
Une des trois chaînes de télévision privées du Cameroun, Equinoxe TV, a été suspendue jeudi 21 février par le ministère camerounais de la communication. Officiellement, il est reproché à la chaîne de ne pas avoir payé des frais d'émission d'un montant de 100 millions de FCFA (155 000 euros).
Officieusement, c'est la diffusion cette semaine d'un débat sur la révision de la constitution, au cours duquel le président camerounais Paul Biya aurait été sévèrement critiqué, qui a provoqué la fureur des autorités camerounaises. Jeudi, une manifestation a failli éclater à Douala, avant que Severin Tchounkeu, promoteur de la chaîne, et également directeur de publication du journal "La Nouvelle Expression", n'appelle les esprits passablement échauffés au calme.
On se souvient que Paul Biya avait déclaré fin décembre qu'il était favorable à une révision de la constitution. Cela dans le but non dissimulé de lui permettre de briguer un nouveau mandat de président de la république en 2011 (il est président depuis 1982, et avait précédemment occupé sans discontinuer le poste de premier ministre à partir de juin 1975 NDLR).
Reporters Sans Frontières a émis un communiqué vendredi, condamnant la décision des autorités camerounaises, et faisant remarquer qu'aucune des trois chaînes de télévision privées au Cameroun ne remplissait jusqu'ici l'ensemble des conditions requises par le gouvernement camerounais, ce qui ne les avait pas empêché d'émettre jusqu'à présent.
Le 31 janvier 2008, une chanson intitulée "50 ans de pouvoir", du chanteur camerounais Longué Longué avait été interdite d'antenne sur la CRTV (Cameroon Radio Television), la chaîne de télévision publique nationale. Dans cette chanson, Longué Longué disait notamment que "La modification de la Constitution est une maladie des chefs d’Etat africains", que le "Cameroun n'est pas le Togo ou le Tchad", "essayez et vous verrez". La diffusion de cette chanson dans une émission de la CRTV avait provoqué la panique au sein de la direction, certains y voyant une critique à peine voilée adressée au président Biya.
Le débat sur la modification de la constitution est le sujet phare de la scène politique et médiatique camerounaise, et continuera de l'être au cours des prochaines semaines et des prochains mois. La surveillance des médias nationaux est donc un enjeu d'une importance capitale pour les autorités de Yaoundé. |