Par Jackeline Stewart

Traduit de l’Anglais par Guy everard Mbarga

“Sens-tu que l’Amérique Latine est à toi ? Le revendiques-tu?” me demanda mon amie Africaine Américaine.

Sa question me mit mal à l’aise de suite. Je prenais du temps pour répondre, non pas pour essayer de trouver les bons mots, mais parce que je n’avais plus pensé à ma relation avec l’Amérique Latine depuis très longtemps. Je me sentais confortable du fait d’être une Panaméenne lorsque l’on ne me posait pas de question à ce sujet.

Depuis un certain temps, chaque fois que quelqu’un m’avait demandé d’où je venais, j’avais bombé mon torse, relevé mon menton et proclamé fièrement “du Bronx,” comme s’il s’agissait là de la déclaration d’identité la plus importante que j’aurais faite à jamais. De la même façon, lorsqu’on me demandait, “Et qu’est ce que tu es?” je répondais “Noire.”

En tant que femme afrodescendante, née à Colón, Panama, et ayant grandi à New York dès l’âge de 3 ans, je n’aurais pu le dire autrement.

Une amie Africaine Américaine qui est récemment revenue de la République Dominicaine où elle étudiait allait me ramener cela à l’esprit lors d’une conversation. Elle avait passé un agréable séjour et détenait des photos pour le prouver. Elle disait qu’elle avait rencontré des gens formidables et beaucoup appris. Mais elle avait également évoqué le racisme dont elle avait fait l’expérience et de la manière dont l’histoire Africaine en Amérique Latine est non seulement ignorée, mais également niée.

La question de mon amie au Guapo m’a rappelé la fois où je m’étais rendu dans un club à Porto Rico pendant les vacances de printemps et que j’avais dû attendre un bon moment avant que le barman ne prenne et ne serve ma commande. Entre temps, il se pressait de servir des appletinis aux femmes Latinos de peau claire.

Cela m’a également rappelé une annonce dans un journal Panaméen dans laquelle on recherchait un réceptionniste. Il était indiqué qu’une préférence serait accordée aux femmes aux cheveux clairs et aux yeux bleus.

Sa question me fit également penser au jour où j’étais assise dans le salon de ma coiffeuse Dominicaine pendant que celle-ci essayait de me convaincre que je ne devais pas me considéréer comme “Noire” car j’étais “différente” des Noirs ordinaires.

Chez moi, après 18h30, la télévision du foyer est calée sur Univision. Ma famille et moi regardons les informations et on reste branché pour suivre les novelas tellement addictives. Bien que je les aime du point de vue du drame, j’ai toujours remarqué que tous les rôles sont joués par des Latinos blancs. Aucun reporter noir ne présente les informations qui passent juste avant. Lorsque ma mère et moi regardons “Sábado Gigante,” nous jouons notre propre jeu qui consiste à compter - quand il y en a- les invités Noirs de Don Francisco.

Par conséquent, je ne sens pas que l’Amérique Latine m’appartient. Je pense que l’Amérique Latine a rendu les Noirs Latinos orphelins—elle nous a laissé dehors dans le froid, pour nous faire adopter par une autre identité, supposément plus adéquate. C’est comme si on avait été effacé et arraché de la structure de l’Amérique Latine.

Jackeline Stewart est née en République du Panama et a grandi dans le Bronx, New York. Écrivaine freelance base à Washington, D.C., on peut la joindre à l’adresse mail jackeline.stewart@gmail.com.

http://vidaafrolatina.com/Black_Orphans___Latin_Am.html