
Au lendemain du bombardement d'un cantonnement qui a coûté la vie à neuf militaires français de l'opération Licorne, les Nations unies et la France ont exhorté le président ivoirien à mettre fin aux violences.
Sur ordre du président français Jacques Chirac, la force Licorne a riposté en détruisant deux avions ainsi que cinq hélicoptères, soit la quasi-totalité de l'aviation ivoirienne.
Paris a également menacé de demander un embargo sur les armes et d'autres sanctions contre la Côte d'Ivoire devant le Conseil de sécurité des Nations unies qui, réuni d'urgence samedi soir, a confirmé que les forces françaises et l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire (Onuci) étaient autorisées "à faire usage de tous les moyens nécessaires à la pleine exécution de leur mandat".
Dans la nuit de samedi à dimanche, les troupes françaises ont fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser des partisans de Gbagbo massés devant une base militaire française à Abidjan, la plus grande ville du pays. Dimanche matin, les manifestants étaient de plus en plus nombreux, selon l'Onuci.
Des groupes de jeunes ivoiriens ont également pillé des magasins dans la capitale Yamoussoukro. Des soldats ont tiré en l'air pour les disperser.
Dans une banlieue d'Abidjan, des émeutiers ont arraché les pneus de plusieurs voitures pour dresser des barricades derrière lesquelles se sont massées des foules de personnes armées de bâtons, ont rapporté des témoins.
Des responsables ivoiriens ont déclaré que la France poussait au départ le président, élu il a quatre ans.
"La France fait pression (sur Gbagbo) mais c'est hors de question", a déclaré Mamadou Koulibaly, président de l'Assemblée nationale.
"Nous allons vers une grande guerre civile, un soulèvement tel que nous n'avons probablement jamais vu auparavant en Afrique. Je ne vois pas comment Chirac triompherait", a-t-il encore dit à Reuters.
L'armée française a "occasionné plus d'une trentaine de morts (...) avec plus d'une centaine de blessés", a-t-il ajouté. Le ministère français de la Défense a formellement démenti ce bilan dimanche.
"Il n'y a pas eu d'attaque sur des sujets ivoiriens. Nous n'avons pas d'indication sur des affrontements ou des blessés et encore moins des morts", a déclaré à Reuters Jean-François Bureau, porte-parole du ministère.
Les forces ivoiriennes ont rompu une trêve conclue il y a 18 mois avec les rebelles qui contrôlent le nord du pays en menant pendant trois jours des raids aériens et en envoyant des soldats dans la zone tampon séparant les deux camps.
Le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a téléphoné à deux reprises à Gbagbo samedi pour l'exhorter à mettre fin aux violences.
Javier Solana, le chef de la diplomatie européenne, a de son côté "condamné l'action des forces armées ivoiriennes".
Dans la nuit de samedi à dimanche, un hélicoptère militaire français a tiré des coups de semonce à proximité de manifestants traversant des ponts dans le centre ville d'Abidjan et des soldats ivoiriens, en position de l'autre côté de la lagune, ont tenté d'abattre cet hélicoptère, ont rapporté des témoins.
A Bouaké, des responsables de la rébellion ont rapporté que des soldats ivoiriens s'étaient approchés samedi de la ville mais qu'ils avaient battu en retraite après des heurts.
Des travailleurs humanitaires basés dans cette ville située à 340 km au nord d'Abidjan ont fait état de tirs violents samedi après-midi.
Les Nations unies ont rapporté que, samedi soir, Bouaké était toujours aux mains des rebelles.
L'ambassadeur de France aux Nations unies, Jean-Marc de la Sablière, a indiqué que la France avait maintenant l'intention de demander au Conseil de sécurité d'adopter une résolution imposant un embargo sur les livraisons d'armes à la Côte d'Ivoire.
Le texte pourrait aussi menacer de bloquer les avoirs et d'imposer des restrictions aux voyages de certains dirigeants ivoiriens, dit-on de source diplomatique
Reuters |