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Anna Zingha, Reine d'Angola
20/09/2005
 

Un extrait de la vie de cette grande figure historique à découvrir dans l’ouvrage de Sylvia Serbin, Reines d’Afrique et héroïnes de la diaspora noire (Editions Sépia)
 
Par Sylvia Serbin
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Dominant pendant une trentaine d’années l’histoire de l’Angola du 17e siècle jusqu’à sa mort à 82 ans, elle opposa une farouche résistance aux ambitions du Portugal sur son royaume.

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Anna Zingha  
Anna Zingha
© Reines d'Afrique
 

Débarquant des caravelles de l'amiral Diego Cao dans cette partie de l'Afrique en 1484, les Portugais furent surpris d’y découvrir un véritable eldorado de huit provinces insolemment fertiles, arrosées de nombreux cours d'eau et dotées d'une agriculture vivrière autosuffisante et d’élevages de bovins. Les bourgs, parcourus d’allées d’orangers, de grenadiers et de citronniers, étaient reliés par des pistes bien entretenues. Au XVIe siècle, un visiteur européen écrivait que l’endroit «offrait au voyageur le spectacle le plus brillant et le plus enchanteur. Des vignobles immenses, des champs qui tous les ans se couvrent d’une double moisson, de riches pâturages. La nature semble prendre plaisir à rassembler ici tous les avantages que les mains bienfaisantes n’accordent que séparément dans les autres contrées et, quoique noirs, les habitants du royaume d’Angola sont en général fort adroits et très ingénieux ».
Les Portugais y trouvèrent en effet une population industrieuse occupée à des activités aussi variées que l’artisanat – tissage du velours de raphia, travail de l'ivoire, tannage de peaux, fabrication d’ustensiles en cuivre-, l'extraction minière et le commerce transfrontalier. Mais ce qui attira surtout leur attention, ce furent les diamants charriés par le fleuve Cuanza. Sans attendre, ils décidèrent de prendre officiellement possession de ce lieu béni au nom de Sa Très Chrétienne Majesté le roi du Portugal, afin d’en faire une escale d'approvisionnement en esclaves pour la mise en valeur de leur territoire du Brésil. Ainsi, en déportant massivement les populations locales, ils se rendraient plus facilement maîtres des richesses du pays.

Toutefois, même si les visiteurs européens se croyaient autorisés à s'approprier tout ce qui s'offrait à leurs yeux, cette contrée faisait partie intégrante du royaume du Matamba-Ndongo. Se rendant compte de leurs intentions, en 1575 le souverain de l'époque lança ses soldats contre une colonne d'exploration, attirant sur son pays les foudres des conquistadores.

L’Angola aujourd’hui  
L’Angola aujourd’hui
© cia.gov
 

Ces derniers s'élanceront à la conquête du royaume récalcitrant et pendant près d'un siècle, les mousquets cracheront leur feu contre des guerriers armés de lances et de leur seul courage. Les provinces côtières tomberont les premières. L'annexion du Ndongo amputera le Matamba de sa façade maritime et permettra aux Portugais d’établir la prospérité de la ville de Luanda sur l’exportation de l'or, du diamant et d’esclaves à destination des plantations américaines.
Bien que sa superficie ne cessât de se réduire, le Matamba se voulait un symbole de résistance. Sur cette terre régnait depuis plusieurs générations la famille de la reine Zingha. En 1617, à la mort du père qui fut le huitième roi du Matamba-Ndongo, le fils aîné s'empara du pouvoir après avoir fait assassiner le successeur désigné par le défunt.
Pressé de repousser l’avancée portugaise postée à une cinquantaine de kilomètres de Cabasso, sa capitale, Mani Ngola leva trente mille guerriers prêts à mourir en braves. Mais après plusieurs mois d'une campagne meurtrière où plus de la moitié de son armée fut décimée, le roi dut accepter de rediscuter d’un nouveau tracé des frontières.

C’est sa sœur, la princesse Zingha qu’il détestait pourtant, qui fut chargée d’aller négocier le traité à Luanda. De son vrai nom Ngola Mbandi Nzinga Bandi Kia Ngola, « la reine dont la flèche trouve toujours le but », c’était une habile tacticienne au tempérament de fer et au charisme incontesté. Initiée dès le plus jeune âge par son père qu’elle suivait comme une ombre, elle avait appris à réagir en « homme » d’Etat.
Portée en litière par une brigade de serviteurs véloces, Zingha, accompagnée d’une escorte de courtisans et d’un détachement armé, fit le voyage en quelques jours. Luanda ! Que de transformations sur ce territoire arraché au royaume de ses pères ! Avec ses allures de ville européenne et ses églises, dont la première fut construite en 1505, elle était parsemée d’imposantes demeures en bois abritant les nouvelles élites coloniales, et de hangars à esclaves tournés vers l'Atlantique.

 
 

L’annonce de l'arrivée de l'ambassadrice angolaise avait attiré une foule de curieux pleins d’excitation au débouché de la piste conduisant au Matamba. Une salve de vingt et un coups de canons tonna enfin, saluant l'arrivée de la délégation aux portes de la capitale. Le cortège apparut, déclenchant des exclamations d'enthousiasme dans la foule africaine contenue par deux colonnes de miliciens portugais.
Zingha était vêtue d’un pagne de fin velours en raphia. Une étole de couleur vive posée en écharpe sur ses épaules lui couvrait à peine la poitrine. Sa couronne d'or massif sertie de pierres précieuses et surmontée d'une touffe de plumes multicolores formait un petit casque sur sa tête. Tout en elle traduisait la fierté des femmes de haute lignée.

Comme indifférente à la curiosité manifestée sur son passage, la princesse observait, de sa litière, l’étrange univers qui se présentait à elle. Les cases rondes de jadis avaient fait place à des habitations colorées entourées de larges balcons et percées de volets en bois. Des ruelles avaient été tracées, où déambulaient de nouveaux types de populations plus métissées. Elle remarqua les nombreuses boutiques de commerçants portugais et l’ostentation de ces quelques Noirs aisés qui avaient troqué leurs costumes traditionnels contre des tenues occidentales.
Elle sentit aussi la résignation des gens du petit peuple, arrachés à leurs plantations de vivriers et privés des métiers dont ils tiraient jadis leur subsistance. L’administration à laquelle ils étaient désormais assujettis ne leur reconnaissait qu’un seul statut, celui d’esclave ou de serviteur. D’ailleurs, en longeant la rade elle aperçut les marins portugais, espagnols, italiens et hollandais, affairés à embarquer sans ménagement des centaines d'esclaves alignés. En faction sur le quai, des négriers blancs contrôlaient le déroulement des opérations aidés d’intermédiaires Afro-brésiliens venus pour la plupart de l’île de Sao Tomé. Luanda avait la réputation d’être un port de traite féroce. Les esclaves y étaient parqués comme des bêtes et près de la moitié d’entre eux mourraient de malnutrition et de mauvais traitements avant même leur transfert sur les bateaux.

 
 

Accueillie au palais du gouverneur par le vice-roi du Portugal en personne, Don Joao Correia da Souza, Zingha fut dirigée vers le salon où devaient avoir lieu les pourparlers. Mais en entrant dans la pièce, elle eut un imperceptible mouvement de raideur. Elle venait d’apercevoir, posés par terre sur un tapis, face à l'unique fauteuil de velours rouge visiblement destiné au vice-roi, deux coussins de brocart frangés de fils d'or. Elle comprit d'emblée que ces coussins étaient destinés à son assise. Cette différence de traitement suggérant un état d'inféodation lui déplut souverainement. D'un geste sec elle ordonna à l'une de ses suivantes d'approcher.

La servante n’eut point besoin d’explication pour comprendre le courroux de sa maîtresse. Elle se mit précipitamment à genoux sur le tapis et, prenant appui sur ses coudes, pencha le buste en avant et lui présenta son dos. Un bourdonnement d’effarement saisit l’assemblée des officiels portugais. Zingha se posa sur ce fauteuil improvisé et y demeura pendant toute la durée de l'entretien.
Son sens de la répartie et son habileté politique dominèrent entièrement la rencontre, disent les chroniques portugaises de l’époque. Elle ne céda en rien sur ce qui semblait relever de la dignité de son peuple et parvint à obtenir le recul des troupes étrangères hors des frontières antérieurement reconnues et le respect de la souveraineté du Matamba.
Au moment de clore la négociation, le vice-roi suggéra que le Matamba se mette sous la protection du roi du Portugal. Ce qui supposait en réalité le paiement d’un impôt de vassalité consistant en la livraison de douze à treize mille esclaves par an à l’administration coloniale ! Mais c’était mal connaître son interlocutrice. "Sachez, Monsieur, objecta-t-elle, que si les Portugais ont l'avantage de posséder une civilisation et des savoirs inconnus des Africains, les hommes du Matamba, eux, ont le privilège d'être dans leur patrie, au milieu de richesses que malgré tout son pouvoir, le roi du Portugal ne pourra jamais donner à ses sujets. Vous exigez tribut d'un peuple que vous avez poussé à la dernière extrémité. Or vous le savez bien, nous paierons ce tribut la première année et l'année suivante nous vous referons la guerre pour nous en affranchir. Contentez-vous de demander maintenant, et une fois pour toutes, ce que nous pouvons vous accorder".

Le livre de Sylvia Serbin  
Le livre de Sylvia Serbin
 

Le débat était clos. Alors qu’elle prenait congé, Da Souza fit remarquer, non sans une certaine gêne, que la jeune servante utilisée comme tabouret n’avait toujours pas quitté sa pose. "L'ambassadrice d'un grand roi, répondit Zingha avec hauteur, n'utilise jamais deux fois la même chose. Cette fille m'a servi de siège. Elle n'est plus à moi !"
Et c’est ainsi qu’en cette année 1622, Zingha fit une entrée remarquée dans l'histoire tourmentée des relations entre le Portugal et l'Angola. Car la paix ne dura pas. Succédant à son frère en 1624, cette femme d’exception résista aux armées occidentales pendant trente ans de campagnes quasi ininterrompues, sans jamais capituler !
Ralliant à sa cause plusieurs Etats voisins, elle prit le flambeau de la résistance, réorganisant son armée en carrés disciplinés ; aguerrissant ses soldats par des exercices d’endurance comme elle l'avait vu faire chez les Européens, incitant les régiments africains bien équipés enrôlés dans l’armée d’occupation, à rejoindre ses troupes en échange de terres et de fortes récompenses ; lançant sa police secrète sur le port de Luanda pour espionner les débarquements de troupes fraîches en provenance de Lisbonne ou du Brésil; utilisant la nature à son profit en choisissant les saisons porteuses de malaria pour harceler les forces adverses épuisées par des fièvres auxquelles elles n’étaient pas habituées.
Les vices-rois qui se succédaient n’en pouvaient plus d’essuyer des échecs face à ce roc indestructible. A soixante-treize ans Anne Zingha continuait de conduire ses troupes entre montagnes, forêt et savanes afin que pas une once de son royaume ne s'émiette. Puis vint le temps de l’apaisement. Sans doute plus clairvoyant que ses prédécesseurs, le nouveau gouverneur Salvador Corréia avait compris qu'une guerre interminable ne serait profitable à aucune des deux parties. Les Portugais renoncèrent finalement à leurs prétentions sur le Matamba et un dernier traité fut ratifié le 24 novembre 1657 par Lisbonne.
La paix revenue, Anne Zingha se remit aux occupations quotidiennes de sa charge, releva l’agriculture et réorganisa la société en confiant de nouvelles responsabilités aux femmes du royaume. Elle mourra le 17 décembre 1664, à l’âge de quatre–vingt deux ans, en murmurant : « Mon seul regret est de ne pas laisser un fils qui puisse me succéder sur le trône du Matamba. » Etait-elle en train de revivre, alors que la mort venait à sa rencontre, ce jour maudit où son fils unique, un bébé de quelques mois qui tétait encore le sein, fut assassiné par les sbires de son frère tant haï, ce tyran qui lui vouait une jalousie féroce ?

       
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