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Le dernier livre d’Azouz Begag, "Un mouton dans la baignoire" est sorti le 11 avril. L’ex-ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances raconte sa rencontre improbable avec Dominique de Villepin, alors ministre des affaires étrangères, son arrivée au sein du gouvernement, sa découverte d’un monde politique à mille lieux de l’image qu’il en avait, (plus violent et plus dur)...Begag revient sur son apprentissage du rôle (du "métier") de ministre, ses doutes (il a plusieurs fois songé à démissionner), son combat pour exister au sein du gouvernement, la dégradation de ses relations avec Nicolas Sarkozy, et ses relations avec les médias. Azouz Begag affirme avoir souvent été la cible de journaux ("Libération", "le Canard Enchaîné"), et les soupçonne même d’avoir été intimidés sinon manipulés par les "Sarkozystes". |
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Les débuts au sein du gouvernement |

En novembre 2003, Azouz Begag croise par hasard Dominique de Villepin qui est à l’époque ministre des affaires étrangères et sous l’impulsion de ses amis lui fait passer un mot à table disant « qu’il aimerait être nommé ambassadeur quelque part dans le monde». La plaisanterie fait sourire Dominique de Villepin. En juin 2005, Villepin, devenu premier ministre, appelle Begag au téléphone pour lui faire savoir qu’il est nommé au sein du gouvernement en tant que ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances rattaché directement au premier ministre. Le temps de fêter sa nomination et Azouz Begag est plongé directement dans le bain. Une des premières choses qu’il apprend c’est qu’en tant que ministre, il doit désormais surveiller ses déclarations aux journalistes.
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Après moi, les ministres d’origine immigrée qui suivront auront la tâche plus aisée |
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Azouz Begag |
Son ministère n’a pas d’administration ni de budget propre, ce qui même s’il s’en défend, limite considérablement sa marge de manœuvre et contribuera à le faire passer pour le "beur de service" ou "le beur de Villepin" selon les mots de quelques journalistes. Alors qu’il essaye de constituer son équipe, une femme viendra le rencontrer pour intégrer son cabinet. Cela ne se fera pas, mais par la suite il apprendra via la presse qu’elle est une petite-nièce de Maurice Papon. Pour lui ce n’est pas le fait du hasard : "Elle a été envoyée comme par hasard vers les deux seuls arabes du gouvernement" écrit t-il.
L’anxiété, la pression, la peur de mal faire, l’individualisme au sein du gouvernement, le fait de devoir se battre pour se faire reconnaître par ses collègues et les médias le stressent, et le conduisent à faire des insomnies qui dureront des mois. Pour combattre ces maux, il devient un adepte d’un médicament, le Temesta connu pour combattre l’anxiété. De fait il faut plusieurs mois à Azouz Begag pour rentrer dans son costume de ministre, être à l’aise avec les journalistes, comprendre les mécanismes politiques. Il rencontrera même deux anciens ministres qui lui conseilleront de "trouver sa voie avec sa personnalité" pour s’imposer. |
Ses rapports avec ses collègues ministres |

Quelques ministres sont souvent cités, comme Jean-Louis Borloo que Begag considère comme une sorte de spécialiste de la communication assez fort pour se tirer la couverture à lui et s’approprier les idées des autres. Il est qualifié de "plus invraisemblable des ministres" par Begag qui le considère comme un démagogue. Begag ajoute qu’il n’obtiendra jamais rien de Borloo ("qui le prend pour son rival de gauche au sein du gouvernement") pendant tout le temps où il sera ministre. Azouz Begag raconte de petites humiliations :
un de ses collègues ne cesse d’annuler les rendez-vous qu’ils prennent. Un autre, Donnedieu de Vabres ne se présente pas à un rendez-vous qu’ils se sont fixés dans la cour de l’Elysée à 9h30. Raison : le collègue "était trop fatigué" ce matin là en question...Douste-Blazy le fait attendre trois quarts d’heures avant de le recevoir. Lors d’une séance à l’assemblée, Borloo qui ne souvient pas de son nom (ou se trompe) et l’appelle "Yazid"...
Mais le ministre avec lequel Begag aura le plus de problèmes est sans conteste Nicolas Sarkozy. Les relations entre les trois hommes peuvent être résumées en trois épisodes : |
Les rapports avec Nicolas Sarkozy |

Episode 1 : Begag rencontre pour la première fois Nicolas Sarkozy au lendemain de l’incendie du boulevard Vincent Auriol. Le tête-à-tête se passe mal, Begag affirme être contre la discrimination positive, et qualifie "d’excellente connerie" la nomination du préfet "musulman" Aissa Dermouche. Sarkozy précisant néanmoins qu’il avait utilisé l’expression "musulman" comme "culturelle" et non pas en référence à la religion. Les critiques de Begag agacent le ministre de l’intérieur qui prend congé de lui.
Episode 2 : la crise des banlieues et les frictions avec Nicolas Sarkozy
Octobre 2005 : la mort de deux jeunes à Clichy Sous Bois et les propos de Nicolas Sarkozy répondant à une habitante d’Argenteuil en disant qu’il allait la "débarrasser de la racaille" servent de catalyseurs à la crise des banlieues. Azouz Begag s’exprime contre la "sémantique guerrière" de Nicolas Sarkozy en disant que le ministre de l’intérieur ne pouvait pas insulter les jeunes et vouloir "nettoyer les cités au Kärcher".
Un rendez-vous est organisé entre lui et Nicolas Sarkozy : "pourquoi m’attaques tu Azouz ? Je n’ai jamais rien dit contre toi" lui dit ce dernier. Begag répond et enchaîne : "Mon grand-père est mort en 1918 dans le 23è régiment de tirailleurs algériens de la Somme. Qui est le plus français de nous deux ?" "C’est toi" reconnaît Nicolas Sarkozy qui selon Azouz Begag ajoute "qu'il est hongrois."
Finalement Sarkozy lui propose de le rejoindre place Beauvau le lendemain pour se rendre à l’Elysée à pied sous l’œil des caméras ou de se rendre tous les deux un soir en banlieue en présence de journalistes. Ce qui constituerait une excellente opération de communication pour sceller leur réconciliation. Begag accepte, mais à condition que l’opération se déroule sans caméras. Nicolas Sarkozy trouve que l’opération ne sert à rien s’il n’y a pas de caméras. |

Episode 3 Lors d’une rencontre avec une association à Marseille, Azouz Begag déclare qu’il faut poser les questions concernant l’immigration à Nicolas Sarkozy et ajoute sous forme de boutade "je ne m’appelle pas Azouz Sarkozy". "Libération" en fait le titre d’un article. De retour à Paris, Begag apprend via Dominique de Villepin que Nicolas Sarkozy est furieux. Lorsque le ministre de l’intérieur arrive à joindre Begag au téléphone, il lui passe un "savon" :
"Tu es un connard, un déloyal, un salaud ! Je vais te casser la gueule ! Tu te fous de mon nom…Azouz Sarkozy...Tu te fous de mon physique aussi, je vais te casser la gueule, salaud ! Connard !" Begag essaye de s’expliquer mais n’en a pas le temps : "j’en ai rien à foutre de tes explications ! Tu vas faire une dépêche à l’AFP pour t’excuser, sinon je te casse la gueule."
Après cet épisode, la rupture est définitivement consommée entre Sarkozy et Begag qui devient définitivement persona non grata chez les partisans du président de l’UMP. Brice Hortefeux que Begag croisera à l’assemblée lui dira même de "dégager" de sa vue :
"Allez, fissa, sors de là ! Dégage d’ici je te dis, dégage !" (...)
"Il utilise un terme datant de l’époque coloniale, il se croit encore dans l’Algérie de l’Indigénat" écrit Azouz Begag. |
Quelques épisodes marquants : |

La mésaventure aux Etats-Unis
Azouz Begag revient sur l’épisode de son "arrestation" (qui n’en était pas une) lors de son voyage aux Etats-Unis. Son nom "bizarre", la présence d’un visa annulé sur son passport et son visa diplomatique, son apparence "arabe" avaient attiré l’attention d’agents de la police des frontières qui l’ont contrôlé avec insistance avant de le laisser partir finalement.
Begag considère l’incident comme pas très important, mais finalement la France se plaindra auprès du département d’Etat américain pour mauvais traitement envers un membre du gouvernement. Le département d’Etat enverra finalement des excuses officielles. Par la suite, les médias français s’empareront de l’affaire, qui est un peu montée en épingle et largement exagérée selon lui :
"des discriminations au faciès comme celles d’Atlanta, les gens de mon espèce en vivent en France depuis 30 ans, ce n’est pas la peine de se dédouaner sur le dos des américains !" |

Elkabbach et les "Bounty"
Le mot "Bounty" est devenu célébrissime. Begag raconte que lorsque Jacques Chirac a convoqué les présidents de chaînes et des grands médias pour leur demander de donner un coup d’accélérateur en matière de diversité, Jean-Pierre Elkabbach a déclaré au président français :
"Chez eux, dès qu’un des leurs sort la tête de l’eau, il est aussitôt traité de Bounty par ses frères...un Noir de peau, mais Blanc dedans...". Un raccourci qui ne correspond évidemment pas à la réalité puisque si Gaston Kelman a été qualifié de "Bounty" comme il le dit lui même, il ne viendrait à personne l’idée d'utiliser le même qualificatif pour désigner un Lilian Thuram parcequ'il a émergé... |

Jamel Debbouze
Azouz Begag rencontre Jamel, un des humoristes les plus populaires de France pour une discussion. Entre les deux le courant passe bien. Mais Begag qui est sans doute un peu trop susceptible, prend mal l’humour de Jamel au festival de Cannes lors de la remise des prix pour "Indigènes". Jamel déclare en effet :
"Azouz Begag, ah le ministre de l’inégalité des chances ! Le pauvre il fait ce qu’il peut, mais il est tributaire de la situation..."
Que dirait donc Nicolas Sarkozy que le même Jamel a appelé "Joe Dalton" lors d’une émission chez Marc Olivier Fogiel ? Begag perçoit l’humour de Jamel comme une attaque et en viendra même à regretter que "les maghrébins ne puissent pas s’unir". |

Pulvar / PPDA le 14 juillet
Begag suggère que pour marquer le coup en matière de diversité, Audrey Pulvar interroge Jacques Chirac le 14 juillet en compagnie de Patrick Poivre d’Arvor. Finalement sans qu’on sache ce qui s’est réellement passé, ce seront David Pujadas et PPDA qui interrogeront Jacques Chirac. L’Elysée fera savoir à Azouz Begag "qu’il n’y a pas lieu de commenter la décision..."
Un regret cependant, que l’incident qui a conduit au titre du livre ne soit pas abordé. Le titre "un mouton dans la baignoire" renvoyait originellement à une expression utilisée par Nicolas Sarkozy lors d’une émission sur TF1. Le candidat de l’UMP voulait mettre au pas "les polygames, ceux qui pratiquent l’excision ou égorgent des moutons dans les baignoires ", une expression qui avait provoqué la fureur d’Azouz Begag.
Azouz Begag, "Un mouton dans la baignoire", Editions Fayard
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Vidéos : Azouz Begag quitte le gouvernement suite à son livre / Azouz Begag critique Nicolas Sarkozy |

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