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Un jury composé de personnalités reconnues (parmi lesquelles l’écrivain Alain Mabanckou, le sociologue Eric Fassin ou encore l’universitaire Lilyan Kesteloot), présidé par Louis-Georges Tin, porte-parole du CRAN (Conseil représentatif des associations noires de France), a établi durant l’été une sélection de livres en préparation d’un prix récompensant un essai lors de la soirée des Trophées des arts afro-caribéens, le 23 septembre. Un des ouvrages de notre maison d’édition, L’Afrique répond à Sarkozy, écrit par un collectif d’intellectuels africains, y figurait.
Deux semaines avant ladite soirée, les coorganisateurs (répondant au nom optimiste de Good Music…) nous ont informés que l’ouvrage, finalement, n’était pas dans la sélection, qu’il y avait été mis par erreur. En fait, il n’y avait pas eu d’erreur : le jury l’avait bien retenu. Mais alors, pourquoi les opérateurs de cette soirée l’ont-ils écarté, et de manière aussi brutale ?
La réponse tient probablement en ceci : la cérémonie doit être diffusée sur France Télévisions, et en ces temps de peur liée à la réforme audiovisuelle en cours, nul ne doit mécontenter le Château, là où tout se décidera dorénavant… Un ouvrage critiquant le discours de Dakar du Président ? Mais vous n’y pensez pas : en prime time, cela pourrait assombrir les soirées à l’Elysée ! Alors, nos petits censeurs ont tout simplement rayé le livre de la liste. |
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Les membres du jury s’insurgent, signent un communiqué se désolidarisant de cette manifestation, mais qu’importe, la cérémonie doit être belle, pas de fausse note : on veut de la « good music »… Alors, la veille de la cérémonie, les organisateurs réintègrent L’Afrique répond à Sarkozy dans la sélection, en prévenant l’éditeur, la bouche en cœur, que finalement il n’y avait pas eu d’erreur (que l’erreur avait été de dire qu’il y avait eu erreur… vous suivez toujours ?) Le livre étant retenu, ils sont donc inattaquables, n’est-ce pas ?... Un jury fantôme, surgi d’on ne sait où et dont on ignore les membres (puisque le vrai jury avait refusé de délibérer), décide d’attribuer quand même le prix ce soir-là, à la cérémonie du Châtelet, mais à un autre ouvrage bien entendu...
Ce couac digne des Pieds Nickelés, relevant de la « mascarade » selon Alain Mabanckou, est probablement picrocholin à l’heure où tant de défis menacent nos économies et notre environnement. Mais il intervient à un moment crucial pour le paysage audiovisuel français, et doit être pris au sérieux tant il peut être symptomatique. Comme bientôt l’Etat financera en totalité la télévision publique et nommera directement ses dirigeants, on voit que déjà les maillons de la chaîne de production commencent à pratiquer une forme d’autocensure en écartant ce qui peut déplaire en haut lieu. Cela rappelle étrangement les mauvaises heures de l’information des débuts de la télévision en France. Toutes les vigilances sont nécessaires pour repérer les serviteurs trop zélés, et endiguer cette régression.
Philippe Rey
Directeur des éditions Philippe Rey |

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