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lundi 9 juillet 2012

____La démocratie est-elle sous-jacente dans l’histoire occidentale ?

Cette question se pose au monde à l’heure où les nations occidentales, par le truchement des organisations qu’elles dirigent, s’octroient le droit d’ingérence dans les affaires souveraines des Etats, dans le but officiel de soutenir les velléités démocratiques des peuples opprimés. La réponse à cette question parait de prime abord évidente, surtout lorsqu’on admet qu’Athènes, l’antique cité grecque et donc européenne fut le berceau de la démocratie. L’Occident ne se serait-elle pas naturellement approprié ses valeurs ? Pourquoi donc cette question ? Malgré cet à priori qui tombe aujourd’hui sous le sens, il n'en est rien au regard des entorses faites aux valeurs de la démocratie par les nations championnes mêmes de sa promotion dans le monde. Ainsi l'intolérance religieuse en Occident (islamophobie), les nationalismes exacerbés portés par leurs mouvements d’extrême droite, la xénophobie, l'institutionnalisation des racismes, les problèmes des libertés et d’égalité en droit en Occident, le mélange des genres entre l’église et l’Etat (incompatible avec le principe démocratique de la laïcité), les guerres menées par les pays donneurs de leçon mais violant leurs propres résolutions onusiennes, les impérialismes sous des prétextes fallacieux comme celui de la lutte contre le terrorisme, susceptibles de justifier le retour d'ascenseur sous forme d'attentats contre les cibles occidentales, etc.



Sur le plan pratico-pratique, quel que soit la nation occidentale considérée, les valeurs démocratiques y sont très superficielles et reposent souvent sur un caractère polymorphe, perverti. Ainsi lors d’un référendum en 2005, 53% d’Irlandais, 55% de Français et 61% de Hollandais s’opposèrent au projet de Constitution européenne. Estimant que le peuple n’avait pas « correctement voté », sa volonté fut ignorée et contournée. Evidemment que ces pays ne possèdent pas le monopole de ces procédés opposés aux principes de la démocratie qui décrètent que « le peuple seul est souverain. » En effet, nombre de pays européens dont le Danemark, le Portugal, etc., suspendirent le référendum prévu, sachant que leurs citoyens désapprouveraient de même. Deux années plus tard, les représentants des Etats membres se réunirent à Lisbonne et imposèrent le Traité, supposé modifié, sans qu’il soit jamais encore soumis au peuple. Est-ce bien démocratique ?



Au regard de ces écarts et déviations, de la crise institutionnelle et de gouvernance d'une part, et en reconsidérant toutes les formes de lobbyings et de dictatures (culturelle, économique, politique, etc.) imposées par les régimes dits démocratiques d’autre part, ainsi que la marche déséquilibrée du monde contemporain, répondre à la question de savoir si la démocratie est sous-jacente dans l’histoire occidentale ne va plus de soi. Car l’Occident apparaît de plus en plus comme « une civilisation qui ruse avec ses principes » (A. Césaire). Pour être valable cependant, notre réponse à cette question devra être éprouvée empiriquement, historiquement dans le cas d’espèce. D’où l’analyse de l’histoire occidentale sur le « temps long » (Braudel).

La « démocratie » : une réinvention universelle.



D’emblée, soulignons qu’avant la Grèce, au tout début de l’aventure humaine, existait la démocratie. Ses valeurs étaient au fondement des civilisations sumériennes (Irak), des sociétés des chasseurs-cueilleurs (comme les Pygmées de la forêt équatoriale actuelle), des royaumes de la vallée de l’Indus ou Inde ancienne (Vaísali, Mahajanapadas), des Etats antiques de Gopala, (Bengale), de Sambasrai (Afghanistan), de Sabarcae (Pakistan), au sein des tribus primitives amérindiennes, etc. La déclaration universelle sur la démocratie en parle comme d’un « idéal universellement reconnu et un objectif fondé sur des valeurs communes à tous les peuples qui composent la communauté mondiale. » Donc, loin d’être une invention grecque, la démocratie est une aspiration universelle qui s’impose naturellement aux hommes. Aucun peuple ne peut s'arroger son invention. Pour ce qui est formellement attesté, c’est néanmoins en Grèce que pour la première fois elle aurait été appliquée à des communautés complexes.



L’histoire situe son règne à Athènes entre le début du 5ème siècle et 338 avant notre ère, année où Athènes, affaiblie, perdit définitivement son indépendance, sa constitution étant abolie en - 322. L’on remarquera que la démocratie ne subsista dans la Grèce antique que moins de deux siècles de sorte que l’on n’en parlait plus au début de l’ère chrétienne. Durant cette ère, « le souvenir des cités grecques avait totalement disparu », même s’il eut quelques assimilations, notamment dans les cités italiennes de la Renaissance (cf. : Le Prince, Makiavel). C’est sous une forme radicalement différente, objet d’une falsification grossière et d’une application édulcorée, mensongère, que la démocratie sera réinventée plus de deux millénaires après dans l’Amérique du 19ème siècle. Dans un mémorable discours en 1863, Abraham Lincoln, l’un des pères fondateurs de cette démocratie réinventée, plutôt représentative, reprenait la vieille formule de Périclès qui célèbre « le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. » Pour Pierre Rosanvallon , il faut justement attendre ce siècle-là pour que l’usage même du mot se répande dans le langage courant. Et en tant que système de gouvernement en Europe, ce n’est que récemment, dans la seconde moitié du 20ème siècle et à la faveur de la recherche de la paix suite aux guerres mondiales (SDN, ONU, OTAN, etc.), que la démocratie sera redécouverte. Comment expliquer cet effacement millénaire des principes du « pouvoir au peuple » ?

Obstacles millénaires à l’enracinement de la démocratie en Occident.



Fragmentée et hétérogène, l’Europe est le terrain de jeu des envahisseurs pendant la plus grande partie de son histoire de l’ère chrétienne, notamment depuis le 5ème siècle. « Les Huns, les Avars, les Magyars, les Tatars, les Mongols et les peuplades turques arrivent de l'est, les Vikings du nord, les conquérants musulmans du sud », explique l’historien britannique Eric Hobsbawm . Pressés de tous les côtés, dans ces déchirements et cet éclatement de l’Europe « westphalienne », du fait des guerres internes et externes sur une période s’étalant sur plus d’un millénaire et demi, et même après la mise en place des cités-nations qui ne verront le jour sur le territoire situé entre l’Oural et Gibraltar qu’après la défaite turque aux portes de Vienne en 1683, il est impossible de parler d’Etat en Europe, et encore moins de nation démocratique. L’Europe ne retrouve un semblant de stabilité politique qu’après la révolution française qui s’achève en 1799, à la veille du 19ème siècle. Or, affirmation pour le moins absurde, le pouvoir n’était point entre les mains du peuple dans le système aristocratique qui domina en Occident durant ces longs siècles d’hiver démocratique.



Durant les 9 dixièmes de l’ère chrétienne donc, l’Europe connaît une instabilité qui n’offre pas l’occasion de construire des États forts. Pour commencer, pendant un demi-millénaire, la domination des Phéniciens, premiers colonisateurs au monde, dé-configure le sud de l'Europe . Partant de la Syrie, du Liban et de la Palestine, ils colonisent la Tunisie, l’Égypte, Tanger, l’Espagne, la Sicile. A la fin de leur domination suite à la destruction de Carthage par Rome en 146, c'est encore une famille phénicienne (Liban) qui impose la dynastie de Septime Severe à Rome durant la fin du 2ème siècle. Passons sur le sac de Rome en 410 par le Wisigoths. En réalité, ce sont les Vandales, peuple germanique d’origine scandinave, qui tiennent l’Europe en otage durant les 5 premiers siècles. Ils envahissent la Gaule (407), la Galice, la Bétique (Espagne, 409), l’Afrique romaine, les Îles de la méditerranée (Sicile, etc.), avant d’être conquis par les Byzantins (533). Au début, le règne instable des Byzantins profite dans un premier temps aux Bulgares qui pénètrent dans les Balkans et Lombarde (Italie), puis dans un second temps aux Arabes (depuis le Yémen aussi) qui arrivent en Afrique du nord où ils prennent Carthage (695), occupent le Maghreb et font replier encore plus les Noirs dans l’hinterland continental, traversent la méditerranée pour poursuivre leurs conquêtes. Pénétrant aussi l’hinterland européen, ils prennent possession des terres basques, de Bordeaux, etc., soumettent une partie de ces peuples à l’Islam. Ce n’est qu’à Poitiers en 732 qu’ils seront stoppés. La Grande Mosquée de Cordoue en Andalousie est aujourd’hui encore une des traces de l’invasion séculaire des Arabes qui occupent le sud de l’Europe pendant des siècles.



Dès 793, c’est au tour des navigateurs et guerriers Vikings, édificateurs de Dublin venus de Scandinavie. Ils effectuent des raids, pillent et massacrent tout sur leur passage, déstabilisent le continent européen depuis les villes côtières d’Irlande et les Île du nord-est de l’Angleterre jusqu’aux confins du continent. Ils occupent et dominent l'Europe occidentale et centrale jusqu’en Russie. Partout ils sèment la terreur, brulent Paris en 856. A la même période, les nomades Avars venus d’Asie font des incursions régulières, saccagent l’est de l’Europe dès 799, jusqu’en Croatie.

Pour continuer dans le « temps long » (Fernand Braudel) de cette histoire des barbaries où la démocratie est littéralement relayée aux calendes grecques depuis des siècles, la Dalmatie connaîtra ses guerres ravageuses, s'en suivra celles des envahisseurs Francs, de Charlemagne, celles sur la Lotharingie, la Bretagne. Il y aura le siège de Paris par les Normands, la bataille de Clontarf en 1014 qui marque la fin de la domination des Vikings et le début des batailles pour les successions en Irlande. L’union de la Croatie blanche et Pannonienne en 925 et son intégration à la Hongrie en 1102 sont finalement perçues comme des alliances stratégiques afin d'être plus forts face aux envahisseurs durant ces siècles de barbarie.

Après les grandes invasions barbares (3ème au 5ème siècle) et celles du haut Moyen-âge (5ème au 10ème siècle), l’intolérance religieuse des Européens durant le bas Moyen-âge (10ème au 15ème) est véhiculée par les papes successifs (Urbain II, III et IV, Innocent III et IV, Grégoire VIII, IX et X, etc.), qui tentent d’unifier l’Europe autour de la chrétienté. Cette intolérance est relayée par les chefs militaires et les monarques les plus puissants qui, foulant au pied le principe démocratique de la laïcité (officiellement jusqu’en 1905 en France), font allégeance au pape. Outre Godefroi de Bouillon, ces meneurs sont Philippes-Auguste, Saint-Louis, (rois de France, Richard Cœur de Lion (roi d’Angleterre), Fréderic 1er Barberousse (Empereur du Saint-Empire Romain Germanique), etc.




Avec la bénédiction papale, les réactions enthousiastes engendrent de formidables coalitions européennes de très vaste ampleur entre 1095 et 1292. Les expéditions des armées des croisés sont abominables et déstabilisent l’Europe et le Moyen-Orient. Les armées de Chevaliers, de Teutons, d’Hospitaliers et de Templiers prennent activement part aux huit croisades. Celles-ci mobilisent les populations entières par dizaines de milliers qui partent de tous les quatre coins d’Europe jusqu’aux confins de la Russie pour le Moyen-Orient : Jérusalem, Damas (et toute la Syrie), Beyrouth (et tout le Liban), Bethleem, Samarie, l’Irak, l’Iran, Chypre, Crête, Byzance, Constantinople, l’Egypte, Tripoli, Carthage). Au départ, croix sur le dos, les croisés ont pour but de contrôler la Terre sainte et Jérusalem afin de récupérer le Saint-Sépulcre et libérer ainsi « le tombeau du Christ » des mains des « infidèles » musulmans à qui ils portaient la divine parole. Par la suite les croisades seront l’occasion d'expéditions de pillages, le sac des villes traversées, le massacre des hommes, le viol des femmes, le vol des richesses des populations musulmanes, juives et même chrétiennes de ces régions à qui ils livrent les guerres au nom de la chrétienté.



Entre temps, dès 1237, sous le Roi universel Gengis Khan, les Mongols ou « Hordes d’Or », peuples d’Asie à l’origine d’un des plus grands empires de tous les temps (couvrant l’Asie centrale, la Birmanie, l’Indonésie, la Chine, la Russie, le Moyen-Orient), écraseront les Ukrainiens, les Polonais, les Hongrois, les Autrichiens, etc. A l’intérieur de l’Europe, quand ce ne sont pas les invasions étrangères, ce sont les guerres internes entre Français, Anglais, Germains, Romains, etc. Ainsi, en sera-t-il des Français vaincus par les Flamands à Courtrai en 1302. Ou encore la guerre de cent ans qui se poursuit de 1337 à 1453 sur le sol français.



Sorte de retour des croisades quelques décennies plus tard, c’est au tour des Musulmans de mener les djihads avec de fréquentes invasions sur les terres d’Europe ., en commençant par la Grèce, puis la Bulgarie, la Roumanie, etc., jusqu’aux portes de Viennes en Autriche à la fin du 17ème siècle comme nous le mentionnions supra. Partie de la péninsule ibérique (Espagne), la Reconquista chrétienne contre les Musulmans aura lieu parallèlement, depuis le 8ème siècle d’ailleurs jusqu’à la prise de Grenade en 1492. Dès cette date, s’ajouteront aux massacres d’une Europe éloignées des principes démocratiques, les génocides des esclavagistes et des colons depuis les indigènes d’Amérique (Indiens) jusqu’aux nègres d’Afrique en passant par les Jaunes d’Asie, tous des termes qui rappellent le racisme occidental qui proclame avec Gobineau qu’« il n’est d’histoire que blanche ».

Le point fort des ces guerres saintes sera la chute de Constantinople. Donc, même si Byzance chute en 1453, les Ottomans ne seront défaits que 230 ans après. Ces siècles d’instabilités sociétales et de cruautés humaines n’offrent aucune occasion de réflexion critique sur les modèles de gouvernance et feront dire à Castoriadis, avec raison d’ailleurs, que contrairement à ce qu’affirmait Marx, l’histoire de l’humanité n’est pas l’histoire des luttes des classes mais bien celle des barbaries , en tout cas ces points les plus marquants.



En général, c’est le règne de la monarchie absolue en Occident, des aristocraties et des cités-nations qui ne connaissent pas la démocratie. Les successions sont héréditaires au sein de quelques familles de souverains qui prennent la tête des États-nations européens comme on le remarquera aujourd’hui encore où nombre de familles royales descendent toutes d’ancêtres communs et restent au pouvoir jusqu’à leur mort (Belgique, Angleterre, Danemark, Pays-Bas, Norvège, Suède, Espagne, Liechtenstein, voire Monaco et Luxembourg, etc.). Après les siècles de croisades et de djihads, ce sont ceux des hérésies et des inquisitions catholiques absolument inhumaines. On pratique officiellement la chasse aux sorcières que l’on brule vives sur les buchers, la pendaison (haute et courte) sur l’échafaud, la guillotine.

Loin d’être celle des valeurs de la démocratie, l’époque médiévale et même de la Renaissance (1450-1600) en Occident est bien celle de l’intolérance religieuse, de l’antisémitisme. Les Juifs sont partout pourchassés pour être tués, tandis que le système de servage avec son mode d’exploitation est la règle dans les seigneuries. C’est d’ailleurs en cherchant des échappatoires à leurs risques et périls que les premiers serfs fugitifs deviendront des artisans dans les bourgs tout autour des seigneuries. Vendant les objets d’art de leurs fabrications aux nobles d’autres contrées, ces bourgeois vont s'enrichir et manipuler les serfs restés au service de leurs maîtres anoblis pour qu’advienne la révolution française qu’ils détourneront à leur compte.



Démocratie : la grande illusion occidentale.



Ainsi donc, parler des valeurs qui fondent la démocratie comme étant occidentales est une grosse méconnaissance des faits historiques quand on sait par exemple que bien avant les Européens, la tolérance religieuse, une importante valeur démocratique, était pratiquée par les Ottomans et les Chinois, les seuls à accueillir les Juifs expulsés par les intégristes chrétiens de la Castille (Espagne), du Portugal, puis d’autres États d’Europe dès le 14ème et jusqu’au 18ème siècle, voire au 20ème (l'affaire Dreyfus, la Solution Finale). Plus grande puissance européenne d’alors (les États-nations se forment à partir du 14ème/15ème siècle jusqu’au 19ème), l’Espagne n’avait pas les valeurs démocratiques que s’approprie l’Europe aujourd’hui.

A voir tout le rififi autour de la burqa, indicateur d'une islamophobie profonde, il ne fait aucun doute que la tolérance fait défaut à l’Europe actuelle. Comment s’en étonner si, comme l’explique l’historien Hobsbawm, « ce n'est qu'à la fin du XXe siècle que les institutions et les valeurs en question se sont répandues, au moins théoriquement, à travers toute l'Europe. »



Supra nous parlions de semblant de stabilité au cours des années 1800 car même après les Lumières et les révolutions, l’Europe connaîtra encore de longues périodes de crises et de guerres d’une cruauté désespérante. Les rois et les empereurs ont droit de vie et de mort sur leurs sujets et règnent jusqu’à leur mort. En 1802, après la révolution, Napoléon par exemple se fait proclamer Consul à vie, puis Empereur ; et le restera jusqu’à sa défaite en 1815 à Waterloo (Belgique) par les troupes britanniques de Wellington et prussiennes de Blücher. Même après, crimes contre l’humanité et guerres, y compris coloniales, seront fréquents, l’Europe étant comme le rappelait Césaire, « comptable devant la communauté humaine du plus haut tas de cadavres de l’histoire. » (Discours, op. cit.).




Au 20ème siècle, des régimes autoritaires s’accaparent du pouvoir et l'Europe postindustrielle du capitalisme mur connaitra encore le stalinisme, le salazarisme, le fascisme, le nazisme, le franquisme, etc., ainsi que l’expliquait Mitterrand aux Chef d'États Africains dans son discours de La Baule en 1990 : « il nous a fallu deux siècles pour tenter de mettre de l'ordre, d'abord dans notre pensée et ensuite dans les faits, avec des rechutes successives ; et nous vous ferions la leçon ? »

C’est récemment, après la deuxième guerre mondiale, après les décolonisations en Afrique, en 1965, il n’y a même pas un demi-siècle donc, que la France par exemple aura son premier Chef d’Etat élu à peu près démocratiquement, au suffrage universel sans discrimination de genre : Charles De Gaule (Vème République), vainqueur face à Mitterrand que nous avons tous connu. Même dans l’exemple démocratique souvent cité de la Suisse actuelle où, intolérance religieuse caractéristique, l’on a récemment organisé un referendum pour l’interdiction des minarets (pourquoi pas aussi des clochers ?) et l’expulsion des migrants reconnus coupables d’un crime, parmi lequel s’inclut une banale fraude sociale, les femmes n’auront le droit de vote qu’en 1971. Quant au vote des étrangers qui vivent et travaillent légalement dans quasi tous les pays d’Occident, il est encore loin d’être programmé sur la table des discussions. En France, sans l’avis du peuple, Sarkozy lui tout seul a réitéré son refus et son gouvernement se vante de son nouveau quota de 30.000 expulsions d’étrangers par an.

Partout, l’on assiste à une régression mentale que les peuples de l’antiquité eux-mêmes n’ont pas connue. Loin de construire les murs pour empêcher l’arrivée des étrangers, l’hospitalité était une tradition grecque, une valeur caractéristique de leur démocratie, comme le témoigne le conte épique de L'Iliade. Or de nos jours, des prisons pour étrangers qualifiées de « centres fermés » se comptent par centaines à travers l’Occident barricadé dans des fortifications le long de ces frontières. Les traitements dégradants et la répression qui y ont cours ne sont finalement qu’anecdotiques devant tant d’autres injustices récurrentes. A cela, l’on se justifie : l’Occident « ne peut pas accueillir toute la misère du monde ! » Sont-ce là les valeurs de la démocratie ?



Sur le sujet, toute critique est censurée car « La France, tu l’aimes ou tu la quittes. » Qu’en est-on de la liberté d’expression qui avait cours dans ce marché-lieu de rassemblement de l’antique Athènes, l’agora ? Quid de la protection de la vie privée ? En Angleterre, en France, aux USA, dans toutes les « démocraties », les scandales des écoutes illégales sont récurrentes, bien que contraires aux principes démocratiques. La xénophobie et le racisme sous-jacents prennent les oripeaux de nationalisme qui connaissent une avancée inquiétante. Dans son œuvre « Printemps dans un jardin de fou », Henri-Frédéric Blanc assène : « le fascisme n’a pas été pulvérisé. Il a été intériorisé et il ressort un peu partout, partout un peu. » Témoins la montée de l’extrême droite : 10% en France, 12% en Bulgarie, 14,8% en Hongrie, 17% au Pays-Bas, 17,1% en Belgique, 22,4% en Norvège ! S’étonnera-t-on des attentats perpétrés par un croisé des temps modernes à Oslo il y a quelques semaines ?



Devant la nouvelle « invasion musulmane » qui justifierait l’islamophobie actuelle, il y a longtemps que l'Europe, jusqu'aux mouvements extrémistes de droite, a fait volte face pour condamner désormais non seulement le négationnisme et la traditionnelle complaisance à l'égard de l'antisémitisme, mais aussi toute critique à l'égard d'Israël, Etat dont malgré le caractère clairement voyou, est, dans la position stratégique de son isolement géographique de l’Occident d’où parsema sa diaspora, contraint d’accepter d'être en retour l'avant-garde des Occidentaux en Orient, chez les Arabes.

Il faut savoir, comme l’expliquait la vice-présidente de la Commission européenne au début des révoltes arabes, que même « tout au long du XXe siècle, notre avancée vers la démocratie libérale a été chaotique et lente. L'Union européenne elle-même a émergé des cendres de plusieurs conflits ayant ravagé notre continent et qui ont montré les conséquences dramatiques de l'échec de la démocratie. Si on ajoute le bilan mitigé des empires européens, il est clair que l'UE doit faire preuve d'humilité vis-à-vis de ses partenaires. »



Dans l’Europe dans parle Mme Ashton, peuples et élus n’ont aucun pouvoir. A l’ombre des seuls grands états dont les dirigeants jouent les oligarques, il y a des décennies que la Commission européenne ne joue plus le rôle majeur que lui reconnaissent les traités. Elle est même devenue sans objet l’année dernière avec la nomination d’un président du Conseil, poste fabriqué par Sarkozy et Merkel, qui, avec la « crise de la dette », viennent d’inventer aussi, toujours unilatéralement, le Gouvernement économique de la zone Euro. Évidemment que l’Occident n’a pas de leçon démocratique à donner au reste du monde. En parlant de l’émergence de l’UE « des cendres de plusieurs conflits ayant ravagé » l’Europe, Ashton pense sans doute au nazisme et la seconde guerre mondiale. Pour très longtemps encore, l’humanité se souviendra avec effroi du « Combat » mené par Hitler et du niveau inégalé de barbarie atteint par ce führer arrivé « démocratiquement » au pouvoir. Cet exemple achève à lui seul de montrer qu’« aucune démocratie n'est à l'abri d'une poussée autoritaire, même en Europe », comme le souligne Bertrand Badié, professeur à Sciences Po (Paris). »

Comme on le constate, au contraire des valeurs qui dominent aujourd’hui sur ce continent, ce sont les marxismes-léninismes, les nationalismes, voire les racismes qui de loin devançaient l’idéologie d’ensemble le siècle dernier encore. Même en Amérique où l’on est théoriquement en avance sur l’Europe en ce qui concerne la pratique de la démocratie (De Tocqueville), c’est l’esclavage qui a dominé durant la grande partie de l’histoire de cette première république moderne ; les femmes blanches n’y obtiendront le droit de vote qu’en 1920 quand Rosa Park, une femme noire n’a pas, en 1955, le droit de s’asseoir sur un siège d’autobus parce que la loi le réserve aux seuls Blancs. Cette pseudo-démocratie n’octroie pas encore la plus importante valeur à ces citoyens, celle de l’égalité des droits, et le Ku Klux Klan sème toujours la terreur. On sait que Martin Luther King qui revendiquait l’égalité entre les Blancs et les Noirs sera assassiné à Memphis en 1968, tout récemment donc, plus d’un siècle après le discours de Lincoln. Dans l’Europe de cette époque où l’illusion démocratique était déjà évidente, l’un des slogans les plus durs entendus chez les soixante-huitards étaient : « La dictature, c’est ferme ta gueule ; la démocratie, c’est cause toujours. » Faut-il rappeler qu’Obama est le seul président américain qui n’est pas « pur blanc » ? Et il restera seul dans sa catégorie pendant des décennies. Et un tel évènement est impensable en Europe ; quid du Vatican ?

Comment expliquer raisonnablement ces réalités politiques occidentales actuelles opposées aux principes de la démocratie autrement que par le fait que ses valeurs ne sont pas sous-jacentes dans l’histoire des champions de sa promotion dans le monde ? Pour l’historien Eric Hobsbawm , en Europe « les valeurs qui fondèrent les États modernes avant l’ère des révolutions furent celles des monarchies absolues et mono idéologiques. »

D’évidence donc, la « démocratie » ou ce qui en tient lieu aujourd’hui n’est profondément enracinée nulle part. Elle n’existe que dans une certaine superficialité, n’ayant été réinventée il n'y a que quelques décennies. L’historien insiste : « Les "valeurs européennes" sont un mot d'ordre de la seconde moitié du XXe siècle.» La légitimité de ces valeurs restant encore à construire, il va sans dire que la démocratie a déjà elle-même besoin d’être enracinée et approfondie en Occident, avant d’être imposée à coups de canons ailleurs, avec le chaotique succès obtenu en Irak depuis les braises éventées entre Chiites, Sunnites et Kurdes. Et demain, la Libye ! Que l’Occident assimile d’abord sa leçon de démocratie ! Car comment donner ce qu’on n’a pas ? Où a-t-elle jamais pu apporter la démocratie ? Où ?


  • 1- Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme, Paris, 2004, Ed. Présence Africaine, p. 7.

  • 2- Gaston Lavergne, La démocratie dans l’histoire, Site Internet : www.esplanade.org/democratie.
  • 3- Pierre Rosanvallon, L’histoire du mot démocratie à l’époque moderne, dans Situation de la démocratie, Gallimard-Seuil, 1993, pp. 11-29.

  • 4- Eric Hobsbawm, L’Europe : mythe, histoire, réalité, Le Monde, Paris, 24 septembre 2008.

  • 5- Warwick Ball, Out of Arabia, Phoenicians, Arabs and discovery of Europe, East & West Publishing, nov. 2009.

  • 6- Précisons néanmoins que le choc des civilisations est une idéologie anhistorique. Au 3è siècle, au moment de la célébration du millénaire de Rome, l’empereur romain Philippe n'était autre que le fils d'un cheikh arabe de Syrie, tandis qu'au 10ème siècle, au moment de l'apogée de l’Andalousie, le calife Abderrahman III, qui fut le souverain de ce vaste empire Arabes était un Occidental aux yeux bleus et aux cheveux blonds. Comme on le voit, la ligne de fracture est mince entre l'Orient et l'Occident tant les influences sont réciproques. A propos des emprunts culturels, notons avec intérêt que les premiers colonisateurs furent phéniciens, d'abord autour de la Méditerranée et des rives atlantiques. L'alphabet Grec elle-même tire son origine de la Phénicie, qui colonisa l'Europe. Cette origine Asiatique est d’ailleurs reconnue historiquement par les Grecs et les Romains.Cornélius Castoriadis, La montée de l’insignifiance, In Carrefour des labyrinthes 4, Ed. Du Seuil, Paris, 1988

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____La place l'islam au coeur du débat africain. Ce n'est pas l'extrême droite qui s'exprime mais un peuple ouvert, simplement soucieux de préserver ses principes et son mode de vie.

la cohabitation avec l'islam sera le défi à résoudre pour l'Europe du XXI e siècle. La religion n'est pas en cause, ni la respectable dévotion musulmane que tout croyant ne peut qu'admirer.

Ce qui s'avoue quand la parole se libère : la cohabitation avec l'islam sera le défi à résoudre pour l'Europe du XXI e siècle. La religion n'est pas en cause, ni la respectable dévotion musulmane que tout croyant ne peut qu'admirer. C'est, en revanche, la construction politique qui accompagne ce culte, dont les textes de référence ne différencient pas le spirituel du temporel, qui préoccupe les démocraties. Elles voient leurs règles utilisées par des néofondamentalistes pour tenter d'ébranler la laïcité. Pourquoi feindre encore de ne rien remarquer ?

Un même panurgisme, qui assure à Copenhague que l'Occident est seul coupable du réchauffement climatique, refuse d'analyser la tentation totalitaire portée par cette conception d'une société soumise. Au nom de la non-discrimination, ce système est exempté de responsabilité dans la crise existentielle qui traverse l'Europe. Le débat sur l'identité, que le conformisme refuse, serait devenu "un déversoir et un défouloir" selon Yazid Sabeg, commissaire à la Diversité. Ce risque existe peut-être, tant les peuples perdent patience. Mais ce serait attiser les exaspérations que de refuser de poser des limites à l'islam en France.



La rapide émergence de ce tabou, que le vote suisse contre les minarets a achevé de briser, oblige à dire les choses. Or le déni, qui fut celui de bien des dirigeants face à la montée du communisme puis du nazisme, se retrouve chez ceux qui ne veulent pas voir les avancées de l'islamisme, dont l'idéologie rétrograde s'infiltre dans des cités majoritairement musulmanes, au nom du différentialisme défendu par les belles âmes. Une confuse référence à la suprématie coranique devient déjà, pour certains Français, le prétexte à ne plus obéir aux lois de la République. S'en accommoder, au prétexte de ne "stigmatiser" personne ?



L'apaisement est brandi par le politiquement correct, qui récuse les conflits et sacralise les minorités. Dimanche, Hervé Morin, ministre de la Défense, a justifié cette attitude. Elle vaut à la secrétaire d'État, Nadine Morano, d'être accablée de critiques pour avoir dit attendre "du jeune musulman français qu'il aime son pays, qu'il trouve un travail, qu'il ne parle pas verlan, qu'il ne mette pas sa casquette à l'envers". Les censeurs, qui veulent y entendre des propos "nauséabonds" annonçant, allons-y, un retour de Vichy, se bousculent depuis pour réclamer la suspension du débat national. Vite, remettre les têtes dans le sable...




Silence ambigu

Nicolas Sarkozy, en recentrant le débat sur l'islam (Le Monde, 9 décembre) a opportunément rappelé "l'humble discrétion" qui oblige le chrétien, le juif ou le musulman "à se garder de toute ostentation et de toute provocation". Le parallèle outrancier que soutient une partie de la gauche entre la situation des musulmans de France et celle des juifs sous l'Occupation illustre sa confusion. Même les religieux ont admis l'enjeu. "Le dernier arrivé doit s'adapter aux règles collectives", reconnaît Mohammed Moussaoui, président du Conseil français du culte musulman. "La balle est dans notre camp, c'est à nous musulmans d'expliquer, de combattre l'extrémisme", confirme Fouad Alaoui, président de l'Union des organisations islamiques de France. Les donneurs de leçons entendent-ils ?



La première vertu du débat est d'avoir convaincu, semble-t-il, ces représentants de leur responsabilité. Celle-ci consiste à corriger la caricature que l'intégrisme est en train de donner à leur communauté. À ceux qui, comme Hamid Zanaz (L'Impasse islamique, Les Éditions libertaires), disent ne guère croire en une "révolution mentale" pouvant promouvoir un "islam libéral", il appartient à ces Français issus de l'immigration d'apporter les signes de leur acceptation de la laïcité et de ses règles égalitaires. Le peuple iranien, qui aspire à la démocratie en affrontant la théocratie, ne prend-il pas ce chemin ?



Alors que les députés s'apprêtent à légiférer sur l'interdiction de la burqa dans des lieux publics, il devrait revenir aux musulmans de défendre cette mesure. Il serait utile de les entendre fixer les limites de la pratique religieuse à la seule sphère privée. Face aux incursions du néofondamentalisme, qui exige des cantines séparées et des salles de prière dans les entreprises, qui y récuse des femmes et réclame des jours fériés, qui impose sa loi dans des hôpitaux et veut des horaires séparés dans les piscines, l'actuel silence de nos compatriotes est ambigu. Leur demander de se désolidariser d'un intégrisme sclérosé n'est pas leur faire injure. C'est même l'exact contraire.





Un débat qui gêne

Au nom de la diversité, concept censé représenter la nouvelle richesse de la France, l'islam politique instrumentalise des exigences religieuses pour asseoir sa visibilité, singulièrement dans les banlieues. Même le Hezbollah islamiste a été autorisé à tenir une conférence, samedi dernier, à la Sorbonne, symbole de l'humanisme français. Continuer à nier ce qui crève les yeux ? Un constat : ceux qui réclament l'arrêt du débat sont les mêmes qui, comme Dominique de Villepin, se sont fait les chantres de " la dimension islamique de l'Europe". C'est leur monde rêvé qui est aujourd'hui jugé par les Français. Il sera difficile de les faire taire.




Avantage au FN ?

Cette libre parole favorisa-t-elle le FN ? Rien n'est moins sûr. Ce n'est pas l'extrême droite qui s'exprime mais un peuple ouvert, simplement soucieux de préserver ses principes et son mode de vie.

http://blog.lefigaro.fr/rioufol/2009/12/bloc-notes-la-place-de-lislam.html

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___Pourquoi le Nigeria, le Tchad, le Mali, le soudan s'embrase-t-il ?› Attaques d'islamistes présumés dans le nord de l'afrique? POURQUOI DEUX RELIGIONS INCOMPATIBLES DEBOUCHE T'-IL SUR UNE GUERRE DE RELIGIONS?

Pourquoi le Nigeria s'embrase-t-il ?

Le Monde.fr avec AFP | 21.06.2012 à 16h21 • Mis à jour le 21.06.2012 à 16h21

Par Anna Benjamin

De nouveaux heurts entre musulmans et chrétiens frappent le Nigeria depuis le dimanche 17 juin.

Une insurrection armée, conduite par le groupe islamiste Boko Haram, est accusée depuis plusieurs mois de vouloir déclencher sciemment une guerre de religion. Mais cela fait des années déjà qu'émeutes et attentats secouent le pays.




QUI S'AFFRONTE DANS CES VIOLENCES ?



Le Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique, compte autant de chrétiens que de musulmans. Si la mixité y est officiellement la règle, le pays est divisé entre un Nord majoritairement musulman et un Sud à dominante chrétienne, zone la plus riche grâce aux revenus du pétrole. Depuis quelques années, des troubles religieux ont éclaté entre les deux communautés, essentiellement dans le nord du pays, provoquant des milliers de morts.



Depuis mi-2009, le pays est quasi quotidiennement touché par des attaques, attribuées pour la plupart au groupe islamiste Boko Haram. Elles visent essentiellement les membres des forces de sécurité, les responsables gouvernementaux et les lieux de culte chrétiens.



Dans le Nord, les membres des différentes confessions vivent désormais dans des quartiers séparés, et se sont organisés en milices.



Lire le cadrage : "Le Nigeria face au spectre d'une guerre de religion"






POURQUOI CES VIOLENCES RESSURGISSENT-ELLES ?





On assiste d'abord à une radicalisation de l'islam dans le nord du pays. Certains Etats de cette région du nord du Nigeria ont adopté officiellement la charia entre 1999 et 2001, mais dans les faits, celle-ci n'est pas appliquée aussi strictement que les islamistes le voudraient. Il y a donc des revendications religieuses.



Le pétrole est la principale ressource financière du pays. C'est l'Etat fédéral qui décide des répartitions. Historiquement, le Nord a toujours été déshérité. Il existe donc une forte demande de rééquilibrage économique, qui est instrumentalisée par un noyau d'extrémistes religieux.



Enfin, l'élection en avril 2011 de Goodluck Jonathan à la présidence du pays a renforcé les tensions. Il est chrétien et vient de la région du Delta où se trouvent les principales régions pétrolières.



Lire l'entretien : "Au Nigeria, 'Boko Haram fait tout pour qu'il y ait un début de guerre civile'"



Marc-Antoine Pérouse de Montclos, chargé de recherche à l'Institut de recherche pour le développement et spécialiste du Nigeria, explique, lui, que ces tensions sont loin de se réduire à des critères ethniques et religieux : "Il s'agit d'une façon 'facile' d'envoyer un signal au pouvoir. Dans le Nord du Nigeria, lorsque l'on veut s'en prendre à un des symboles du pouvoir, on attaque les chrétiens."



Lire l'entretien : "Le Nigeria n'est pas dans une situation à l'Ivoirienne"






QU'EST-CE QUE BOKO HARAM ?





Les attentats contre les chrétiens sont revendiqués par l'organisation islamiste Boko Haram. "Allah nous a donné la victoire dans les attaques lancées contre des églises dans les villes de Kaduna et de Zaria qui ont provoqué la mort de nombreux chrétiens et membres des forces de sécurité", a déclaré le 18 juin dans un message électronique Abu Qaqa, porte-parole du groupe islamiste et auteur de précédentes revendications.



Lire les faits : "Boko Haram revendique les attentats antichrétiens au Nigeria"



Cette secte, dont le nom signifie en langue haoussa "l'éducation occidentale est un péché", veut imposer un Etat islamique dans le nord du pays, avec une stricte application de la charia.



A ses débuts en 2004, le groupe était essentiellement composé de diplômés de l'université et de personnes ayant rompu avec leur milieu social d'origine, classe aisée ou classe moyenne. Deux cents membres avaient alors établi un camp près de la frontière avec le Niger, dans le village de Kanamma, dans l'Etat de Yobe (nord-est), surnommé "Afghanistan".



Lire l'éclairage : "Boko Haram, la secte qui veut imposer un Etat islamique"



Mais aujourd'hui, les liens de la secte semblent dépasser les frontières du Nigeria. Le mouvement se réclame des talibans afghans et est soupçonné de liens avec la branche maghrébine d'Al-Qaida (AQMI).



Lire l'éclairage : "Les liens troubles entre Boko Haram et AQMI au Nigeria"






Y A-T-IL UNE INTENSIFICATION DES ATTAQUES ?




Boko Haram avait lancé en 2009 une insurrection sous l'autorité de leur ex-dirigeant Mohammed Yusuf à Maiduguri. L'armée avait brutalement réprimé le soulèvement et environ huit cents personnes avaient été tuées. La mosquée ayant servi de quartier général au mouvement avait été rasée et leur chef, tué.



Mais le groupe continue de lancer des raids meurtriers visant policiers, militaires, hommes politiques ainsi que responsables communautaires ou religieux opposés à leur idéologie. Depuis mi-2010, la secte a même élargi son champ d'action. Active essentiellement dans le nord, elle s'étend désormais dans d'autres régions, notamment à Jos, dans le centre. En décembre 2010, la ville avait été le théâtre d'une série d'attentats revendiqués par Boko Haram qui avaient fait quelque quatre-vingts morts.



Lire les faits: "Regain de tension interreligieux et intercommunautaires au Nigeria"



QU'ENVISAGE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE ?





Dans son ensemble, la communauté internationale condamne ces violences. La haute commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Navi Pillay, a affirmé en janvier 2012 que le groupe islamiste Boko Haram pourrait être reconnu coupable de "crimes contre l'humanité" si la justice montre qu'il a commis des attaques systématiques contre la population.



Lire les faits : "L'ONU évoque des 'crimes contre l'humanité' au Nigeria"



Les Etats-Unis envisagent, eux, d'assister l'armée nigériane dans sa lutte contre ce groupe islamiste. "Il s'agit d'une question interne récurrente au sein du gouvernement des Etats-Unis", a déclaré le 6 juin, le secrétaire d'Etat américain chargé des affaires africaines, Johnnie Carson.



Lire les faits : "Washington envisage d'assister le Nigeria contre Boko Haram"

Le Soudan du Sud, qui a dit que ce serait facile ?

Le Monde.fr | 09.07.2012 à 08h59 • Mis à jour le 09.07.2012 à 08h59

Par Hilde F. Johnson, représentante spéciale du Secrétaire général de L'ONU pour le Soudan du Sud.





Les connaisseurs en crises multiples doivent avoir savouré la première année du Soudan du Sud comme un Etat indépendant. Ils indiqueront aux défis innombrables du pays : la violence inter-communautaire endémique qui a provoqué la mort de centaines de personnes ; l'arrêt brusque de production de pétrole après une détérioration dans les relations avec son voisin du nord, le Soudan ; l'accompagnement d'une série de mesures de rigueur economique dures ; les allégations de corruption ; les hostilités frontalières avec le Soudan qui ont faille poussé les deux pays au bord d'une guerre totale. Personne n'a dit que ce serait facile. Mais loin des titres de presse couvrant des crises militaires, politiques, économiques et humanitaires, la Mission de Nations unies au Soudan du Sud (MINUSS) a tranquillement mais systématiquement accompagné les Soudanais du Sud et s'est associeé à eux pour affronter les défis majeurs du nouvel Etat.



Depuis son établissement le 8 juillet 2011, la mission a non seulement pris l'action décisive pour sauver les vies des civils, mais a retroussé ses manches pour soutenir des programmes d'un Etat moderne, le développement d'institutions et de gouvernance démocratiques. La MINUSS est mandatée pour protéger des civils "sous la menace imminente de violence physique." Son plus grand test s'est produit dans l'Etat de Jonglei, où les jeunes armés du groupe ethnique le Lou Nuer se sont rassemblé vers la fin de l'année dernière pour lancer des attaques de vengeance contre la communauté Murle.



Un rapport approfondie des droits de l'homme publié par la mission le mois dernier, indique que la MINUSS a tres tôt alerté le gouvernement du Soudan du Sud du movement de Lou Nuer avant son arrivée dans le centre de la communaute Murle en décembre dernier. La mission a alors mobilisé et ensuite déployé plus de la moitié de ses casques bleus dans la zone de l'attaque, Pibor. Des milliers de vies ont été sauvées par ses actions décisives et protectrices effectuées ensemble avec les forces armées du Soudan du Sud.



Ailleurs, dans les zones frontalières, les officiers de liaison militaires de la mission ont examiné et ont vérifié les violations rapportées de droit humanitaire international, en confirmant les bombardements répétés d'objectifs civils à l'intérieur du Sud-Soudan par des avions du Soudan en mars et avril. Une telle évidence a permis au Conseil de Sécurité d'appeler à une halte immédiate de toutes les attaques et a aidé à provoquer une cessation de facto d'hostilités le long de la frontière avec le Soudan.



Mais en plus du travail militaire entrepris, La MINUS s'est aussi concentrée sur des activités touchant à la construction de l'Etat. Nous avons préconisé la revue de la constitution du Soudan du Sud qui a permis la nomination de la Commission d'Examen Constitutionnelle Nationale. Ce processus est une occasion unique pour la construction de nation du Soudan du Sud car il fourni un forum pour toutes les communautés de toutes les conditions sociales. Cela ne devrait pas être oublié.



Comme chef de la mission de maintien de la paix, j'ai vivement recommandé aux dirigeants du Parti du Mouvement populaire pour la Liberation du Soudan du Sud et aux partis politiques d'opposition d'adopter une approche inclusive à l'élaboration d'une d'un projet de loi sur les partis politiques et la loi électorale. Aussi, l'Assemblée législative nationale a unanimement passé plus tard les deux projets de loi de législation. Ces processus sont essentiels pour construire une base pour une démocratie et un pluralisme politique au Soudan du Sud.



La sécurité et le secteur de la justice sont une autre pierre angulaire dans n'importe quel processus de construction d'un Etat moderne. Avec la PNUD, la MINUSS a soutenu les services de police du Soudan du Sud dans l'enregistrement de plus de 37 000 officiers. Ceci est essentiel pour la réforme et la professionnalisation de la police. À travers le pays, des centaines de policiers de L'ONU travaillent étroitement avec leurs homologues du Soudan du Sud pour développer l'îlotage. De plus, la MINUSS a facilité des missions de juges dans les villes éloignées du Soudan du Sud. Nous avons aussi fourni la formation aux officiers de l'armée sur le droit international et le respect des droits de l'homme.



La MINUSS est activement engagée dans la prévention de conflit et sa réduction. Pour promouvoir le processus de paix dans Jonglei, l'Etat le plus grand et le plus volatil du pays, la mission a opéré 1900 vols afin de faciliter les missions de leaders de l'Eglise, des représentants gouvernementaux et des représentants communautaires. Le processus a contribué à une réduction significative de la violence. La paix durable dans Jonglei est essentielle pour la stabilité au Soudan du Sud.



La tâche de construire une nation viable à partir de zero est particulièrement difficile quand le nouveau pays est, selon l'expression du président Salva Kiir Mayardit, "à la fin de chaîne de développement économique" et "au bas" de tous les indices de développement humain. En plus de cela ce sont les crises qui vont probablement aussi arriver en deuxième année de l'Etat souverain du Soudan du Sud . La mission continuera à supporter le Soudan du Sud dans ses moments de crises et nous renouvelons notre engagement de rester dans le pays le plus nouveau du monde.

Hilde F. Johnson, représentante spéciale du Secrétaire général de L'ONU pour le Soudan du Sud.

Washington envisage d'assister le Nigeria contre Boko Haram

Le Monde.fr avec AFP | 06.06.2012 à 10h54 • Mis à jour le 06.06.2012 à 10h54

Les Etats-Unis envisagent d'assister l'armée nigériane dans sa lutte contre le groupe islamiste Boko Haram. "Il s'agit d'une question interne récurrente au sein du gouvernement des Etats-Unis", a déclaré le secrétaire d'Etat américain chargé des affaires africaines, Johnnie Carson, à l'issue de deux journées d'intenses discussions avec des responsables nigérians dans la capitale américaine.



L'administration "tente de prendre une décision qui soit à la fois appropriée, sensée et utile", a-t-il ajouté. Washington n'a pas encore décidé de placer ou non le groupe sur sa liste noire des organisations terroristes.



PARTENARIAT ÉVENTUEL AVEC L'ARMÉE NIGÉRIANE



Des troupes nigérianes ont lancé une opération mardi dans un bastion du groupe islamiste à Maiduguri, dans le Nord, où des explosions et des tirs pouvaient toujours être entendus plus de trois heures après le début de leur intervention, ont indiqué des habitants. Maiduguri est considérée comme le berceau du groupe islamiste, qui se réclame des talibans afghans. L'armée a déclaré, mercredi, avoir tué au moins 16 militants de Boko Haram lors de cette opération.



Les discussions qui se sont tenues à Washington, dans le cadre de la commission binationale Etats-Unis–Nigeria, ont notamment porté sur la gouvernance et la coopération en matière de sécurité. Les Etats-Unis "sont prêts à étudier un éventuel partenariat avec l'armée nigériane", a indiqué lundi le numéro deux du département d'Etat américain, William Burns, à l'ouverture des débats, sans plus de précisions.

"Nous sommes tous inquiets des scènes de violences qui se répètent dans plusieurs régions du Nigeria et qui menacent de réduire à néant les avancées du pays", a-t-il ajouté.

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____MUDIAMBO Malongui Sartre, "Orphée noir", et le mouvement de la negritude. "la race ne devait pas être utilisée pour justifier le paternalisme et l’élitisme des Africains-américains et des Antillais en Afrique".

Sartre, "Orphée noir", et le mouvement de la negritude 23/03/2003



Reactions d'un groupe d'étudiants à l'introduction de Sartre dans un cours sur le panafricanisme



Par Paul Yange




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Manthia Diawara




Au début de son livre, "En quête d’Afrique", Manthia Diawara, professeur de littérature et de cinéma à New-York (Columbia) raconte la réaction d’un groupe d’étudiants à l’introduction du livre de Jean-Paul Sartre au cours "Introduction au panafricanisme".

Ouvrant son cours sur le livre de WEB Dubois "le monde et l’Afrique" (The World & Africa), (Du Bois fut un intellectuel afro-américain influent et un panafricaniste, voir la rubrique "Hommes illustres") Diawara se rendit compte que les réactions des étudiants au livre de Du Bois étaient agressives.

Un étudiant remis en cause l’idée même de panafricanisme en disant que "les africains étaient très différents d’un bout à l’autre du vaste continent et que les afro-américains comme les américains blancs étaient totalement ignorants des réalités africaines". Un autre accusa Du Bois et les autres panafricains de nourrir les mêmes intentions coloniales que les blancs, ajoutant que "la race ne devait pas être utilisée pour justifier le paternalisme et l’élitisme des Africains-américains et des Antillais en Afrique".



Jean Paul Sartre




Pour Diawara, les idées de Du Bois sur l’unité raciale sont particulièrement intéressantes si elles sont étudiées avec d’autres théories raciales et remises en perspective temporelle et spatiale avec elles : ces autres théories sont le nationalisme, la négritude, le mouvement afrocentriste, la thèse sartrienne du racisme antiraciste comme point de départ pour combattre le colonialisme et le paternalisme.

Diawara voulait savoir ce qu’il adviendrait de l’idée centrale de panafricanisme si elle était enseignée comme participant de l’histoire d’idées souvent contradictoires et pas seulement comme une succession d’événements et de figures historiques.

Le texte de Sartre "Orphée Noir" avait été écrit comme préface à "l’Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de la langue française", parue en 1948 sous la direction de Leopold Sedar Senghor. C’est l’essai le plus célèbre sur le mouvement de la négritude définissant notamment le concept pour le public occidental.

D’après Diawara, "Orphée Noir" a servi de révélations idéologiques traversant son groupe d’étudiants. Certains se sentaient galvanisés par l’appel de Sartre à une lutte commune au nom de l’humanisme universel alors que d’autre pensaient que ce mouvement vers l’universel vidait de sa substance la lutte noire, c’est à dire que Sartre diluait la signification de la négritude.



En quête d'Afrique




Le dernier jour de son cours, Diawara repris le sujet de "l’Orphée noir" de Sartre et demanda aux étudiants s’ils pensaient que cette œuvre avait sa place dans un cours sur le panafricanisme. Le débat fut aussi animé qu’au premier jour car la plupart des étudiants n’avaient pas changé de position, mais ils étaient devenus moins hostiles.

Cependant, au milieu du débat, une étudiante avoua qu’elle avait choisi le cours en raison du nom de Diawara qui "faisait" africain. "Tous les autres cours sur les Noirs et l’Afrique étaient enseignés par des professeurs blancs" dit-elle. Elle ne leur faisait pas confiance et avait voulu étudier avec un véritable africain pour voir. "et alors" demanda Diawara avec une pointe d’agacement. L’étudiante répondit : "Oh maintenant je comprends que les Blancs ne sont pas tous identiques. Avec plus de professeurs noirs comme vous, je ne ressens plus de méfiance vis-à-vis des professeurs blancs et de leur connaissance de l’Afrique. Je suis contente que vous nous ayez fait lire Sartre".

D'après Manthia Diawara, En quête d'Afrique, Editions Présence Africaine



http://www.grioo.com/info171.html

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