
Depuis quelques semaines, les pages de l’actualité immédiate des journaux et même les pages de l’actualité plus distanciée, bruissent du « malaise » noir, comme l’a titré un grand quotidien national.
S’agit-il enfin d’une réponse aux appels lancés à l’opinion et aux pouvoirs publics pour qu’ils se saisissent de la question de la place et la situation des Noirs en France, pour qu’ils soient davantage à l’écoute des acteurs de terrain qui doivent nécessairement être associés à toute démarche future, pour qu’ils mettent tout en œuvre afin que la diversité culturelle contribue à la richesse nationale, et non à la marginalisation sociale ?
S’agit-il de l’installation du vrai débat nécessaire sur cette question fondamentale ? Il est naturellement trop tôt pour se prononcer, en la matière, tout pronostic serait hasardeux, tant il est vrai que nous avons déjà vécu des moments similaires, des moments pendant lesquels les choses ont semblé pouvoir bouger: En 2004, au moment des élections régionales, en 2002, au moment des élections présidentielles et des législatives ainsi qu’à d’autres moments forts de la vie politique française.
En réalité, tout se passe comme si l’intérêt pour ces questions n’épousait que l’actualité politique majeure.
Depuis quelques semaines, pourtant, le débat surgit hors période électorale et ne cesse de gagner en intensité. Prenons toutefois garde car ce débat nécessaire et légitime ne sera marquant que si les acteurs du débat public ne baissent pas la garde et exercent une pression constante, sans pour autant être disqualifiés.
Ce double enjeu exige crédibilité, légitimité et efficacité.
La crédibilité est essentielle en ce sens que la surexposition de la question peut donner l’illusion à tous d’en maîtriser tous les aspects, or cette question est loin d’être simple car elle se situe aux confluents de l’éthique et des enjeux de pouvoir.
La légitimité est indispensable, aux yeux de ceux dont on prétend porter le parole et aux yeux de ceux à qui l’on s’autorise à la porter.
L’efficacité est à tout le moins nécessaire en ceci qu’il est maintenant souhaitable que le groupe Noir émette des revendications, quantifiables, identifiables et atteignables.
Ce triptyque -crédibilité, légitimité, efficacité- ne peut que souligner de plus fort que le débat n’est rien s’il ne s’accompagne d’un objectif d’intervention.
Cette nécessité d’intervention est devenue une urgence car les Noirs en France expriment qu’ils en ont assez d’attendre !
A ceux qui disent « Laissez le temps au temps et les choses finiront bien par s’arranger » ou encore « Les discriminations dont sont victimes les Noirs en France s’estomperont avec le temps » je réponds : Passez votre chemin. Un simple regard sur l’histoire, permet de mesurer ce qu’une telle assertion comporte d’illusoire et de naïf : Non, le temps ne fait rien à l’affaire ! Les femmes ont été l’objet de discriminations, qui reculent, mais qui n’ont pas toutes disparu. Ce reflux de la discrimination envers les femmes n’a pas commencé en raison du temps, mais parce que les femmes ont pris leur destin en main. Ce ne sont pas les hommes qui se sont tous levés un beau matin en s’écriant, « Messieurs, les dames ont été assez discriminées. Cessons les discriminations ! »
A ceux qui disent que l’habitude de la coexistence sur le même territoire de populations diverses, permettra de résoudre efficacement la question des discriminations, je dis : Regardez autour de vous, rien n’est moins sûr.
Si la coexistence sur un même territoire était un gage de vie commune harmonieuse, il n’y aurait plus d’affrontements en Irlande du Nord.
Oui les Noirs en France ont un avenir mais il leur appartient de le saisir, de se donner les moyens d’exiger le nécessaire débat. Comment faire naître ce débat et le faire sur le long terme ? C’est une question d’importance, qui concerne les Noirs et au-delà, tous les républicains et la France.
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