vendredi 22 janvier 2010
_____L'AUTODETERMINATION DES PEUPLES COMME PRINCIPE JURIDIQUE.. RÉSUMÉ : Le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes a acquis depuis son inscription
vendredi 22 janvier 2010 à 23:06 :: __Code 3.6 The-dark-world.. "The world sinks" Ghost Recon Future Soldier - king of Dahomey. Meurtre, Mort, Détruire. Terra Nullius, Exosquelette, armure du guerrier du futur
RÉSUMÉ : Le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes a acquis depuis son inscription
dans la Charte des Nations Unies, qui en a fait un principe fondamental du droit international, une dimension juridique qu'il faut se garder de minimiser en invoquant sa nonapplication, l'interprétation restrictive que certains publicistes lui donnent ou l'absence d'une procédure spéciale assurant sa mise en oeuvre. Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, comme les droits de l'homme, est engagé dans un lent processus d'effectuation dont la validité et le caractère impératif ont leur fondement dans la conscience internationale.
Le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes a des racines libérales et démocratiques. Non seulement il exclut pour un peuple toute forme de cession et d'annexion forcées, mais il établit un lien entre son consentement et la structure étatique dans laquelle il doit se développer et trouver son bien. Ce principe est consacré d'une manière expresse dans la Charte des Nations Unies. L'article premier stipule que l'un des buts de l'O.N.U. est de « développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes, et de prendre toutes autres mesures propres à consolider la paix dans le monde ». D'autres textes font également mention du droit des peuples à disposer d'euxmêmes. Dans l'article premier du Pacte international relatif aux droits civils et politiques adopté par l'Assemblée générale des Nations Unies le 16 décembre 1966, il est stipulé que :
Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.
Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles, sans préjudice des obligations qui découlent de la coopération économique internationale, fondée sur le principe de l'intérêt mutuel, et du droit international. En aucun cas, un peuple ne pourra être privé de ses propres moyens de subsistance. Les États parties au présent Pacte, y compris ceux qui ont la responsabilité d'administrer des territoires sous tutelle, sont tenus de faciliter la réalisation du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, et de respecter ce droit, conformément aux dispositions de la Charte des Nations Unies1.
Pour la plupart des théoriciens, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes comporte le droit à l'autodétermination interne (le droit d'obtenir le statut de son choix à l'intérieur d'un pays) et le droit à l'autodétermination externe (le droit à l'indépendance) qui « reconnaît à une population la possibilité de se séparer d'un État, soit pour s'ériger en Etat indépendant, ce qui entraîne comme conséquence inévitable la sécession2 ».
« Tout ce qui se dit ou s'écrit depuis le dix-neuvième siècle sur le droit des peuples non constitués en États à disposer d'eux-mêmes », souligne Jean-François Guilhaudis (Maître de Conférences agrégé de droit public à l'Université des Sciences Sociales de Grenoble), « est entièrement dominé par la question de la sécession ». En conséquence, il estime qu'on « ne peut valablement entreprendre l'étude du droit des "peuples" de "déterminer librement leur statut politique" qu'en partant de l'hypothèse de la sécession », de l'indépendance et qu'en mettant en évidence, au préalable, les données principales de ce problème3. L'issue qu'est la sécession amène certains auteurs à imposer des limites au droit des peuples à l'autodétermination :
imposer des limites à l'application du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Le président Wilson y participe, qui déclarait dans son message du 11 février 1918 : «... toutes les aspirations nationales bien définies devront recevoir la satisfaction la plus complète qui puisse leur être accordée, sans introduire de nouveaux ou perpétuer d'anciens éléments de désordre ou d'antagonisme, susceptibles, avec le temps, de rompre la paix de l'Europe et, par conséquent, du monde ...». Cela revient à prendre en considération et à opposer aux « peuples », aux « nationalités », les intérêts des États où ils se trouvent et ceux de la communauté internationale. Les « peuples » devront, si nécessaire, renoncer à l'indépendance et se contenter de ce que le président américain définissait comme étant le minimum des droits d'une nationalité : « une sauvegarde inviolable de l'existence, du culte et du développement social et industriel »4. Le droit des peuples à l'autodétermination externe s'oppose à l'État, c'est-à-dire à son droit à l'unité tel que stipulé dans l'article 2 § 7 de la Charte des Nations Unies5. Cette opposition donne souvent lieu à des conflits de toutes sortes, car « dès que paraît le risque de dissidence, les passions s'exacerbent. Les uns voient poindre enfin un "avenir radieux de liberté", les autres s'agiter dans l'ombre le spectre du démembrement6. » Le conflit entre la population qui désire se séparer et l'État qui veut à tout prix maintenir sa domination constitue en fait « le fond du problème de la sécession ». Il est manifestement difficile de concilier le droit de l'État à l'unité et à la conservation avec le droit d'une partie de sa population à la sécession, c'est-à-dire à l'exercice de son droit à la libre disposition. Dans la pratique jusqu'ici — chaque fois que fut soulevé le problème des tentatives séparatistes extra-coloniales — c'est le principe de l'unité de l'État qui a prévalu : Quand s'est posée la question de la sécession, la pratique internationale y a répondu avec un bel ensemble : les populations coloniales ont le droit de disposer d'elles-mêmes et d'accéder à l'indépendance, les autres ne l'ont pas7. Peu de temps avant l'effondrement du Biafra, le Secrétaire général des Nations Unies, M. Thant, déclarait : « L'O.N.U. ne peut accepter et n'acceptera jamais une sécession dans l'un de ses États membres8. » Cela revient à dire que le droit des peuples à l'autodétermination externe est réservé au domaine de la décolonisation et que, sans le consentement de l'État dans lequel il se trouve, un peuple non colonial ne peut accéder à l'autodétermination externe. Ce point de vue, Jean-François Guilhaudis en fait la remarque, est l'objet de nombreuses critiques. Plusieurs auteurs estiment en effet que « reconnaître un droit à
l'autodétermination et à l'indépendance aux peuples coloniaux et refuser ce droit à toute population qui ne porte pas l'étiquette coloniale, constitue une contradiction9 ». Malgré la disparité des situations, il y a un facteur commun qu'on ne saurait nier : l'accès à l'indépendance. Le professeur Calogeropoulos-Stratis va plus loin : il soutient que « l'acceptation de ce point de vue aura en théorie pour effet d'effacer pour toujours le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes malgré les dispositions de la Charte et en cas de conflit de sécession d'immobiliser l'O.N.U. et de rétrograder à la situation anarchique d'avant-guerre10». S. Calogeropoulos-Stratis condamne la réduction du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes à la libération des peuples coloniaux et il soutient, en invoquant l'origine révolutionnaire au droit des peuples, que, par cette limitation, le droit à l'autodétermination est « dénaturé de son sens classique » : Limiter le droit à la libre détermination uniquement à la libération coloniale, présumer la volonté des intéressés et déclarer qu'une fois l'indépendance acquise, rien ne peut être mis en cause, concernant le statut qui en résulte, est contraire à la conception du principe même du droit des peuples et à l'idée démocratique où prime la volonté des intéressés .... On introduit ainsi l'idée qu'une fois l'État constitué, celui-ci est le dépositaire et le garant de la libre disposition du peuple qu'il régit, ce qui amène à faire du droit des peuples un droit de l'État et non du peuple11. Dans la pratique internationale, il faut le déplorer, le droit à l'autodétermination externe, bien qu'il soit « un principe juridiquement obligatoire qui jouit de l'universalité et qui constitue une règle générale de droit international12 », n'est pas toujours appliqué. De grands espoirs ont ainsi été trahis et le prestige des Nations Unies en a souffert. Jean-François Guilhaudis affirme que les Pactes internationaux — qui stipulent que « tous les peuples » ont le droit à l'autodétermination — ont pu entretenir de faux espoirs et ont laissé planer pour un temps « une certaine équivoque sur l'étendue que la communauté des nations entendait reconnaître au droit de sécession13 ». La pratique internationale, à travers les drames du Biafra, du Bengale et du Kurdistan, aurait refusé tout droit à l'indépendance aux peuples non coloniaux et il faudrait se résigner à cette limitation. En fait, comme le souligne pertinemment Guy Héraud, il ne faut guère compter, lorsqu'il est question de sécession, sur la bonne volonté des États qui sont par nature « des structures de force et de domination ». Même l'autodétermination interne, écritil, est rigoureusement marchandée dans tous les pays ; il n'est donc pas étonnant que
cette « répugnance » à l'égard de l'autodétermination interne fasse « place à l'horreur dès qu'on évoque l'autodétermination externe », c'est-à-dire le droit de sécession14. Les États, disait ajuste titre le président du Parlement de la République et Canton du Jura, Roland Béguelin, en décembre 1979, ont le plus souvent un comportement identique à l'égard des populations qui manifestent le désir d'exercer leur droit à l'autodétermination : Les États, quels qu'ils soient, ont presque toujours la même attitude à l'égard des mouvements qui revendiquent un droit de libre disposition, lequel ne peut être appliqué, bien entendu, qu'en faveur de minorités nationales ou de groupes ethniques conscients de leur destin particulier et de leur identité. Ces États, qu'on a qualifiés de « monstres froids », sont habités par l'instinct de possession, parce qu'ils sont l'oeuvre des hommes et qu'à ce titre, les institutions mêmes n'échappent pas à l'égoïsme. Aucun gouvernement ne consent volontiers à rogner ses prérogatives et encore moins à perdre un territoire15. Par conséquent, les populations appartenant à un État déjà constitué peuvent difficilement revendiquer leur droit à la libre disposition ; ce qui, comme l'affirme le professeur Calogeropoulos-Stratis, « est contraire à la notion de droit des peuples » telle qu'elle apparaît dans la Charte des Nations Unies ainsi que dans les deux Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme. Alors comment concilier le droit des États à l'unité et à la conservation et le droit des peuples à la libre disposition ? Peut-on surmonter l'antagonisme entre le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et l'intégrité territoriale des États ?
André N'Kolombua croit que oui : L'examen de la pratique internationale montre que l'antagonisme réel ou virtuel existant entre le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et l'intégrité territoriale des États peut être surmonté, dépassé sur la base du rapport de forces entre le mouvement de libération d'un peuple et l'appareil d'État qui défend le maintien de l'intégrité territoriale et de l'unité nationale, c'est-à-dire sur la base de l'effectivité, soit au profit du mouvement de libération d'un peuple, situation assez rare eu égard à la pratique internationale, soit au profit de l'appareil d'État, situation la plus courante. La nouvelle synthèse provisoire qui en résulte permet de rétablir la complémentarité entre le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et l'intégrité territoriale des États sur des bases nouvelles16. Lorsqu'il s'agit de sécession, contrairement à la cession d'un territoire et de sa population, la volonté étatique ne rentre généralement pas en jeu, c'est-à-dire que ce n'est pas l'État qui prend l'initiative, mais une population appartenant à cet État qui demande à se séparer de celui-ci.
Étant donné que le droit de sécession s'oppose à l'Etat, à son unité et à sa conservation, il y a presque toujours conflit entre le peuple revendiquant son droit à disposer de lui-même et l'État qui défend son intégrité territoriale. Dans le domaine du droit international contemporain, précise André N'Kolombua, il ne fait aucun doute « que la lutte menée par un peuple pour la réalisation de l'exercice de son droit à disposer de lui-même fait partie de la catégorie juridique des conflits internationaux. C'est à ce niveau de l'analyse juridique, dit-il, que se situe le problème de la relation entre le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes d'une part et les principes de non-recours à la menace ou l'emploi de la force dans les relations internationales et de non-intervention d'autre part17. » L'article 2 § 4 de la Charte des Nations Unies stipule que « les membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies ». Puisque le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes est consacré par l'article 1 § 2 de la Charte et par l'article premier des deux Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme, les États doivent donc « s'abstenir de recourir à la menace ou à l'emploi de la force contre un peuple revendiquant l'exercice de son droit à disposer de lui-même18 ». Bien que la Charte interdise aux Nations Unies d'intervenir dans une question faisant partie du domaine réservé des États, cette règle ne s'applique pas lorsqu'il y a menace ou application de mesures coercitives. Ainsi, lorsqu'un État a recours à la menace ou à la force — ce qui se produit généralement dans les cas de sécession — l'exception prévue dans l'article 2 § 7 de la Charte concernant le domaine réservé des États ne peut mettre en échec l'application du droit des peuples à disposer d'euxmêmes : L'article 2 § 7 de la Charte des Nations Unies relatif aux affaires intérieures des États est inapplicable ici, puisque le recours à la menace ou à l'emploi de la force contre un peuple revendiquant l'exercice de son droit à disposer de lui-même est susceptible d'affecter le maintien de la paix et de la sécurité internationale. Ainsi, les relations entre un appareil d'État et le peuple qu'il gouverne sont régies par le droit international, s'agissant de l'exercice par ce peuple de son droit à disposer de lui-même, c'est-à-dire de faire prévaloir une norme de droit international le concernant. C'est cette tendance que l'on constate en ce qui concerne les droits et les libertés fondamentaux de l'homme19.
Lorsqu'un État signe une convention ou un pacte international relatif à la protection des droits de l'homme, ces derniers ne relèvent plus des affaires intérieures de cet État. En cas de violation des droits et libertés de la personne, tous les États signataires « ont le droit de faire respecter les normes de droit international ainsi violées en matière de droits de l'homme ». Dans ce cas, il n'y a pas ingérence dans les affaires intérieures, puisqu'il s'agit « de faire prévaloir le respect des normes de droit international20 ».