la situation insoutenable dans laquelle sont les ex-squatteurs, privés des droits fondamentaux des êtres humains.
La plus grande culpabilité d’un homme est-elle donc devenue d’être né du mauvais côté de la Méditerranée ?
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Quelques liens |

Signez la pétition en ligne sur le site du squat de Cachan.
Quelques images de l'expulsion sur le site des "citoyens de Cachan"
Note de Grioo.com : Le maire de Cachan et des ex-squatteurs auront la parole la semaine prochaine |
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