|
 |
  |
 |
|
 |
|
 |
 |
 |
 |
 |
|
 |
 |
Gabriel Valero et Max William Djumbon
|
 |
 |
|
 |
|
 |
|
 |
 |
|
|

Pouvez-vous vous présenter à nos internautes ?
Gabriel : Je suis Gabriel Valero gérant de la « société Vallero et fils ». Nous sommes deux dans la société, et je travaille avec mon associé Max...
Max : je suis Max William Djumbon, je suis associé dans le projet. Et je peux déjà vous dire que nous ne sommes pas trop de deux pour arriver au bout du projet.
Comment l’idée de créer une coopérative produisant de l’huile d’Argan vous est-t-elle venue ?
 |
Pour certains rendez-vous, on préfère envoyer Gabriel car on pense que ça passera mieux vu qu'il est blanc |
 |
|
Max |
Gabriel : Je m’occupais de personnes victimes de fermetures d’usines automobiles dans les années 90 en France, des immigrés qui sont arrivés en France dans les années 70, qui ont été recrutés directement au Maroc à l’époque où la France avait besoin de main d’œuvre. Le monsieur qui m’a fait venir dans son village était de ceux là, arrivé en France en 70, où il a travaillé directement chez Citroën. Il travaillait à l’usine, vivait dans un foyer de « jeunes travailleurs » construit en face de l’usine.
Comme beaucoup d’ouvriers immigrés de cette génération, ils n’ont pas eu accès à la culture car on les faisait vivre en circuit fermé, beaucoup ne savaient pas lire ou écrire, ne parlaient pas français.
En 1989, l’usine a fermé et ils se sont retrouvés délogés de leur foyer de « jeunes travailleurs ». Parallèlement à ça, ces gens qui se sont retrouvés en France pour gagner de l’argent qu’ils envoyaient dans leurs familles aux pays ne pouvaient plus le faire car ils n’avaient plus de travail. |
|

Il n’osait plus retourner au pays, à cause du chômage, de la honte de ne peut plus pouvoir rapporter d’argent. Avec un sentiment de culpabilité de honte, il s’est retrouvé pris dans un engrenage de misère, de perdition, avait perdu sa dignité quand je l’ai rencontré en 2003. Il était resté plusieurs années sans donner de nouvelles à sa famille. En 2003, je l’ai recueilli dans le centre avec lequel je travaillais, et on a mené des recherches grâce auxquelles on a découvert qu’il avait des enfants, une femme, on a retrouvé des photos etc
Par la suite, en 2004, je l’ai accompagné au Maroc lorsqu’il y retournait, et j’ai eu la chance d’être formidablement accueilli dans son village. J’ai appris la langue, la culture, et j’ai eu de très bons contacts avec les habitants.
Quand j’ai vu l’huile d’Argan qu’ils produisaient dans ce village, je me suis dit qu’elle était extraordinaire, et bien meilleure que celle que j’avais eu l’occasion de voir auparavant dans le commerce. J’ai émis l’idée de commercialiser l’huile en créant une coopérative. On a commencé avec neuf femmes dans la coopérative et les hommes qui étaient plus réticents à l’idée de faire travailleur leurs femmes ont fini par souscrire à l’idée et on est passé à 29 femmes dans la coopérative.
En France on est de plus en plus présent dans les grandes surfaces alors qu’au début on était essentiellement dans les restaurants et les petites boutiques bio. On produit entre 750 kilos et 1000 kg d’huile d’Argan par an sachant que pour faire 1 L d’huile d’Argan il faut 90 kg de noix. Le Monsieur qui m’a accueilli dans le village est propriétaire des locaux de la coopérative, et nous faisons travailler les femmes du village. Nous commercialisons selon nous la seule véritable huile d’Argan vendue en France. |
 |
|
 |
|
 |
 |
 |
 |
 |
|
 |
 |
Une des travailleuses de la coopérative
|
 |
 |
|
 |
|
 |
|
 |
 |
|
|

Comment cela se passe t-il en matière d’organisation du travail entre vous deux?
Gabriel : je m’occupe plus spécifiquement de la partie « importations », je vis la moitié de l’année au Maroc, pour m’occuper de la production, de la coopérative, des personnes sur place.
Max : Disons que moi je m’occupe plus de ce qui concerne la prospection téléphonique, le suivi des clients, et tout ce qui concerne directement le travail de bureau. S’il y a des entretiens je vais les faire. Je travaille à plein temps quand il n’est pas là. Parallèlement, je dois aussi avoir un autre job pour joindre les deux bouts car on ne vit pas encore de la société.
Comment faut-il s’organiser pour avoir les moyens de monter son projet ?
Gabriel : il faut avoir un projet qui tient la route, des produits de qualité, il faut démarcher, faire le tour des banques, des amis, et aussi des organismes qui aident les jeunes entrepreneurs. On a bénéficié d’un prêt EDEN de 6000 euros à taux zéro après présentation de notre projet (prêt remboursable deux ans après son obtention), mais il faut savoir que le prêt EDEN est conditionné à un l’obtention d’un prêt de la banque. |

Cela a-t-il été facile de convaincre les banquiers ?
Gabriel : on fait du commerce « équitable », on pré-finance la production, on paye tout de suite les fournisseurs alors que les clients nous payent souvent à 60 jours, ce qui génère des tensions de trésorerie et fait peur aux banquiers. Cela dit, on a fini par tomber sur un banquier humain qui a compris que les premières années, on ne gagnerait pas forcément énormément d’argent.
Max : avec le prêt EDEN, le prêt de la banque, et le capital qu’on a nous même apporté, on a pu démarrer. On a commencé la société avec 17 000 euros environ.
Au niveau de la distribution de votre produit, comment cela se passe t-il ?
Gabriel : On doit négocier avec les directeurs de magasins, présenter un produit « alléchant » financièrement avec les prévisions d’écoulement, sans passer par les centrales d’achat qui prennent entre 20 et 25 % du prix (service de stockage de distribution). Quand vous traitez avec les centrales d’achat, celles-ci vous recontactent deux ou trois mois plus tard en disant de baisser les prix de moitié. Et accepter ces conditions reviendrait à baisser soit les salaires des ouvrières, soit la qualité de notre produit. On passe donc directement par les responsables de magasins, mais cela crée des problèmes de référencement car négocier en direct est un peu mal vu.
Max: on est tout de même référence nationalement par un des leaders français de la distribution (carrefour NDLR) c est quand même beaucoup plus facile de travailler de cette façon.
Gabriel : On a tout de même mis un an à obtenir cette autorisation. Donc le processus peut être très long. Ça peut être décourageant. En créant une entreprise comme ça où on doit traiter avec la grande distribution, il faut penser qu’on peut tout de même passer un à deux ans sans se salarier, donc penser à avoir un petit job à côté. |
 |
|
 |
|
 |
 |
 |
 |
 |
|
 |
 |
Il faut 90 kg de noix pour faire un litre d'huile d'Argan
|
 |
 |
|
 |
|
 |
|
 |
 |
|
|

Max, vu que tu es Noir, est ce que tu as déjà rencontré des problèmes quand tu démarches des clients, quand tu vas à tes rendez-vous…?
Max : Non, je n’ai pas rencontré de problèmes. Disons qu’entre les personnes qu’on démarche et moi, il y a un rapport de « sérieux » qui s’installe, et ces personnes comprennent qu’on ne fait pas n’importe quoi. En ce qui concerne spécifiquement les clients, disons que dans la grande distribution, il y a pas mal d’acheteurs maghrébins. Donc à priori il n’y a pas de problèmes dans ce domaine là.
Maintenant, c’est vrai que certains organismes, quand on a des rendez-vous, c’est Gabriel qui y va, car on se dit étant blanc, avec lui il n’y aura aucun risque de discrimination et ça passera mieux. Par exemple pour le rendez-vous avec le banquier, c’est Gabriel qui y est allé.
Gabriel : On est encore dans une situation où tout rendez-vous est important pour nous. Même si dans le même temps, je sais qu’en faisant ça, on entretient le système dans le mauvais sens puisque le banquier ne s’habitue pas à voir un Noir porteur de projet.
Max : Pour le boulot, j’ai un « business name », mon nom a été « arrangé phonétiquement », c’est un nom plus coulant à l’oreille française (rires), ça passe mieux, ça évite des demandes du genre « vous pouvez répéter, comment s’épelle votre nom » etc
 |
On a vu des présidents de coopératives rouler en Hummer alors que les ouvrières étaient moins bien payées qu’avant l’introduction de ce label commerce équitable |
 |
|
Gabriel |
|

Vous travaillez également avec une fédération de commerce équitable.
Gabriel : A la base, c’est une démarche de commerce équitable que j’ai voulu avoir dès l’origine, en rémunérant convenablement les ouvrières, et en limitant le plus possible les intermédiaires afin de valoriser le producteur. J’ai voulu contacter un grand label de commerce équitable qui a pignon sur rue, je leur ai expliqué ma démarche, ils m’ont dit qu’ils distribuaient dans toute la France, et étaient référencés dans la grande distribution, mais que pour pouvoir bénéficier du label « commerce équitable » et pouvoir communiquer dessus, il fallait que je sois bénévole ! Je leur ai répondu que je voulais vivre de mon travail même si l’argent n’est pas le moteur du projet.
Ils m’ont alors dit de me mettre président de la coopérative, qu’ils me verseraient l’argent en direct, et qu’après je me débrouillerais avec les ouvrières. Dans ce cas, il n’y a pas de contrat avec les ouvrières, et on paye le président de la coopérative qui lui rémunère les ouvrières à sa guise. C’est pourquoi il y a eu des scandales en Amérique latine où on a vu des présidents de coopérative rouler en « Hummer » alors que les ouvrières étaient moins bien payées qu’avant l’introduction du label « commerce équitable » de ce grand label.
Aujourd’hui, les conditions d’équité dans le commerce équitable avec ce grand label ne sont plus les mêmes qu’au début, puisqu’ils ont poussé leurs partenaires à baisser leurs prix, ce qui ne peut se justifier que par une baisse de la qualité ou de la rémunération des ouvriers.
J’ai donc approché un petit label, « Minga » qui fait confiance aux importateurs. C’est un commerce équitable plus proche du terrain. Tous les adhérents à cette association sont des petites SARL, qui commercialisent des produits de qualité même si elles ont encore du mal à être à l’équilibre. Une galerie marchande de 600 m² sera bientôt créée qui permettra aux membres d’exposer leurs produits et savoir-faire. |

Est-ce que vous vivez déjà de votre société ?
Gabriel : La société est jeune, elle a peine un an, l’argent gagné est réinvesti, donc on n’en vit pas encore, on est obligé d’avoir des activités en parallèle pour vivre. Je suis commercial de formation, donc je travaille pour d’autres sociétés en tant que commercial le week-end ou les après-midi. Sur mon temps libre…
Vous ne devez pas dormir beaucoup…
Max : Comme tous jeunes créateurs qui en veulent, on ne travaille pas 35 heures (rires). On est souvent debout tôt le week-end. Il m’arrive de donner des cours de danse le dimanche matin. A la base j’ai fini un cycle de langues étrangères appliqué au commerce international. A la fin de mon master 2, j’ai directement commencé à travailler sur le projet, en me disant que c’était une bonne expérience à vivre. Et même dans le ça où ça ne marcherait pas, je pourrais la faire valoir. Cela dit, on espère tout de même pouvoir se rémunérer d’ici un à deux ans, on a de bons contacts avec les prospects, et c’est important de garder le moral !
contacts :
Gabriel Valero et Max William Djumbon
Valero & fils SARL, 8 rue Genova, 94110 Arcueil
Tel : 06 62 38 66 56 Fax : 01 47 40 30 99
Mail : huileauxtresors@wanadoo.fr |

|
 |
|
 |
 |
 |
 |
Donnez
votre opinion ou lisez les 4 réaction(s) déjà écrites
Version
imprimable de l'article
Envoyer
l'article par mail à une connaissance
Partager sur:
Facebook
Google
Yahoo
Digg
Delicious
|
|
|
Les dernières photos publiées sur Grioo Village |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Top |
|
|
|
|
|
|
  |
 |
|
|