
Le refus du chef de l'Etat ivoirien, M. Laurent Gbagbo, de participer au sommet des Nations unies sur la Côte d'Ivoire, pour protester contre ce qu'il n'a pas hésité à qualifier de "mascarade" et ses récentes déclarations devant l'état- major des Forces de défense et de sécurité (FDS), remettant en cause la résolution 1633 de l'ONU et annonçant que les négociations avec les rebelles sont définitivement terminées, ont créé un sentiment de malaise général dont la presse abidjanaise s'est largement fait l'écho, accentuant considérablement l'inquiétude sur une éventuelle reprise des hostilités.
"Blocage du processus : Gbagbo prépare sa guerre", s'alarme le quotidien indépendant "Nord-Sud" qui se refère à des "informations de première main, issues de cercles militaires proches de la présidence" qui, selon lui, font état de préparatifs en cours pour la reprise d'une offensive générale sur les positions de l'ex-rébellion.
"Le timbre provocateur de ses derniers discours et sa volonté désormais affichée de se défaire de la présence de la communauté internationale en Côte d'Ivoire, sont autant de signes avant-coureurs que les choses sont en marche", assure notamment le journal qui en veut pour preuve la multiplication des rencontres du chef de l'Etat avec ses militaires.
"Le nouveau réveil", quotidien proche du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI, l'ex-parti unique), d'ordinaire assez mesuré, est encore plus alarmiste que son confrère, qui barre toute sa une avec ce titre, en lettres rouges, : "On va vers des affrontements sanglants" !
Selon le journal, qui cite M. Alphonse Djédjé Mady, secrétaire général du PDCI et président du directoire du Rassemblement des houphouetistes pour la démocratie et la paix (RHDP), des armes lourdes ont été convoyées sur les lignes de front et 5.000 supplétifs libériens ont déjà été positionnés dans le sud-ouest du pays.
"Des gendarmes préparent un coup", avertit pour sa part "24 heures", un autre quotidien indépendant de la capitale économique, qui cite des "sources militaires" selon lesquelles un groupe de pandores s'est déjà mis en tête d'agir pour exiger la démission du Premier ministre Charles Konan Banny, au cas où la communauté internationale lui donnerait les pleins pouvoirs.
"Le patriote", quotidien proche du Rassemblement des républicains (RDR, opposition libérale) ne fait pas dans la dentelle qui accuse carrément le président Gbagbo de menacer... la sécurité internationale !
"C'est un casus belli. La décision de Laurent Gbagbo de ne pas se rendre à la réunion de New York sur la Côte d'Ivoire et ses propos tenus dans la presse française exhortent les forces impartiales à s'en aller du pays si elles le désirent, s'apparentent bien à une déclaration de guerre à la communauté internationale", soutient notamment le journal qui estime que les "décisions de l'ONU doivent s'imposer à lui".
La crainte d'une éventuelle reprise des hostilités entre l'armée gouvernementale et les ex-rebelles agite également le quotidien "l'Inter", du groupe Olympe, qui annonce que les Forces armées des Forces nouvelles (FAFN) ont repris les entraînements militaires depuis les discours guerriers du président Gbagbo et du général Philippe Mangou, chef d'état-major général des FDS, et que les "jeunes patriotes", partisans du chef de l'Etat, sont pratiquement sur le pied de guerre.
Quant à "Notre voie", quotidien proche du FPI, qui ne semble pas partager l'état d'esprit de ses confrères, qu'il pourrait d'ailleurs juger "trop alarmistes", il ne boude pas son plaisir, qui se délecte de ce qu'il qualifie "de camouflet infligé à la France" à New York, à la suite du refus de la Chine et de la Russie de voter un texte présenté par Paris invitant l'ONU à prendre des sanctions contre deux personnalités du camp présidentiel.
Dans la même veine, le quotidien gouvernemental "Fraternité matin" s'en prend à la France et à ses alliés africains, qu'il accuse de vouloir tout mettre en oeuvre pour "neutraliser" le président Laurent Gbagbo, avant d'organiser des élections qui soient favorables à ses opposants.
"En dépit des dénégations, Paris ne veut pas voir s'organiser des élections tant que la défaite de Gbagbo n'est pas assurée. Voici la vraie cause du malheur des Ivoiriens. Les tergiversations, les volte-face, les négociations interminables, les résolutions non appliquées relèvent de la même logique », accuse l'éditorialiste de "Fratmat". |