lundi 11 janvier 2010
____"dieu" n' n'existe pas, c'est une pure invention pour combler l'ignorance.... Tout ce qui appartenait à l'ancien monde n'existera plus.Rien n'existera plus que ma tombe
lundi 11 janvier 2010 à 20:14 :: __«Appareil psychique», 'psychoz' magistya - DEMONS AND ANGELS
- lutte contre la servitude mentale,
- lutte contre la servitude bureaucratique,
- lutte contre la servitude économique,
1. Sur l’indépendance et l’autonomie
Le concept d’« indépendance » appelle certainement la critique. Il est en effet aisé de démontrer que l’indépendance en soi n’existe pas, sinon peut-être à l’état d’illusion nécessaire, comme le Dieu de la métaphysique. En réalité, aucun homme n’est indépendant, et cela dès sa naissance : pour vivre puis pour nous exprimer, nous sommes toujours dépendants de ce qui préexiste à notre volonté et ne résulte donc pas de notre choix - qu’il s’agisse de nos parents, de notre langue, de nos gènes, de notre milieu social et culturel, etc. Même lorsque nous pensons et agissons contre cet état de fait, notre négativité est encore déterminée par lui.
Faut-il déduire de l’inanité de notre indépendance l’inéluctabilité de notre servitude ? Non. Il faut ici penser en termes de processus plutôt que d’états, et d’autonomie plutôt que d’indépendance. Processus : l’homme est un être déterminé à l’action (y compris l’action de sa pensée critique), soit à la modification et à la compréhension du monde qui l’entoure. Autonomie : l’homme est un être doté de conscience, et le mouvement spontané de cette conscience consiste à saisir librement le monde, donc à opposer sa liberté aux formes naturelles ou artificielles de la nécessité. Dans ce jeu sans fin (car le monde modifié rétroagit sur nous comme la nécessité abolie en dévoile une autre), l’homme ne parvient jamais à l’état d’indépendance : il se place en revanche, à force de volonté, dans des situations d’autonomie relative par rapport à ce qui détermine ses actes et ses pensées.
Dans le débat qui nous occupe, l’argument selon lequel il faudrait être totalement indépendant du marché pour commencer à la critiquer ne tient pas : à l’aune de cette exigence insensée de « pureté », il serait à peu près impossible de critiquer quoi que ce soit. On ne pourrait être défenseur de la biodiversité si l’on a déjà utilisé une voiture dans sa vie, adversaire du capitalisme si celui-ci nous a nourri, hostile à la publicité s’il nous arrive de regarder une chaîne privée de télévision, etc. La contrepartie logique de cette attitude est qu’il faudrait tout accepter en bloc (ou se suicider).
2. Sur le web libre
Pour les raisons énoncées précédemment, nous préférerions parler de « web libre » plutôt que de « web indépendant ». Au-delà de la querelle des mots, pourquoi le web en question est-il libre, ou plutôt : de quoi veut-il se libérer ? De tout ce qui entend aujourd’hui aliéner la liberté de ses participants. Soit trois fronts principaux de lutte, que reflètent d’ailleurs la plupart des contributions rassemblées sur Uzine2 :
- lutte contre la servitude économique, c’est-à-dire contre les diverses stratégies marchandes visant à transformer l’Internet en gigantesque supermarché progressivement purgé de sa gratuité et vidé de sa substance critique ;
- lutte contre la servitude bureaucratique, c’est-à-dire contre la mise en place à l’échelle nationale, européenne ou mondiale de procédures de surveillance, de contrôle et d’interception des échanges entre les internautes ;
- lutte contre la servitude mentale, c’est-à-dire contre la prétention de certains groupes de pression à limiter la liberté d’expression et d’opinion au prétexte qu’il existe de mauvais usage de celle-ci (nazis, pédophiles et autres épouvantails) et contre le monopole de l’information que prétendent s’arroger les médias centraux.
Ce programme minimum (on n’ose plus dire « programme commun » depuis longtemps !) définit l’originalité du « web libre » : il ne s’agit pas seulement de l’ensemble des sites qui ont quelque chose à dire, il ne s’agit pas du tout des sites estimant détenir une quelconque « vérité révélée » sur l’Internet, mais, plus simplement, de l’ensemble des sites qui luttent pour que chacun puisse s’exprimer ou consulter ce que les autres ont exprimé. Que ces sites se constituent en réseau - comme le portail des copains - n’a rien que de très logique, compte tenu de la nature réticulaire de l’Internet et de l’inégalité des forces en présence.
3. Sur l’élite
L’autonomie revendiquée par le « web libre » n’a rien de reposant : elle est avant tout le fruit d’une lutte permanente contre les facteurs d’hétéronomie externes. Et internes, devrions-nous ajouter : depuis Hobbes et Hegel, ou en contemplant plus simplement le monde qui nous entoure, chacun sait en effet que l’individu a souvent un penchant pour la douceur de la servitude plutôt que pour le risque de la liberté. Raison pour laquelle Rousseau pensait que la démocratie parfaite est le régime des dieux, non celui des hommes : on pourrait en dire autant de l’« Internet parfait ». Cela n’empêche pas de parfaire l’Internet (comme la démocratie).
Nous en arrivons ici à la critique de l’« élite », formulée selon deux angles : (a) le « web indépendant » est une récrimination de riches (en capital technologique, économique, culturel ou symbolique) à l’heure où seule une minorité privilégiée est connectée et où seul le marché semble capable d’étendre cette connexion à la planète entière ; (b) le « web indépendant » est le fait d’une minorité qui parle d’autant mieux au nom des autres qu’elle n’a aucun moyen d’établir sa légitimité ni sa représentativité.
Dans un autre texte publié ici, Lirresponsable a fait jeu de la première critique : attendre que la planète entière soit connectée pour commencer à défendre la liberté des internautes revient, toute proportion gardée, à attendre que le nazisme ait liquidé le dernier Juif pour lutter contre son entreprise mortifère, que les multinationales aient privatisées la dernière parcelle de terre pour dénoncer leur course au profit ou que le cancer ait contaminé la dernière cellule de l’organisme pour commencer une thérapie. En d’autres termes, la défense de la liberté et l’autonomie des internautes est un principe valable quelles que soient la qualité et la quantité des personnes connectées. Par ailleurs, l’Internet n’échappe pas à la loi d’airain de toutes les autres activités humaines selon laquelle seule une minorité se révèle généralement capable de produire des œuvres qui plaisent à la majorité ; au moins l’Internet offre-t-il à ladite majorité la capacité de s’exprimer et d’être entendue, sans passer par les réseaux « officiels » (universitaires, médiatiques, éditoriaux) de représentation.
La seconde critique n’est pas plus recevable. L’Internet n’est pas assimilable à un Parlement mondial et le « web indépendant » ne prétend nullement représenter une quelconque majorité silencieuse ou une faction d’internautes en concurrence avec d’autres. En revanche, le « web indépendant » se caractérise par la généralité des questions qu’il pose : même pour celui qui fabrique sa page perso afin d’y exhiber les photos de son jardin, il est important de savoir s’il bénéficiera d’un système de référencement indépendant des pressions économiques, s’il pourra construire son chef d’œuvre horticole avec un logiciel libre, si son ami chinois aura la liberté de venir le consulter ou encore s’il échangera des avis sur les vertus désherbantes du chlorate de soude sans avoir la section anti-terrorisme urbain sur le dos.
Ce n’est donc pas de la légitimité des personnes qui font le « web indépendant » qu’il faut débattre, mais de la légitimité des principes qu’ils défendent.