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Venance Konan : "la situation actuelle du continent africain ne me pousse pas à l’optimisme"
24/12/2008
 

Vétéran de la presse africaine, Venance Konan a beaucoup voyagé sur le continent africain. Dans cet entretien il donne, sans complaisance, son point de vue sur l’état actuel du continent
 
Par Paul Yange
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Venance Konan  
Venance Konan
© grioo.com
 

Vous avez publié l’année dernière (Sept 2007) un livre intitulé "Nègreries" et dans lequel certains ont vu une argumentation proche de celle de Stephen Smith. Vous situez-vous dans la lignée de Stephen Smith ?

Il y a certains points sur lesquels je suis d’accord avec Stephen Smith, mais je ne suis pas à 100% derrière lui. On l’accuse globalement d’afropessimisme, et je partage cet afropessimisme. Quand je regarde mon continent je ne vois pas les choses évoluer positivement. Prenons l’exemple de mon pays la Côte d’Ivoire : jusqu’aux annés 80, ce pays etait considéré comme le plus avancé de l’Afrique de l’Ouest. Aujourd’hui on est réduit à se bouffer, s’entretuer, et finalement détruire le peu qu’il y avait. La Côte d’Ivoire était un pays qui avait réussi à intégrer les gens et aujourd’hui on en est à les chasser.

Les élites africaines ont une grande responsabilité dans la situation actuelle du continent. Ce ne sont pas les populations analphabètes qui nous ont conduit dans cette impasse
Venance Konan


Quand je vois ce qui se passe dans le Nord Kivu, en RDC, pays immense et riche, il n’y a pas de quoi être optimiste. Quand on regarde la situation d’un pays comme le Gabon qui a à peine 1 million d’habitants, qui a du pétrole, du bois, du manganèse, de l’Uranium, qui a tout pour devenir un émirat riche et brillant qui pourrait servir d’exemple, il n’y a pas de quoi être optimiste. Quand on regarde le Sénégal et qu’on voit ce que fait Abdoulaye Wade après tous les espoirs qui ont été placés en lui….En Afrique du Sud, il y a des divisions de l’ANC et des risques d’affrontement là-bas aux prochaines élections. Qu’est ce qui dans tout ça peut inciter à l’optimisme ?

C’est ce genre de propos qui font que certains m’assimilent à Stephen Smith. De mon point de vue, la colonisation, l’esclavage ont joué un rôle destructeur dans l’histoire de l’Afrique. Mais on ne peut pas s’arrêter à ça. On ne peut pas tout imputer à l’esclavage et la colonisation. Il y a nos responsabilités d’aujourd’hui, qui n’ont rien à voir avec l’esclavage ou avec la colonisation. Quand on voit le comportement que nous avons, quand dans cette crise grave que traverse la Côte d’Ivoire M Gbagbo trouve plus urgent d’aller construire un palais...On ne peut pas blâmer l’esclavage et la colonisation. Assumons nos responsabilités, regardons nous dans un miroir et avançons.

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Dans ce tableau, n’y a-t-il pas de points positifs qui ont attiré votre attention ?

Il y a le Botswana que tout le monde cite en exemple, il y a l’île Maurice mais il y a trop peu d’exemples positifs susceptibles de créer une dynamique de développement. Les pays du Nord comme l’Algérie et la Libye ont les moyens d’aider le rester du continent, mais ne sont pas assez nombreux. Par ailleurs, quand on prend l’exemple de Kadhafi, il est un grand révolutionnaire, avec de beaux discours. Cependant, quand il prône l’Union Africaine, on chasse parallèlement des Noirs de son pays...

Au plan individuel il y a des gens comme Malamine Koné qui a créé une entreprise qui marche et qui investit au Mali. On peut trouver quelques personnes comme lui dans chaque pays, mais il y en a trop peu pour contribuer à amorcer une dynamique de développement.

Que vous inspire des pays comme le Nigeria ou l’Angola qui ont un gros potentiel pour servir de locomotive au continent africain ?

Le Nigeria est un pays immense avec une population intelligente. Mais c’est dommage que cette intelligence soit mal utilisée. L’Angola s’est fourvoyée dans une guerre de plus de trente ans. La RDC est l’exemple le plus "scandaleux" du gâchis de potentiel : Rien qu’avec les barrages sur le fleuve Congo, on pourrait donner de l’électricité à une bonne partie de l’Afrique.

De nombreux pays auraient pu entraîner le continent et la Côte d’Ivoire a pendant longtemps été la locomotive de l’Afrique de l’Ouest, mais pour une question de pouvoir, on est entrain de tuer ce pays.

 
© grioo.com  

Les élites africaines ont-elles une responsabilité dans la situation actuelle ?

Bien sûr qu’elles ont une responsabilité. Ce ne sont pas nos populations analphabètes qui nous ont conduit dans cette situation et qui dirigent nos pays. Les intellectuels africains veulent tous faire de la politique. Et quand ils y vont, le résultat est catastrophique. C’est par exemple le cas de la Côte d’Ivoire. M Gbagbo était un intellectuel assez brillant...Zadi Zahorou, Francis Vodié, étaient des hommes assez respectés chez nous. Dès que le multipartisme est arrivé, ils tous créé un parti politique, M Gbagbo est arrivé au pouvoir, et le résultat est là.

Les intellectuels devraient prendre un peu de recul et éclairer mieux les classes dirigeantes pour que nos pays puissent avancer.

Pensez-vous que la diaspora puisse jouer un rôle dans l’avenir du continent ?

Le peu d’espoir que j’ai repose sur la diaspora. C’est elle qui est assez bien formée. Dans tous nos pays sur le continent, on ne forme plus. L’école est véritablement sinistrée, l'état de l'enseignement catastrophique. Au sein de la diaspora il y a le potentiel. J'ai cité tout à l'heure l’exemple de Malamine Koné qui a réussit à l’étranger et qui aide son pays. L’espoir est donc que cette diaspora bien formée, bien outillée puisse revenir investir sur le continent...et créer cet effet d’entraînement.

Quand on voit les appétits qu'il y a autour de la Guinée, j'ai bien peur que ce pays ne finisse dans une situation à l'ivoirienne
Venance Konan


Vous avez écrit plusieurs ouvrages bien accueillis par le public et la critique. Pouvez-vous nous en parler ?

J’ai écrit trois livres. Le premier c’est "les prisonniers de la haine", publié par NEI en Côte d’Ivoire qui a eu du succès localement. Le second c’est "Robert et les catepilla". "Negreries" a été publié aux éditions Frat Mat et a reçu également un bon accueil, Le Monde diplomatique en a fait une critique plutôt positive à l’étranger...Le problème chez nous est que l’édition est trop localisée. Auparavant, il y avait les NEA (Nouvelles éditions africaines) qui permettaient de diffuser les œuvres dans plusieurs pays africains. Mais aujourd’hui il n’y a plus que des maisons d’éditions locales.

Mes livres sont vendus en France dans quelques librairies africaines. Il y a trois ans j’ai failli être édité par Gallimard, mais ça n’a pas marché car il n’y a pas eu d’entente entre eux et mon éditeur ivoirien. Gallimard voulait reprendre "Robert et les Caterpilla". Aujourd’hui j’ai signé avec une maison d’édition française qui s’appelle Jean Picollet et j’ai un manuscrit qui devrait y paraître en février 2009.


De votre point de vue, qu’est ce qui pourrait être fait au niveau de l’édition en Afrique pour donner plus de visibilité aux ouvrages des écrivains africains sur le continent ?

J’ai participé à plusieurs débats, forums sur cette question. La solution est qu’il faut qu’on se mette ensemble, et c’est le problème global de l’Afrique. Tant qu’on partira morcelés on n’arrivera à rien. Les maisons d’éditions ivoiriennes, congolaises, maliennes, ivoiriennes doivent s’unir, d’autant que nos marchés sont très réduits nationalement. Dans des pays où il y a parfois une forte proportion de la population qui est analphabète, quand on sort un livre, il n’est lu que par une petite élite du pays, alors que si les éditeurs travaillaient ensemble, un livre sortant en Côte d'Ivoire pourrait être distribué au Mali, au Cameroun...etc

Ça permettrait aux auteurs d’être mieux lus. Je séjourne en ce moment au Mali, qui est proche de mon pays, mais aucun de mes livres n’est lu ici. Je vais assez souvent au Burkina, quelques amis de là-bas connaissent mes livres, mais ça s’arrête là. Pourtant ces livres auraient bien pu se vendre là-bas. Le problème est que chacun reste sur ses marchés, et comme dans le cas d’Air Afrique (défunte compagnie aérienne panafricaine NDLR) quand chaque pays gère sa petite compagnie, Air Ivoire, Air Burkina, Air Gabon etc, ça ne peut pas marcher.

 
 

Entre l’Afrique d’aujourd’hui et celle que vous connaissiez lorsque vous avez démarré le journalisme il y a plus de vingt ans, voyez-vous une différence ?

Nous ne faisons que régresser. J’ai séjourné plusieurs fois au Libéria, à l’époque de la guerre. Mon premier livre "prisonniers de la haine" est inspiré de cette guerre. Mon dernier séjour là-bas remonte à 2006, après l’élection de Mme Johnson-Sirleaf qui se bat comme elle peut, mais le pays part de trop bas pour qu’elle puisse le relever à court terme. La Sierra-Leone est dans la même situation. Le Mali et le Bénin sont des exemples de pays où la démocratie fonctionne convenablement, mais il y a trop peu d’exemples de ce type.

Globalement, la situation du continent régresse. Avant les années 80 on n’avait pas autant de situations de guerre. En Mauritanie, ce n’est pas la guerre, mais avec les coups d’Etat qui se succèdent, on n’en est pas loin. Au Sénégal, la Casamance est toujours là comme une épine et quand on voit comment Mr Wade gère son pays, on ne sait comment ça peut se terminer. Le Mali a connu la rebéllion touarègue, la Sierra-Leone a connu une guerre épouvantable, en Guinée Bissau la situation est telle qu’il n’y a même pas d’électricité dans le pays. En Côte d’Ivoire, on sait où le pays en est. La Guinée Conakry a un président Lansana Conté totalement impotent qui ne veut pas quitter le pouvoir. Quand on voit les appétits qui sont autour, j’ai bien peur que la Guinée ne finisse dans une situation à l’ivoirienne [Lansana Conté n'était pas encore décédé au moment de l'interview NDLR]. Au Togo, on a vu comment Mr Faure Gnassingbé est arrivé au pouvoir. Là aussi je ne suis pas très optimiste.

La génération actuelle doit arrêter de discourir et se mettre au travail
Venance Konan





Le Nigeria est un pays "voyou". Dans le delta, il n’y a qu’affrontements, détournements de bateaux, le pays danse au bord du gouffre. Pareil pour le Cameroun qui se criminalise. Le Congo n’a pas fini sa guerre, ne parlons pas de la RDC. L’Angola sort de sa guerre. Au Soudan il y a le conflit au Darfour. Au Niger il ya aussi la rebellion touarègue. Le Tchad n’a pas arrêté d’être en guerre depuis soixante ans. L’Afrique du Sud, pourtant grand espoir du continent, risque avec ses histoires de bagarre au sein de l’ANC, avec la violence, de se retrouver dans une situation explosive. Au Zimbabwe, Mugabe s’accroche au pouvoir.

Voilà le tableau. Ça ne va pas. Dans les années 60 et 70, malgré ce qu'était Mobutu, le Zaïre était un pays qui suscitait l’espoir. Aujourd’hui c’est fini. La génération actuelle (intellectuels...etc) doit être réaliste, arrêter de discourir, et se mettre au travail, sinon nos pays sont foutus. Il ne faut rien attendre de l’extérieur car ce ne sont pas les pays occidentaux qui feront évoluer l’Afrique. C’est nous même qui devons nous asseoir, oublier l’esclavage et la colonisation qui ont joué un rôle dans la déstructuration de l’Afrique.

Restructurons l’Afrique pour qu’elle puisse avancer. Car c’est nous qui en payons le prix. Nous sommes méprisés en tant qu’Africains, à l’étranger les gens voient en nous le symbole de toutes les misères du monde, maladies, guerres etc...Ce n’est pas très joyeux et nous n’avons pas à être fiers de nous. Bien sûr il y a quelques individualités qui font du bien, mais elles sont trop peu nombreuses pour changer l’image du continent.

Vous pouvez lire la 1ère partie de l'interview de Venance Konan sur la situation actuelle en Côte d'Ivoire

       
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Mots-clés
afrique   côte d'ivoire   négrologie   stephen smith   venance konan   
 
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