
Dans le même temps, le pont aérien organisé dans l'urgence par les militaires français pour les expatriés désireux de fuir les violences semble marquer le pas à Abidjan.
A Marseille, le président Jacques Chirac a pris à partie le "régime contestable" de Laurent Gbagbo et affirmé que la France poursuivrait sa mission en Côte d'Ivoire conformément au mandat que lui a confié l'Onu.
Au Nigeria, les chefs d'Etat africains ont apporté leur soutien au projet, d'inspiration française, des Nations unies d'embargo sur les armes frappant les protagonistes (gouvernement et rebelles ivoiriens) du conflit.
Ils ont rappelé que les accords d'Accra II signés en juillet par les deux camps et prévoyant le désarmement des combattants et des réformes politiques constituaient la seule voie de sortie vers la paix.
"Il y a un avion prévu pour demain (lundi). Si demain on n'arrive pas à le remplir, c'est fini", a déclaré à Abidjan le porte-parole de l'opération française "Licorne", le colonel Henry Aussavy. "A priori, c'est fini pour les évacuations mises en place par le ministère des Affaires étrangères", a ajouté l'officier français.
Trois appareils transportant au total 1.050 personnes ont quitté dimanche la cité lagunaire théâtre de graves violences anti-françaises en début et milieu de semaine, portant ainsi à 4.248 le nombre de ressortissants étrangers évacués par les soins de la France en cinq jours.
Au total, des expatriés issus de 63 pays ont trouvé refuge dans l'enceinte du camp des "marsouins" du 43e BIMa attenant à l'aéroport international Félix Houphouët-Boigny d'Abidjan.
D'après le porte-parole de "Licorne", 870 cadres et leurs familles de grandes sociétés étrangères ont également quitté la capitale économique ivoirienne à bord d'avions spécialement affrétés. En outre, un nombre indéterminé d'étrangers ont fui le pays à bord de vols commerciaux réguliers ces derniers jours.
La situation, toujours tendue, s'est nettement améliorée à Abidjan ces derniers jours au niveau de la sécurité personnelle.
Le président Laurent Gbagbo a annoncé sur France inter qu'il entendait reconstituer sa force aérienne pour remplacer les avions détruits par l'armée française.
"Pensez-vous que je vais laisser mon pays sans défense aérienne?", a-t-il dit dans un entretien enregistré samedi mais diffusé le lendemain.
Le week-end dernier, l'armée française avait détruit deux chasseurs Soukhoï et trois hélicoptères de combat Mi-24 de l'aviation ivoirienne après que les deux avions eurent tué neuf militaires français à Bouaké, "capitale" des rebelles nordistes.
De source militaire ivoirienne, on assure les autorités d'Abidjan ont déjà commandé trois autres Soukhoï et trois Mi-24. Deux exemplaires de chaque seraient arrivés dans les pays voisins.
Haussant le ton lors d'un débat à Marseille, le président français a déclaré qu'il ne laisserait pas se développer dans cet ancien pays-phare de l'Afrique de l'Ouest "un système qui ne pourrait conduire qu'à l'anarchie ou à un régime de nature fasciste".
Il a également rejeté les accusations de "guerre coloniale" lancées la semaine dernière par les partisans du chef de l'Etat ivoirien lors de manifestations et violences qui ont provoqué le départ de plus de 5.000 ressortissants occidentaux.
"Je n'ai entendu ça que de la part d'une minorité agissante d'un régime contestable, car, si vous écoutez l'ensemble de l'Afrique, vous n'avez pas du tout ce sentiment", a assuré Jacques Chirac.
Il a également dénoncé "l'ambiance désastreuse" qui règne en Côte d'Ivoire où s'est créé "un système d'affrontements, de tensions". "Le Nord contre le Sud, les musulmans contre les chrétiens, et maintenant la chasse aux Blancs, aux étrangers, parce qu'il n'y a pas que les Blancs, il y a beaucoup d'Ivoiriens en ce moment qui partent".
Ce durcissement est survenu après la décision de Laurent Gbagbo de nommer un "dur" à la tête des Fanci et de recréer l'aviation détruite par "Licorne" après le raid de Bouaké.
Dans un communiqué, le Quai d'Orsay a annoncé dimanche dans un communiqué que plus de 5.000 personnes avaient été rapatriées à ce jour de Côte d'Ivoire. Le ministre des Affaires étrangères, Michel Barnier, s'est rendu dans la soirée à l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle pour accueillir près d'un millier de personnes évacuées.
Samedi, le président Gbagbo avait limogé le chef d'état-major des armées, le général Matthias Doué, pour le remplacer par le colonel Philippe Mangou, qui avait supervisé l'assaut lancé il y a une semaine contre Bouaké.
Cette nouvelle a été chaleureusement accueillie par les "Jeunes patriotes", les partisans du chef de l'Etat et principaux acteurs des violences qui ont eu lieu à Abidjan.
"Mangou, c'est quelqu'un qui fonce. Avec lui, on sent la hargne de pouvoir réunifier le pays, de pouvoir aller jusqu'à libérer Bouaké", a dit Roland NGuessan, membre des "Jeunes Patriotes".
La Côte d'Ivoire, premier producteur mondial de cacao, vit dans la violence depuis que des rebelles ont pris le contrôle du nord du pays il y a deux ans.
Plus de 10.000 soldats de la paix français et des Nations unies sont déployés en Côte d'Ivoire.
D'après Reuters |