de la Société d'Histoire 94120 Saint-George & Dalayrac

Deux conférences suivront après le 10 mai 2006.

Lundi 15 mai - salle 101 – 18 à 21 h 30

Les empires européens en Asie

Conférencier : Daniel Hémery, Maître de conférences à l'Université de Paris 7 Denis-Diderot
Travaillant la question indochinoise Daniel Hémery évoque un syndrome indochinois pour décoloniser la France

Samedi 20 mai - salle 101 – 14 à 17 h 30

L'enrôlement des esclaves et des libres de couleur dans les milices coloniales au XVIIIème siècle ou l'affranchissement par le service militaire

Conférencier : Bernard Gainot, professeur, Paris I Sorbonne

Bernard Gainot a rédigé une notice pour le livre de Anne Pérotin-Dumon La ville aux îles, la ville dans l’île. Basse-Terre et Pointe-à-Pitre, Guadeloupe, 1650-1820. Paris : Éditions Karthala, 2000. 1044 pp. Appendices, bibliography, index, and illustrations. 56.53 Euros (pb). ISBN 2-86537-936-1. Review by Bernard Gainot, Institut d’histoire de la Révolution Française, for H-France, October 2002.

Il est co-auteur pour :
La Société des amis des noirs, 1788-1799. Contribution à l'histoire de l'abolition de l'esclavage, Bernard GAINOT et Marcel DORIGNY, Collection Mémoire des peuples, Paris, Éditions UNESCO/EDICEF, 1998, 429 p.

VENIR A LA MDCVA de FONTENAY/BOIS


Compte-rendu

Journée de réflexion et de débats sur les usages publics de l'histoire
Organisée par le Cvuh

La capacité à écrire un récit cohérent dans les tissages de l’histoire de la France

Publiée dans "La lettre, Histoire & Société des 3A", dimanche 5 mars 2006

Le 4 mars 2006 a eu lieu le colloque du Cvuh sur les usages publics de l’histoire. Il y avait foule. Dont beaucoup d’Afrodescendants. Ce qui est une bonne chose. Mais le lien avec les usagers n’est pas prêt d’être noué. Nous en sommes encore au stade où les historiens parlent aux historiens tandis que les institutionnels essaient de dépatouiller le sac de noeuds. Les différents groupes, tout comme les différents usages, cherchent à s’intégrer dans un mouvement convergent et lent.

Je voudrais souligner une fois de plus la nécessité d’être présents dans ces grandes messes scientifiques. C’est une répétition lancinante chez moi. Mes voeux se réalisent peu à peu. Si les acteurs sont quelque peu absents des lieux et des discours, les problèmatiques qui nous intéressent sont de plus en plus présentes. L’organisation de la journée de réflexion du Cvuh le montre : deux temps d’un poids égal, une articulation forte autour de l’histoire du XXème siècle français, présenté un peu comme le présent à partager, avec l’intégration des deux grandes histoires coloniales européennes à travers les communications de Madame Catherine Coquery-Vidrovitch (Le passé colonial, entre recherche scientifique et usages mémoriels) et Monsieur Marcel Dorigny (L’esclavage, une réalité du passé, un enjeu du présent). Les problématiques de la Shoah étaient présentes mais habilement décentrées.

Il n’y a pas encore de pluriel pour esclavage, colonisation, immigration : on voudrait voir ces histoires comme une seule réalité du passé, un seul enjeu du présent. C’est que, si certains sont à la fin “las de ce monde ancien” (Apollinaire), la communauté des historiens, que le Cvuh appelle de ses voeux, voudrait construire son unité autour d’un seul objet : la science historique. C’est, peut-être, aussi en réponse aux demandes des destinataires du discours historique qui se met en place. On préfère encore trop souvent que l’esclavage soit un fait africain plutôt que humain.

Ce qui est curieux, c’est que de l’exigence méthodologique, on passe à un enseignement thématique avec Monsieur Gérard Noiriel. Son intervention s’intitule : “Peut-on enseigner l’histoire de l’immigration ?" Plusieurs interventions sur l’enseignement de thématiques fortement périodisées obligent à s’interroger sur les finalités de l’enseignement de l’histoire. S’agit-il de former un esprit critique ou de déposer sur de jeunes épaules le fardeau des aînés par le truchement des enseignants ?

La dérive des sections du peuple

On peut désormais remarquer la forte empreinte de la migration en provenance d’Algérie. Celle-ci était déjà sensible autour de Madame Christiane Taubira lors de sa campagne présidentielle. Cette présence lourde est, selon moi, un héritage de la décolonisation de ce pays. Et du phénomène massif que fut le rapatriement des Français d’Algérie, suivi immédiatement de la migration algérienne.

Les migrations guadeloupéenne et martiniquaise, pour importantes qu’elles furent proportionnellement à la population des deux pays d’origine, ont été contemporaines de ces migrations en provenance d’Algérie. Mais, caractéristiques déterminantes : 1°) elle se sont étalées dans le temps 2°) les élites n’ont pas migré et/ou ne se sont pas sédentarisées sur le territoire européen comme dans les migrations consécutives à l’indépendance de l’Algérie. La migration à partir des DFA prend le modèle d’un exode rural à longue distance. Les ruraux étant absorbés dès leur arrivée dans l’hexagone dans des emplois tertiaires et de service : industrie automobile, transports, communications, santé. Le flux d’étudiants se tarit avec la construction de l’université Antilles-Guyane.

Incise : beaucoup semblent hésitants à nommer la Guadeloupe et la Martinique par leur nom et préfèrent les désigner du nom de l’archipel auquel ces îles appartiennent, les Antilles (mieux : les Caraïbes). Pour éviter le choc des idées indépendantistes peut-être ? Eviterait-on un choc similaire en disant “La Méditerranée” pour la Corse ?

Les migrations à partir de l’Afrique sub-saharienne sont plus récentes. Elles sont constituées de ruraux, d’urbains et de jeunes étudiants.

La migrations en provenance d’Asie est encore plus récente. Elle est peu présente lors de ce type de colloque. Sauf, si l’on peut dire, à travers les Martiniquais et Guadeloupéens, les rares-trop-rares réunionnais présents qui revendiquent l’apport de ce continent dans leur généalogie et leur culture. A noter une rencontre avec une coréenne à l’occasion de cette journée de réflexion.

Ainsi dissociées dans le temps et dans leurs structures, les populations françaises issues des migrations les plus contemporaines ne se rencontrent vraiment dans leurs productions intellectuelles que depuis les toutes dernières années. La loi du 23 février 2005 rend brusquement visible la dérive des “section(s) du peuple” (Constitution de 1958, art. 3) de France qui convergent à partir d’un point nodal : la colonisation/décolonisation et la chûte des empires européens des XIX et XXème siècles.

Il s’agit d’un choc sociétal et non d’un choc des civilisations. Il me semble que, du point de vue de l’historien, un choc des civilisations ne peut avoir lieu. Les civilisations sont des objets territorialisées et historisées quand bien même leur disparition, à l’époque moderne, résulte d’une fracture brutale comme ce fut le cas pour les civilisations amérindiennes, d’une infraction diffuse pour les civilisations africaines. Elles sont poreuses sur leurs marges spatio-temporelles ce qui permet à la fois placticité, échanges, continuités dans l’histoire humaine et nous donne la possibilité de penser l’universel dans le même temps que “l’exception française” pour réutiliser l’humour malicieux d’un Etatsuniens Afrodescendants.

Histoire & politique.

Quelles articulations ? Quelles circulations ? Quelles mises en scènes ?

Ce sont les jeunes étudiants africains en phase de sédentarisation qui posent aujourd’hui ouvertement la question de la présence de l’Empire historique français au centre de l’Hexagone et revendiquent avec force leur place à la table de la Nation. Ils entraînent dans ce mouvement une population protéiforme constituée principalement de Domiens, mais aussi de franco-français et d’Etatsuniens afrodescendants. Si l’on observe au-delà des apparences, c’est le groupe originaire de l’Afrique sub-saharienne qui impose véritablement son rythme au mouvement de cohésion sociétale en cours en France. La férocité des attaques contre Dieudonné pourrait provenir de cette vérité. Celui-ci assumant un rôle proprement christique en portant tous les péchés de l’histoire. On comprendrait alors beaucoup mieux les multiples facettes du personnage, la multiplicité des coups qu’on lui assène et l’effroi des intellectuels devant la nécessité de construire une analyse scientifique.

Comme dans un jeu de rôle, le personnage incarné par Dieudonné pourait seulement se placer sous le regard d’un alter-ego, dans un couple infernal (cela a été souligné, à la marge, par un intervenant). Autant dire une irruption du sacré dans notre société laïque. Nous parlons ici du sacré humain, c’est-à-dire créé par l’Humanité pour servir ses desseins propres. Et non du sacré divin qui est tellement hors de porté des créatures terrestres que beaucoup de résidents de cette contrée prèfèrent utiliser la raison raisonnante pour intervenir sur leurs conditions d’existence. Quel serait alors ce couple narcissique et ses fins ? Pendant combien de temps restera-t-il hors du champs de l’analyse scientique ? Le personnage Dieudonné ne se prend actuellement ni dans la nasse du politologue (Gérard Noiriel) ni dans celle du pannel d’historiens que nous avons entendu. Et encore moins dans celle de l’anthropologue (Michel Giraud). Les intervenants s’étaient accordés sur ce point. L’esprit critique est fondé à intérroger le pourquoi de ce consensus. Voire à exiger que l’on nous présente des preuves du processus consensuel : c’est-à-dire des archives à partir desquelles la critique peut s’élaborer. Un participant m’a parlé en privé d’une grille de lecture intéressante et qui pourrait nous aider dans ce travail intellectuel et social prométhéen. Peut-être voudra-til en faire profiter l’UnivCsgd94120 de 2006 ?

Des 3A à Csgd : le forum hybride

C’est Monsieur Nicolas Offenstadt (La Grande Guerre aujourd’hui) qui a fait la proposition la plus intéressante de la journée : échanger à partir des archives dans un forum hybride. Le Cvuh nous annonce déjà d’autres journées de réflexion. L’Académie de Créteil organise un colloque sur l’immigration qui s’inscrit dans cette démarche impliquant savants et profanes nous annonce Gérard Noiriel.

Pour les lecteurs de H&S3A, cette proposition n’a, il est vrai, aucune originalité sinon celle d’être le modèle de l’UnivCsgd94120 qui se déroulera du 13 au 14 juillet 2006 à la Maison du Citoyen et de la vie Associative de Fontenay-sous-Bois, dans le Val de Marne. Durant 10 jours pleins, dans une salle réservée à cet effet, des groupes de 15 à 20 personnes réfléchiront ensemble sur les archives et leur place centrale dans la science historique. Ces groupes seront composés de savants, d’amateurs et de profanes.

de la Société d'Histoire 94120 Saint-George & Dalayrac. Choisir un niveau d'investissement

Nous sommes allés chercher ce modèle chez nos personnages historiques tutellaires : Joseph Bologne dit Chevalier de Saint-George et Nicolas Dalayrac. Ils symbolisent la créativité de la démarche pluridisciplinaire alliant l’exercice du corps et celle de l’esprit et la fraternité humaine. Quand il s’agira d’examiner les problèmatiques sous l’angle du genre nous n’aurons que l’embarras des modèles tant les femmes ont été actives à l’époque des deux musiciens et dans la vie et l’oeuvre de Saint-George.

Mais ce modèle de forum hybride a été pratiqué par ceux qui portent le projet d’université d’été Saint-George & Dalayrac dans l’aventure du programme radiophonique H&S3A, de 1997 à 2001. Nous n’avons pas inventé l’eau chaude. Ni l’eau tiède, ajoute généralement Monsieur Marcel Dorigny, -conseiller scientifique, à titre individuel, pour H&S3A durant la période, coordonnateur d’un module dans le cadre de l’UnivCsgd94120-. Monsieur Marcel Dorigny est président de l’Association pour l’Etude de la Colonisation Européenne fondée par Yves Bénot.

Les Sociétés d’histoire où se mèlent les usages publics de l’histoire existent depuis longtemps. Notre originalité est de vouloir collaborer avec le tissu associatif existant pour écrire une histoire humaine commune.  Notre travail ne demande qu’à être reconnu et soutenu. Votre soutien le plus efficace consisterait à vous joindre à nous en devenant sociétaire et/ou membre et à participer à l’Université d’été Saint-George & Dalayrac en tant qu’intervenant, lors des colloques live à Fontenay-sous-Bois ou sur internet pour les colloques virtuels. En présentant une communication ou relevant le défi des concours. Consulter le site

Ce sera démontrer une capacité à maîtriser toute la chaîne de production de cette entreprise intellectuelle, de son financement à sa réalisation.

Ce que l’histoire retiendra tout comme elle a retenu l’histoire de Joseph Bologne dit Chevalier de Saint-George et de son contemporain Niolas Dalayrac. Site