Les sages africains l’ont bien compris, qui honorent ceux des leurs qui excellent en la matière. Les griots en ont vécu ; la confrérie des chefs traditionnels en pays Bassa du Cameroun fait de la connaissance de la généalogie et de l’histoire familiale une condition d’entrée dans leur cercle, qui est un gouvernement de la société traditionnelle. La France a aujourd’hui un président touche à tout dont les propos sur l’histoire font visiblement peu référence à l’histoire de l’’humanité’, au vécu des hommes et des femmes.

L’autre jour au Sénégal, il disait que l’homme africain n’était pas entré dans la modernité et se contentait de perpétuer le passé au lieu d’inventer l’avenir. La seule posture qui permet de dire cela est de regarder l’histoire des hommes comme on contemple une photographie. Sur une photo, tout est figé, tout est immobile : le temps ne passe pas ! A l’évidence, ceci ne correspond pas à la réalité. Ce que Nicolas Sarkozy ne perçoit pas (ou fait semblant de ne pas voir), c’est que la photographie fixe un instant. Et si les choses ont l’impression de se renouveler à l’identique en Afrique, une démarche rigoureuse voudrait qu’on émette plusieurs hypothèses pour l’expliquer. Le président français a une explication toute trouvée qui l’arrange, qui l’exonère. Une autre pourrait être le poids résiduel de la France sur les choix stratégiques dans son ex empire colonial.

L’homologue ivoirien de Nicolas Sarkozy, Laurent Gbagbo, se félicitait récemment sur les antennes d’une radio parisienne, du départ de Jacques Chirac de l’Elysée. C’est peut-être bien que des pesanteurs du passé colonial de la France s’accommodent mal de dirigeants qui veulent s’en affranchir. Et que de chemin parcouru sur le chemin de la paix en Côte d’Ivoire depuis la défaite de Jacques Chirac aux dernières élections présidentielles ! N’est-ce pas une coïncidence troublante que cette évolution de la situation en Côte d’Ivoire et le retrait de Jacques Chirac des affaires ?

Alors, à l’échelle d’une nation, le présent, autrement dit, le futur passé, le passé à venir, semble résulter de choix d’acteurs, de conjonctures, de pesanteurs diverses internes et externes. La responsabilité des dirigeants est de mettre en harmonie toutes ces variables en vue d’une progression régulière des citoyens vers un mieux être.

Après sa sortie sur l’homme africain au Sénégal, Nicolas Sarkozy vient d’aller reconnaitre sur les rives algériennes de la méditerranée, que la colonisation était une mauvaise chose. Il a bon dos de le dire, maintenant qu’il n’a plus besoin du vote des sympathisants Pieds Noirs de Jean Marie Le Pen installés dans le sud de la France. Les aspects positifs de la colonisation ? C’est de l’histoire ancienne et tant mieux ; c’est aussi du discours sur mesure en fonction des auditoires et des conjonctures politiques…

Alors, que comprendre quand Nicolas Sarkozy parle d’histoire, et plus généralement, que retenir quand les hommes politiques font référence à cette discipline ? Rien ! Restons en donc au regard sur le passé qui permet de structurer l’individu en l’inscrivant dans un groupe et le situant … dans l’histoire.