
Alors que la visite du guide libyen Mouammar Kadhafi déchaîne les passions en France, la secrétaire d'Etat aux droits de l'homme Rama Yade critique cette visite dans une interview accordée au journal "Le Parisien".
Ségolène Royal a parlé d'une visite "choquante", François Hollande a affirmé que recevoir Kadhafi revenait à "fermer les yeux devant la réalité du régime Kadhafi qui s'est compromis avec le terrorisme hier et le justifie aujourd'hui", tandis que François Bayrou a qualifié sa visite "d'indigne".
Interrogée dans le journal "Le Parisien" (lundi 10 décembre 2007), Rama Yade déclare que le choix de cette date (du 10 décembre, journée internationale des droits de l'homme) est un "symbole fort, et même scandaleusement fort".
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Ce qui me dérange, c’est que la visite de Mouammar Kadhafi coïncide avec la journée mondiale des droits de l'homme |
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Rama Yade |
La secrétaire d'Etat aux droits de l'homme se demande si on peut "accorder une confiance absolue à celui qui demande d'être traité comme n'importe quel chef d'Etat et qui avant même d'être arrivé sur le sol français affirme que le terrorisme est légitime pour les faibles ?" (Kadhafi a fait cette déclaration lors du sommet Union Européenne Afrique NDLR).
Pour Rama Yade, le guide libyen doit comprendre que la France n'est pas qu'un paillasson, sur lequel, un dirigeant terroriste ou non, peut venir s'essuyer les pieds du sang de ses forfaits. "La France ne doit pas accepter ce baiser de la mort" poursuit t-elle.
Rama Yade s'étonne aussi que la peine de mort ait été supprimée en Libye, mais qu'elle soit toujours appliqué aux sub-sahariens, "un comble de la part de quelqu'un qui affirme être le champion des Etats-Unis d'Afrique!"
Répondant à une question sur la demande de réparation pour la colonisation qu’a fait Kadhafi lors du sommet de Lisbonne, Rama Yade affirme que le guide libyen devrait aller au bout de sa logique et accorder aussi des réparations pour l’esclavage intra africain qui a aujourd’hui encore des conséquences sur les relations entre Etats Africains du Nord (Maghreb NDLR) et du sud du Sahara.
Pour Rama Yade, qui regrette de ne pas être allée en Chine, « la France n’est pas qu’une balance commerciale », et Nicolas Sarkozy ne doit ni cacher la sécrétaire d’Etat aux droits de l’homme, ni leur tourner le dos : « si on y met le couvercle, je risque le chômage technique » ironise t-elle. Enfin, la secrétaire d’Etat aux droits de l’homme déclare très bien comprendre que la France signe des contrats, mais cela doit selon elle se faire « avec décence ».
Par ailleurs, ni elle, ni Bernard Kouchner n’assisteront au dîner qui sera donné à l’Elysée ce lundi soir en l’honneur de Mouammar Kadhafi. Le ministre des affaires étrangères a par ailleurs apporté son soutien à Rama Yade, tandis que François Fillon, qui est en Argentine, a déclaré qu'il discuterait avec Rama Yade dès qu'il aurait vu ses déclarations.
Le premier ministre a critiqué les "donneurs de leçon qui devraient tourner sept fois leur langue dans la bouche avant de parler". Visait t-il Rama Yade ? Cette dernière a été reçue lundi matin à l'Elysée. Elle y est restée une demi-heure avant de repartir sans faire de déclarations.
Ci-dessous la couverture du journal "Le Parisien" et un extrait audio des propos de Rama Yade |