L’Etat Nation est la forme politique planétaire des sociétés humaines. On peut écrire cela de manière mathématique, le plus froidement possible : Territoire + Population + Gouvernement = Etat-Nation.

La maîtrise du territoire et de la population sont des attributions politiques de l’Etat. La démographie est le premier outil de protection de l’équilibre de la population. C’est elle qui alerte un gouvernement à propos de la pression démographique sur une économie mais aussi sur les valeurs et la culture nationales afin que celles-ci opèrent de nouveaux choix en discriminant des mœurs. En France, le solde migratoire positif a été longtemps favorable à l’économie puis à la jeunesse de la population française. Depuis quelques années, on lui trouve des vertus négatives et l’objectif avoué est un solde migratoire égal à zéro.

La France a joué plusieurs fois dans son histoire, sur les variables démographiques à travers le droit du sol conjugué au droit du sang et pour répondre à ses besoins économiques, géopolitiques. Mais les grands théoriciens de la Nation et de l’Etat , et le peuple par ses référendum, ont fait prévaloir le droit du sol sur le droit du sang.

C’est par le droit du sol que les populations de l’Empire Français ont accédé à la nationalité française et donc à l’égalité politique telle que définit à l’article 1er de la Constitution de 1958. La France témoignait ainsi de l’héritage des Lumières et de l’universalisme du genre humain. La mémoire de cet héritage est inscrite dans le paragraphe suivant du préambule de notre constitution « En vertu de ces principes et de celui de la libre détermination des peuples, la République offre aux territoires d'Outre-Mer qui manifestent la volonté d'y adhérer des institutions nouvelles fondées sur l'idéal commun de liberté, d'égalité et de fraternité et conçues en vue de leur évolution démocratique ». C’est la base du pacte entre la France et ses Dom-Tom.

Je voudrais attirer l’attention sur deux moyens qui aboutissent à l’abolition du droit du sol : la proposition de Monsieur Baroin à expérimenter dans les DOM et à Mayotte et la création du CRAN (Conseil Représentatif des Associations Noires).

En premier lieu analysons la réponse de Monsieur François Baroin à une question du Figaro Magazine du 17 septembre 2005. D’après François Barouin, l'immigration est le problème le plus urgent à régler en Outremer. A terme, nous dit-il, c'est tout l'équilibre démographique qui s'en trouvera modifié. Ramené à l’échelle de la France, ce sont 15 millions de clandestins complètement exploités qui provoqueraient de possibles tensions sociales et un fort déséquilibre économique. Les solutions à ce fléau : des contrôles d'identité renforcés et une remise en question du droit du sol qui ne provoqueraient pas les mêmes réticences outre-mer qu'en métropole.

«Les propositions que vous faites pour l'outre-mer seraient-elles applicables en métropole ?» demandent alors anxieusement le Figaro Magazine. La Réponse de François Baroin est sans hésitation. Il présente ses solutions comme l’expérimentation d’une innovation mise en œuvre par des experts . En tant que tel, il a lui même analysé la situation et constaté que l’Outremer est « l’avant-garde de la modernisation de notre société » française dans le domaine coercitif comme dans celui des libertés publiques. Et de flatter l’égo de ces citoyens si compétents en leur proposant une nouvelle contribution à la construction nationale qu’il n’est même pas question de refuser puisque leur attachement à la nationalité française est égale à celle du ministre. Cela permettra « de faire bouger les lignes, de sortir des tabous. Le droit du sol ne doit plus en être un »

En proposant le primat du droit du sang sur le droit du sol, Monsieur François Baroin propose une rupture sans précédent avec les principes de la République Française. Devons-nous accepter une régression de notre droit politique pour satisfaire la maîtrise de flux migratoires ?

Mais pourquoi s’en priver si des individus, sur la base d’un critère biologique, organisent une section du peuple et fondent une association intitulée « CRAN », Conseil Représentatif des Associations Noires, sans même se soucier de faire adopter des statuts ? Faut-il s’étonner que Monsieur Baroin trouve une probable utilité à cette association ? N’est-elle pas remarquable d’abord par son caractère anti-démocratique, sa négation des valeurs républicaines ?

Non seulement le CRAN utilise le primat du droit du sang mais encore précise-t-il une propriété génétique importante du sang : comporter le taux de mélanine nécessaire pour mettre en valeur la couleur noire de la peau qui détermine l’objet de l’association. Ainsi, le CRAN va plus loin que le droit du sang. Se suffira-t-elle d’une perception culturelle de la couleur de la peau ? Faudra-t-il dans le célèbre poème remplacer les philosophies par la listes des races du XIXème siècle ? Qui sera celui qui n’appartient à aucune catégorie ? Au XVIIIème siècle c’était le métis, l’Homme de couleur.

Dans une société et un monde planétaire si enclins à pratiquer la discrimination raciale, à l’heure où l’Assemblée Nationale réaffirme "le rôle positif de la présence française Outre-mer et notamment en Afrique du Nord" et exige qu’on l’enseigne dans les écoles, quelle éthique peut empêcher l’utilisation des puissants moyens de la science génétique pour discriminer les populations ?

Revanche de la nature sur la raison, le biologique aurait ainsi une valeur supérieure à celle de la pensée, l’ethnie remplacerait la nation. L’histoire, ayant pour moteur l’universel, qui affirme l’universalité du genre, l’individualité de la couleur de la peau, qui a pour objectif la citoyenneté terrienne aurait ainsi trouvé sa fin.

Du futur avons-nous fait table rase ?

Cependant, quelques voix s’élèvent dan le silence sidéral.