Le 10 mai "la France métropolitaine honore le souvenir des esclaves et commémore l'abolition de l'esclavage"
Par Csgd, mardi 31 janvier 2006 à 10:52 :: Général :: #771 :: rss
Il y a donc deux volets du 10 mai :
- La France honore le souvenir des esclaves
- La France commémore l'abolition de l'esclavage
Il va de soi que nous considérons toutes les abolitions de l'esclavage dans le passé et l'application de ces abolitions pour le présent et le futur.
Car, ce qui m'intéresse c'est que l'esclavage ne puisse plus être pratiqué. Pour cela, il faut des moyens humains, matériels et financiers. Et des principes bien étayés. Ce que permet le travail des historiens. Faudrait-il encore qu'ils puissent travailler sans pressions ni politiques, ni lobbyistes, ni associatives. L'histoire n'est pas un château qu'on restaure.
Le passé est un donné. Nul ne peux rien contre ce qui a eu lieu dans le passé, sauf, en tant qu'historiens, étudier le processus et en rendre compte d'une manière la plus proche que possible du véridique. Pour cela, il faut des moyens humains, matériels et financiers.
Palais de l'Elysée, Paris, le lundi 30 janvier 2006.
Le Président de la République a reçu le lundi 30 janvier 2006 en fin de matinée les membres du Comité pour la mémoire de l'esclavage présidé par Mme Maryse Condé. A l'issue de cette rencontre, le chef de l'Etat a prononcé une allocution indiquant notamment avoir retenu la date du 10 mai pour la journée annuelle de la mémoire de l'esclavage[1].
Je voudrais d'abord saluer aussi les élèves du Lycée Lenoir de Châteaubriant, du Lycée du Mirail à Bordeaux et du collège Raymond Poincaré à La Courneuve, ainsi que leurs enseignants, qui ont ensemble travaillé beaucoup et intelligemment sur le sujet de l'esclavage. Je suis particulièrement heureux de les accueillir ici, aujourd'hui.
Dans l'histoire de l'humanité, l'esclavage est une blessure.[2]
Cependant, des savoirs mis au rebut
Dans l'histoire des Afrodescendants licenciés par l'Education Nationale, ce licenciement est une blessure. Cette blessure est ravivée quand le chef de l'Etat félicite d'autres pour un travail que ces Afrodescendants ont réalisé alors qu'ils étaient en poste et qu'ils sont toujours en mesure de réaliser si l'institution et les pouvoirs politiques les réintègrent dans leurs droits sociaux et humains.
En ce jour du 10 mai 2006 que les historiens inclueront dans leurs analyses de l'histoire de l'esclavage, j'aurai une pensée pour les collègues licenciés et qui sont décédés de "mort subite", d'une "sorte de crise cardiaque" mais de "mort naturelle".
Ils ont laissé une famille, des enfants.
Je pose la question au chef de l'Etat : quelle mémoire ces enfants garderont-il de celui (car il s'agit chaque fois d'un homme) qui aurait dû leur apporter protection et les aider à construire une mémoire humaine ?
Je pose aussi la question aux partis politiques, au mouvement syndical, au mouvement associatif, aux lobbyistes. Très prompts à se mobiliser pour le passé sur des bases ethniques et à médiatiser leurs actions, usurpant du même coup le travail des historiens, ils restent silencieux sur cette usurpation du passé, du présent et du futur des licenciés de l'Education Nationale et de leur famille.
Or, le travail de l'enseignant, qu'il soit Afrodescendant ou pas est de former des Humains et, ce faisant, de construire un avenir humain tendu vers l'universel. Pas de transmettre une culture ethnique. Pas de développer un modèle racialiste. Pas même pour résoudre des problèmes sociaux cruciaux.
L'Afrique entre à petits pas dans l'Humanité
Après la tradition, l'Afrique devient réservoir pour le patrimoine de l'humanité. J'ai été surprise de trouver sur Nouvelobs.com, dans un articile intitulé "Les réactions (au choix du 10 mai)" l'association entre le CRAN et la Ligue des droits de l'homme :
C'est une victoire pour toutes celles et tous ceux qui depuis de nombreuses années ont, dans les DOM, en France métropolitaine et dans le monde, lutté pour que soit reconnue et célébrée cette histoire. Ce n'est pas seulement l'histoire de la déportation et de la souffrance mais aussi celle d'une « présence africaine » qui a profondément bouleversé le monde. Ce que les esclaves ont transmis appartient au patrimoine de l'humanité : l'amour de la liberté et des cultures, des langues, des philosophies de la vie. Que serait le Brésil sans cet héritage ? Que seraient les Caraïbes sans cet héritage ? Que serait la France sans cet héritage ? Nous voulons célébrer cet héritage, rendre visible les expressions culturelles et artistiques qui contribuent à la richesse d'une diversité qui appartient à tous.[3]
La mémoire de l'esclavage est faite présence africaine au monde.
Cet extrait souligne bien le fond de la question. Le propos n'est nullement de discourir de l'esclavage en tant que réalité de l'existence humaine, modèle d'organisation sociale, économique et politique ; de maîtrise de l'énergie travail ; choix opéré dans l'histoire par les civilisations grecques, romaines, arabo-musulmanes, européo-chrétiennes, occidentales. Le propos est de charger un continent, l'Afrique, du crime contre l'Humanité. D'imposer à sa population cette mémoire, cet héritage dans son patrimoine (le qualificatif génétique vient comme naturellement, même s'il n'est pas précisé). Enfin, ayant fait de cette contribution particulière le caractère distinctif de l'altérité africaine, seulement à ce prix, admettre que "ce que les esclaves ont transmis appartient au patrimoine de l'humanité" reconnaître "cette présence africaine au monde".
Ce sont la Ligue des droits de l'homme et le CRAN, main dans la main, qui nous font ce cadeau empoisonné dans un communiqué commun, le 30 janvier 2006. Ce serait à désespérer si les déclarations de Christiane Taubira et de Maryse Condé ne précisaient pas le travail intellectuel, conceptuel à faire.
Maryse Condé : Le travail est à peine commencé, il démarre. Il faut d'abord se pencher sur les livres, les programmes scolaires où la part relative à l'esclavage est totalement minorée.
Christiane Taubira : C'est une date symbolique "mais il n'existe pas de date consensuelle. Il nous faut maintenant travailler pour faire du 10 mai 2006 le départ d'un événement essentiel qui va s'inscrire dans la durée, dans la conscience française, dans la mémoire française et dans des pratiques scolaires, universitaires, culturelles de la société française"[4]
L'UnivCsgd94120 pour mutualiser les savoirs historiques, sociétaux
La Société d'Histoire 94120 Saint-George & Dalayrac prendra toute sa part dans ce travail. Tous nos efforts tendent vers la réalisation de l'université d'été Saint-George & Dalayrac du 13 au 30 juillet 2006 et nous sommes ouverts à toutes les propositions pour atteindre la meilleure qualité possible.
Le blog Commémoration et Souvenir est le lieu de préparation de cette UnivCsgd94120. Les concours permettent des contributions individuelles voire collectives pour que les meilleures compétences s'expriment. Lire.
Consulter les statuts de la Société d'Histoire 94120 Saint-George & Dalayrac et les informations générales sur l'UnivCsgd94120
Notes
[1] Rencontre de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, avec les membres du Comité pour la mémoire de l'esclavage, 30 janvier 2006.
[2] Rencontre de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, avec les membres du Comité pour la mémoire de l'esclavage, 30 janvier 2006.
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