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lundi 21 novembre 2011

___Indépendances, trahison et rédemption : Judas dans le roman postcolonial. Figures du traître dans "Les Phalènes" de Tchicaya U Tam’si et "A Grain of Wheat" de Ngugi wa

Le traître, qui n’est ni un vrai allié, ni un ennemi déclaré, apparaît comme la figure de l’entre-deux par excellence. Son ambiguïté et, dans certains cas, son ambivalence, expliquent sa fortune en littérature et en font un objet d’étude particulièrement riche. Le traître fondateur de toute la mythologie du monde chrétien, Judas, reflète parfaitement cette complexité. Ernest Renan, avec ce style factuel qui lui est propre, résume assez bien la situation du « malheureux Juda de Kerioth » :

On prétendit que, du prix de sa perfidie, il avait acheté un champ aux environs de Jérusalem. Selon une tradition, il se tua. Selon une autre, il fit dans son champ une chute, par la suite de laquelle ses entrailles se répandirent à terre 1.

La version du suicide, qui est proposée dans l’Évangile de Matthieu, insiste sur la repentance du personnage même si ce dernier, contrairement à Pierre, ne cherche pas le pardon 2. Dans les Actes des Apôtres, au contraire, Judas s’est acheté un champ « avec l’argent du crime 3 ». Il ne se donne pas la mort, mais est frappé par Dieu et, à la suite d’une chute, « s’est rompu par le milieu du corps ».

À ces deux représentations contradictoires s’ajoute en outre l’idée, récurrente, que la trahison de Judas est nécessaire. En effet, sans ce personnage, le Christ ne peut accomplir son destin et les péchés de l’humanité ne peuvent être rachetés par son sacrifice : « il fallait que s’accomplît ce que le Saint Esprit, dans les Écritures, a annoncé d’avance, par la bouche de David, au sujet de Judas, qui a été le guide de ceux qui ont saisi Jésus 4. » La résignation du Christ et les paroles adressées à son disciple au moment de son arrestation confirment qu’il s’agit là d’une série d’événements voulus par Dieu et qu’il ne faut en aucun cas interrompre : « Mon ami, ce que tu es venu faire, fais-le 5. » Le canon du texte biblique a fixé l’ambivalence de la figure de Judas et les traditions qui se sont mises en place par la suite n’ont pu gommer cette polysémie originelle.

L’ambiguïté liée à ces trois facettes du traître biblique se retrouve dans sa postérité littéraire, et plus particulièrement dans le domaine postcolonial, autour de la question des indépendances. En effet, dans une Afrique « mal partie », pour reprendre le titre du fameux essai de R. Dumont 6, les jeunes nations ont besoin de se trouver des héros fondateurs, tout en prenant acte des dérives qui se manifestent rapidement et ternissent l’euphorie des premiers temps. Dans ce contexte inédit, des auteurs qui avaient construit leur œuvre autour de la perspective d’une libération nationale se trouvent confrontés à un dilemme qui concerne la portée politique et culturelle de leur travail. Comment fonder une mythologie nationale et non seulement ethnique, tout en prenant acte de cet échec de la décolonisation ? Les tensions politiques ont amené les auteurs à privilégier des figures problématiques, plus à même de refléter les contradictions à l’œuvre après les indépendances.

Judas, disciple mais traître, coupable mais repentant, trésorier du crime qui rend aux prêtres l’argent de la trahison, apparaît bien, dans des œuvres qui traitent du processus de décolonisation, comme la figure d’une Afrique qui hésite entre idéal démocratique et corruption généralisée. Dans Les Phalènes de Tchicaya U Tam’si 7 et A Grain of Wheat de Ngugi wa Thiong’o 8, écrivains et personnages n’ont pas encore choisi entre l’utopie et le chaos. Dans ces deux textes, des personnages de traîtres incarnent cet entre-deux, plaçant ainsi l’ambiguïté au cœur du roman.

Trahison et transition

Les dix-sept ans qui séparent A Grain of Wheat (première édition en 1967) des Phalènes (1984) induisent une différence de perspective. La dérive des nouveaux États indépendants est pressentie par Ngugi, mais quand Tchicaya publie son roman, elle s’est bel et bien confirmée. Le regard que portent ces deux auteurs sur le moment où tout a basculé les amène, autour de la figure de Judas, à dresser le bilan d’une époque révolue et à examiner les possibilités pour l’avenir.

L’œuvre romanesque de Tchicaya U Tam’si est construite comme un tout, racontant en quatre volumes (au lieu des trois initialement prévus) le passage « d’un monde à l’autre ». La publication des Cancrelats 9 n’aura lieu qu’en 1980 même si le projet, comme l’indique l’auteur dans un entretien reproduit par Michel Vincent, est antérieur à la vague des indépendances en Afrique de l’Ouest :

Je rêve d’écrire un romancero congolais. En préparation à cela, je me donne pour but d’écrire une trilogie – qui aurait dû se terminer sur une utopie, celle de l’indépendance, peut-être. Le premier volet est connu dès 1954. Je l’écris pendant deux ans et l’annonce dans la première édition du Mauvais sang. 10

Troisième roman de la série, Les Phalènes ne peut plus, compte tenu de la situation historique, être cette « utopie » initialement prévue. Pour reprendre les termes de Jean-Pierre Dozon, les nouveaux régimes, au Congo-Brazzaville comme ailleurs dans la région, téléscopent « certains registres d’État de droit et beaucoup d’autres d’État d’exception 11 ». Prosper, jeune homme éduqué à la mission qui peinait à trouver sa voie dans Les Cancrelats, est devenu le responsable du PPC (parti populaire congolais) pour le quartier de Poto-Poto à Brazzaville. La fin de l’indigénat, régime qui institutionnalisait l’inégalité entre Blancs et Noirs, fonctionne dans le récit comme un prélude à l’indépendance. Le traitement de cet événement majeur, qui mêle rumeurs et comparaisons incongrues, montre bien à la fois les attentes démesurées des « indigènes » et leur incompréhension face à ce nouveau statut qui leur est accordé :

On ne parle plus de la robe charleston mais de l’indigénat, qui n’est pas un nouveau modèle de robe. C’est quoi, d’ailleurs, l’indigénat ? C’est nous plus la crasse de tous les mépris, une crasse nauséabonde qui ne fait pas un bel habit à qui la porte. La fin, ça signifie nous sans cette couche de crasse. 12

Les élections qui suivent, marquées par de nombreux dysfonctionnements, préfigurent ce que sera l’État postcolonial tel que le lecteur le retrouvera dans Ces fruits si doux de l’arbre à pain 13, dernier roman de la tétralogie.

La première publication de A Grain of Wheat marque un tournant dans la carrière de James Ngugi, qui prendra par la suite le nom de Ngugi wa Thiong’o. La découverte en Angleterre du marxisme et surtout de l’œuvre de Franz Fanon l’ont amené à changer sa manière d’envisager l’engagement littéraire. Après l’espoir d’une culture syncrétique portée par Waiyaki, le héros de La Rivière de vie 14, et la chronique aux accents autobiographiques de Enfant ne pleure pas 15, l’écrivain kenyan propose un ouvrage militant dont l’intrigue se concentre sur les trois jours précédant la cérémonie dédiée à l’indépendance (Uhuru en swahili) dans le village de Thabai.

Ici, pas d’élections mais un processus d’épuration mené par des anciens guérilleros, le général R et Koina. Ces derniers ont un objectif bien précis, retrouver le traître qui a vendu leur chef, Kihika, aux autorités anglaises. Le personnage principal, Mugo, est considéré par les villageois comme un héros, mais le lecteur comprend au fil des réminiscences que cet orphelin qui a toujours vécu comme un étranger (« an outsider 16 ») est en fait le véritable traître. La sensation de jalousie ressentie autrefois devant le succès de Kihika s’est transformée en haine et a poussé Mugo à trahir ce héros de la résistance : « Cette pensée l’obsédait : elle l’emplissait d’une fureur froide, d’une colère sans larmes qui écrasait tout autre sentiment et l’empêchait de dormir 17. » Rongé par le remords, Mugo ne peut accepter les honneurs qui lui sont rendus par ses concitoyens, et avoue sa faute pendant la cérémonie de l’Uhuru, sauvant ainsi Karanja, personnage accusé à tort et sur le point d’être exécuté. L’ambiguïté du traître, qui est ici essentielle, s’effacera quelque peu dans le roman suivant de Ngugi, Petals of Blood 18, qui ne traite plus du passage d’un monde à l’autre mais bien de l’univers postcolonial dans tout ce qu’il a de détestable. Contrairement à Mugo le paysan, Munira l’instituteur transforme sa frustration en fanatisme et tente de se racheter, non en se sacrifiant mais en brûlant la maison de sa maîtresse.

L’acte de naissance de ces jeunes nations est entaché par des fautes, que celles-ci correspondent à une volonté de nuire ou à une erreur de jugement. Les manipulations électorales dans Les Phalènes et l’épuration qui se trompe de cible dans A Grain of Wheat pointent des écueils contre lesquels les États postcoloniaux se fracasseront. Des victimes expiatoires sont désignées et sacrifiées, mais la culpabilité est plus large et rejaillit sur tous. L’insécurité morale des personnages à la veille de l’indépendance est bien résumée par cette question que se pose Sophie, la sœur de Prosper : « Quand je me réveille, je me demande : “Qui a-t-on trahi ?” Et je ne sais pas pourquoi cette question me vient à l’esprit, et si elle a un rapport avec mon rêve 19. »

Le champ du sang

Les traîtres les plus détestables sont ceux qui n’écoutent que leur cupidité et leur désir de pouvoir sans éprouver le moindre remords. Ces personnages, que Ngugi représentera en ogres dans Devil on the Cross 20, sont les profiteurs qui forment la nouvelle élite politique et économique du pays. Ces traîtres sont des criminels et leur richesse est, dans bien des cas, le prix du sang. La cupidité de ces personnages est à mettre en parallèle avec ce champ acquis par Judas, selon les Actes des Apôtres, et qui a été rebaptisé pour mieux faire ressortir son lien avec le crime : « La chose a été si connue de tous les habitants de Jérusalem que ce champ a été appelé dans leur langue Hakeldama, c’est-à-dire, champ du sang 21. »

Karanja, l’ami d’enfance de Kihika accusé à tort de l’avoir trahi, est l’archétype de l’Africain qui a choisi le camp de l’homme blanc. Il se plaint du mépris dont il est l’objet – on l’envoie acheter de la viande pour les chiens alors qu’il est bibliothécaire –, mais il profite de sa place pour s’affirmer par rapport à ses collègues :

Mais en règle générale, Karanja préférait subir l’humiliation plutôt que de perdre la bonne réputation qu’il s’était faite auprès des blancs. Il vivait de cette réputation et du pouvoir qu’elle lui apportait 22.

Bien qu’innocenté du meurtre de Kihika, le jeune homme se rappelle à la fin du roman comment il a rejoint les « homeguards » après son arrestation et comment il a ainsi trahi nombre des siens :

Il effectua son premier travail revêtu d’une cagoule. Cette cagoule était un sac blanc qui recouvrait l’ensemble de son corps à l’exception des yeux. Pendant les opérations de contrôle, les gens passaient les uns après les autres devant l’homme cagoulé. D’un hochement de tête, l’homme cagoulé désignait ceux qui avaient des liens avec la rébellion Mau Mau 23.

Ngugi a lui-même appelé la guérilla Mau Mau « cet héroïque combat armé des paysans contre les forces d’occupation britanniques 24 » dans la préface d’une de ses pièces de théâtre. La trahison de Karanja, qui mine un combat juste, renforce la culpabilité du jeune homme.

Pas de guérilla dans Les Phalènes, le contexte est donc moins violent. Cela dit, des traîtres sont là qui tentent de rendre Prosper responsable d’une série de meurtres commis par des « hommes-panthères » à Brazzaville. Une fois découvert, Pambault, le traître qui a volé des cartes du parti pour les distribuer aux meurtriers, met Prosper en garde contre ses plus proches collaborateurs : « Ce n’est pas aujourd’hui qu’on a inventé Judas. Il n’est pas nécessaire d’être treize à table 25. »

Alors que Karanja perd son pouvoir avec le départ de l’homme blanc et que la figure de Jomo Kenyatta, premier président du Kenya, demeure sans tache à la fin du roman de Ngugi, le combat de Prosper pour un Congo libéré de l’influence occidentale est un échec. L’abbé Lokou, avatar fictionnel de Fulbert Youlou, qui dirigea le Congo-Brazzaville de 1960 à 1963, s’associe à l’Église pour abattre son ennemi et gagner les élections contre les rouges du PPC. Les autorités religieuses tentent de se servir de Sophie, la sœur de Prosper, qui accomplit des miracles – elle a guéri un enfant sur la route de Linzolo –, à des fins politiques. Le narrateur met en parallèle ceux qui crient « guéris-le » à la jeune femme et le peuple qui criait « crucifie-le » à Pilate 26. Le stratagème de l’abbé Nicéphore Evagre ne fonctionne pas plus que l’accusation des « hommes-panthères », mais il précise la menace que font peser les « philistins de la foule 27 ».

Prosper ne sera pas tué physiquement, l’assassinat politique dont il est la victime n’en est que plus cruel : son parti gagne les élections mais certains de ses candidats ont retourné leur veste, donnant ainsi la victoire à Lokou. Ainsi, un des proches de Prosper, Martial, celui-là même qui mettait en doute sa probité, est devenu « lokiste à bloc 28 ».

Les véritables cyniques sont rares dans ces deux romans qui se concentrent sur l’accession à l’indépendance, car les masques ne sont pas encore tombés et l’espoir demeure. La figure de Lokou, qui reste discrète dans Les Phalènes, sera associée à la luxure et au meurtre rituel dans Ces fruits si doux de l’arbre à pain. Pour le juge Raymond Poaty, qui cherche à faire respecter la justice dans le Congo postcolonial, la « gueule de bois 29 » a succédé à l’ivresse : « On s’est foulé les chevilles en dansant l’air de ce chant venu de Léo Léopoldville : Independa ! Cha-cha. »

Les possibles se ferment avec la mise en place de nouveaux régimes, l’ambiguïté se perd dans le renforcement des antagonismes. Chez Ngugi, du moins pour les romans qui ont immédiatement succédé à A Grain of Wheat , cette évolution s’est traduite esthétiquement par un retour en force de l’allégorie et une simplification de l’histoire :

Alors que dans les premiers romans Ngugi capte la complexité morale de la guerre historique, la lutte des Mau Mau, dans les travaux plus récents, est perçue comme l’expression ultime du combat mené contre la colonisation au Kenya : une lutte des classes contre l’oppresseur colonial 30.

Chez Ngugi, et dans une moindre mesure chez Tchicaya, l’affirmation d’un discours d’opposition à un régime poussera l’auteur à simplifier la figure du traître pour clarifier l’axiologie. Dans un pamphlet, Judas devient la cible, il focalise le dégoût et la haine. Cette nouvelle représentation sera incompatible avec une ambivalence du personnage.

Erreurs et remords : un héros trop humain

La fin de Judas telle qu’elle est mise en scène dans l’Évangile selon Matthieu nous montre avant tout un homme faible dont le principal tort est de ne pas attendre de pardon pour ses péchés. Cupide mais repentant, il rapporte l’argent du crime au temple et part se pendre : « Alors Judas, voyant qu’il Jésus était condamné, se repentit, et rapporta les trente pièces d’argent aux principaux sacrificateurs et aux anciens en disant : J’ai péché en livrant le sang innocent 31. »

Il semble que, dans certains cas, Ngugi et Tchicaya s’ingénient, non pas à justifier mais à expliquer l’attitude de certains traîtres qui inspirent plus de pitié que de dégoût. Pambault, le « débonnaire », fou d’amour pour Jeanne Bobala, sa « perle de Kin 32 », sombre dans une demi-démence après que celle-ci est partie avec un Blanc, le communiste Paul Vincent. Il ne trahit pas Prosper pour s’enrichir mais pour se venger parce qu’il rend son ami responsable de son malheur.

Le récit de l’enfance de Mugo, qui arrive dès le premier chapitre du roman, le présente d’abord comme une victime aux yeux du lecteur. Les premières années du jeune homme, orphelin recueilli par sa tante alcoolique Waitherero, ne semblent être qu’une suite d’humiliations et de brimades :

Plus elle s’affaiblissait, plus elle le haïssait. Quoi qu’il fasse, elle tournait ses efforts en ridicule. En conséquence, Mugo était hanté par l’image de sa propre inadéquation. Elle savait comment l’atteindre, en l’interrogeant par exemple au sujet de ses vêtements, de son visage, de ses mains, si bien que toute sa fierté s’effondrait 33.

La haine qu’éprouve Mugo envers le héros adulé de tous est résumée en une seule phrase : « Kihika avait tout, Mugo n’avait rien 34. » Le personnage, avant de trahir, éprouve un profond sentiment d’injustice, tant par rapport au héros de la résistance que vis-à-vis de la puissance coloniale qui menace son intégrité physique.

Ces premiers traîtres de la nation sont avant tout des individus qui ont été, d’une manière ou d’une autre, les victimes de l’ordre colonial et des mouvements de libération nationale. Contrairement aux nouveaux dirigeants, avides de pouvoir et de richesse, qui sombrent assez rapidement dans la caricature, ces anti-héros trahissent pour exister, pour ne plus être des étrangers (outsider) dans leur propre société. La mort de Pambault, comme celle de Mugo, met bien en valeur le changement qui s’opère chez le personnage. L’ancien ami de Prosper qui se faisait appeler « M. Dieudonné Jean-Marie Pambault le Débonnaire 35 » finit par demander le pardon de celui qu’il a trahi. Il rejette le prétentieux nom français qu’il s’était donné pour redevenir tout simplement « Mpambou 36 ». Alors qu’il est « moribond », son ton devient prophétique et sa parole, qui jusque-là se contentait de l’apparence, se fait révélation : « Si tu es venu, c’est que tu m’as pardonné. J’ai fait de ma vie un mensonge qui m’a fait vivre d’expédients jusqu’à la faute par faiblesse 37. » En remerciant Prosper pour son pardon, il définit son rôle en termes religieux, soulignant ainsi le caractère sacré de sa mission : « Tu es le prêtre dont j’avais le plus besoin 38. » Le retournement du traître, sa rédemption, permet une élévation de Prosper et une réhabilitation de Mpambou. La trahison avouée permet son propre dépassement et engage un processus de réconciliation nationale.

La confession publique de Mugo à la fin de A Grain of Wheat sauve Karanja in extremis. L’intervention, très courte, qui suit un discours du général R sur ce que doit être le nouveau Kenya indépendant, montre le courage retrouvé de ce personnage, ainsi que ses remords :

« Vous avez exigé Judas », commença-t-il, « Vous avez exigé l’homme qui a conduit Kihika jusqu’à cet arbre-ci. Cet homme se tient à présent devant vous. Kihika est venu me voir de nuit. Il a mis sa vie entre mes mains et je l’ai vendu à l’homme blanc. Et cet acte a rongé ma vie pendant toutes ces années 39. »

L’enchaînement de ces phrases courtes est d’une efficacité redoutable. Le public réclame une victime sacrificielle, Karanja correspond exactement à ce profil, mais au lieu du traître désigné, c’est le nouveau héros du village qui monte à la tribune. Dans cette scène, climax du roman, Ngugi met en garde son lecteur contre la facilité avec laquelle la communauté peut se mettre du sang innocent sur les mains, quand bien même elle cherche à se purifier.

La question de la trahison se retrouve à tous les niveaux. Prosper, qui est pourtant comparé au Christ par sa sœur, se voit parfois en traître, parce qu’il trompe sa femme avec une Blanche, Aimée Volange, ou parce qu’il a francisé son nom, Mpobah, en devenant Pobard 40. Le traditionaliste Pierre Tchiloangou, qui apparaît le temps d’une conférence sur « Hier dans les pas de demain » et pose le problème de l’indépendance sans vraiment le résoudre, décrit ainsi la trahison des intellectuels qui s’éloignent de leur culture : « Tu sais que tu ne seras jamais un blanc. Pourquoi tous tes efforts te poussent seulement à apprendre sa langue, ses habitudes de vivre et de penser, c’est pour devenir un jour quoi ? Son ombre 41 ? »

Cette dernière forme de trahison est essentiellement involontaire pour l’indigène dit « évolué », selon la terminologie coloniale. La figure de Judas présentée alors, figure absente du monde paysan de Ngugi, met en scène des personnages qui ne maîtrisent pas leur destin et tentent tant bien que mal de faire coïncider leur éducation avec leurs aspirations. L’accession à l’indépendance n’est pas, chez nos deux auteurs, l’épopée d’un seul homme, et ces traîtres qui s’ignorent représentent bien l’insertion de la trahison dans un schéma plus large, un grand dessein qui concerne l’avenir de la nation.

L’instrument de la Providence

Le troisième visage de Judas que nous avons évoqué en introduction est de loin le plus important : il est un instrument entre les mains de Dieu pour permettre la mort du Christ et la rémission des péchés. L’idée d’accomplissement est présente de manière explicite, notamment dans les Actes des Apôtres : « il fallait que s’accomplît ce que le Saint Esprit dans les Écritures, a annoncé d’avance, par la bouche de David, au sujet de Judas, qui a été le guide de ceux qui ont saisi Jésus 42. »

Dans cette perspective, afin de déterminer si les traîtres ont bien le même statut de nécessité que le personnage biblique, il importe de savoir si la mort des héros christiques était bien nécessaire. La « crucifixion » de Kihika 43 peut être vue comme une application directe du « grand sacrifice 44 » demandé par le personnage lui-même lors d’un de ses discours : « Un jour viendra, le frère abandonnera le frère, la mère son fils, le jour où vous et moi nous entendrons l’appel d’une nation tourmentée. » Plus généralement, le narrateur évoque au second chapitre toute une série de héros nationaux qui ont résisté à l’envahisseur occidental, lignée continuée symboliquement par Kihika. Waiyaki, premier leader anti-colonialiste qui fut enterré vivant la tête en bas, est décrit comme une source d’inspiration pour le mouvement Mau Mau 45. Conformément à l’épigramme tiré de la première épître aux Corinthiens qui donne son titre à l’œuvre, le sacrifice est bien un passage nécessaire pour préparer la renaissance : « Insensé ! ce que tu sèmes ne reprend pas vie s’il ne meurt. »

Une citation biblique précède également le prologue des Phalènes, cependant la métaphore du sel, tirée de Matthieu, implique une orientation différente :

Car tout homme est salé de feu. Le sel est une bonne chose : mais si le sel devient sans saveur, avec quoi l’assaisonnerez-vous ? Ayez du sel en vous-mêmes et soyez en paix les uns avec les autres.

La mort de Prosper est politique et non physique. La métaphore paulinienne du grain est renversée, et c’est la persistance de l’espoir, non le sacrifice, qui porte la possibilité d’un changement : « Ne battez pas avec tant de force le grain, si c’est celui des semailles, car s’il casse, comment fera-t-il pour germer, croître et fructifier 46 ? » Cette ambiguïté du sacrifice, qui est beaucoup moins nette dans des recueils de poésie comme Le Ventre 47 ou Epitomé 48, marque sans doute également la longue période qui sépare la publication des deux romans qui nous intéressent ici. Le sacrifice a eu lieu, notamment par la mort de Patrice Lumumba au Congo-Kinshasa, mais il a été inefficace et l’utopie est rejetée dans un futur incertain.

Le cas de Kihika lui-même, malgré l’adoration que lui vouent ses soldats et les villageois, n’est pas sans révéler un fanatisme inquiétant. Le guérillero propose sa propre lecture des Évangiles : « On te frappe sur la joue gauche. Tu tends la joue droite. Un, deux, trois – soixante ans. Coincé dos au mur, tu frappes à ton tour 49. » Celui qui tue froidement le « District Officer » Thomas Robson est un homme précieux en temps de guerre. Il est légitime de se demander ce qu’il serait advenu d’un tel personnage dans un Kenya démocratique. Quelques années plus tard, dans Detained 50, texte qui raconte son emprisonnement dans les geôles de l’État pour raisons politiques, Ngugi proposera une lecture de son roman comme un texte prophétique qui fait de Kihika un double du futur dictateur kenyan. Le personnage représenterait « un indice concernant le développement possible d’un nouveau Kenyatta 51 ». Sans aller jusqu’à confirmer une attaque aussi précise alors que Kenyatta vient à peine d’accéder au pouvoir, des critiques comme Jacqueline Bardolph ont bien perçu les problèmes posés par ce nouveau héros national : « Qu’est donc ce maître, ce prophète, ce Messie qui accuse tant les autres ? Est-il sûr de parler au nom des siens 52 ? »

En trahissant Kihika, Mugo lui a permis de garder à jamais son corps glorieux de héros. La figure de l’abbé Lokou représente dans Les Phalènes ces pères de la nation qui, après s’être posés en libérateurs et en messies, écrasent impitoyablement toute forme d’opposition. Aux prophètes et résistants évoqués par Ngugi fait d’ailleurs écho le prophète « André », André Matsoua (1899-1940), dont se réclame Lokou 53. Ce syndicaliste arrêté à plusieurs reprises par les Français est à l’origine, bien malgré lui, d’un mouvement religieux. Les ressortissants de l’ethnie lari votent même majoritairement pour lui en 1945 alors qu’il est mort depuis cinq ans ! C’est justement, encore une fois, la disparition du personnage qui est à l’origine de sa légende.

Renaissances et rédemption

La disparition pure et simple ne suffit pas, elle doit être suivie d’une résurrection. L’acceptation et le dépassement de la trahison sont associés dans les deux dénouements à une ou à plusieurs naissances. Prosper, qui a déjà deux enfants, est de nouveau père, à deux reprises, dans les dernières pages du roman. Sa femme légitime, Juliette, a un garçon qu’elle prénomme Thomas 54. Sa maîtresse blanche, Aimée, donne naissance, elle, à une fille, Marie-Antoinette 55. L’acte de baptême des nourrissons est ici hautement significatif, puisque par eux, ce sont les parents de Prosper et Sophie qui renaissent. Dans le trouble qui suit l’échec aux élections, Prosper « rend grâce à Aimée Volange de lui ressusciter sa mère sans le savoir 56 ». Ce passage répond à la critique formulée par Juliette dans Les Cancrelats, au moment où elle apprend que sa nièce, Léa, ne porte pas le nom de sa grand-mère : « En voilà des façons ! N’avoir même pas ressuscité un mort 57 ! » Ce sont ainsi les personnages du premier roman de Tchicaya qui reviennent à la vie. Thom’Ndundu et Mbiya Marie-Antoinette se réincarnent ainsi en quelque sorte dans leurs petits-enfants.

Le retour symbolique des ancêtres, associé à la question du métissage, relie les univers « pré- » et « post- » coloniaux, permettant ainsi de faire ressurgir la possibilité d’une utopie. Comme dans le schéma christique, c’est la trahison, dans ce cas l’adultère, qui amène la résurrection. La toute dernière section de A Grain of Wheat est intitulée « Harambee », terme qui figure dans la devise du Kenya et qui signifie en swahili « tous ensemble ». Le narrateur se désintéresse de Mugo qui, réconcilié avec lui-même, a accepté son sort. Abandonnant ce personnage, qui va vraisemblablement être exécuté, c’est sur une des histoires parallèles que se concentre cet épilogue, celle qui concerne le couple Gikonyo-Mumbi. La jeune femme a eu un enfant de Karanja pendant que son mari était prisonnier dans les camps et ce dernier ne le lui a pas pardonné. Cloué dans un lit d’hôpital après un accident, Gikonyo le menuisier repense son comportement à la lumière des actes de Mugo :

Qu’est-ce qui le différenciait de Karanja, de Mugo ou de ceux qui avaient ouvertement trahi leur peuple et travaillé pour l’homme blanc afin de se sauver ? Mugo avait eu le courage d’assumer sa culpabilité et de tout perdre 58.

Le motif qu’il décide finalement d’adopter pour le tabouret qu’il souhaite sculpter et offrir à sa femme symbolise la réconciliation qu’il va désormais rechercher. C’est sur ces mots que s’achève le roman : « Je vais modifier la figure féminine. Je sculpterai une femme ronde – ronde parce qu’elle porte un enfant 59. » Comme pour Tchicaya, le parcours qui mène du traître à la femme gravide introduit une touche d’espoir dans ces tableaux plutôt sombres des indépendances. Judas, au milieu de ces bouleversements, est un maillon de la chaîne, un personnage coincé entre deux époques, qui ne verra pas le monde qu’il a contribué à construire.

La mort du Christ et sa résurrection ont permis d’effacer les péchés du monde. De la même manière, le motif de la naissance dans les deux romans est associé à une forme de rédemption. L’adultère de Prosper avec Aimée Volange est synonyme d’ouverture et de métissage en même temps qu’il éloigne le spectre de l’inceste avec Sophie. Les dernières pages du roman de Ngugi, notamment par le jeu sur les noms, suggèrent un retour à l’harmonie des origines. Gikonyo et Mumbi rappellent en effet étrangement Gikuyu et Moombi, premier homme et première femme dans la mythologie Gikuyu :

Gikuyu agit comme lui a ordonné le Mogai Dieu suprême et, atteignant l’endroit désigné, il y trouve une très belle femme qu’il appelle Moombi. Ils vivent heureux ensemble, ils ont neuf filles mais aucun fils 60.

Une rédemption uniquement personnelle n’aurait qu’une valeur limitée. L’important n’est pas que Mugo, Prosper ou Gikonyo soient pardonnés, mais que le poids de leurs erreurs ne pèse pas sur les générations à venir. La trahison de Judas redouble et annule le péché originel qui, dans le contexte postcolonial, correspond aux accords entre les élites locales et les premiers colons blancs. Jomo Kenyatta, dans son ouvrage Au Pied du mont Kenya, résume le tour de passe-passe qui a permis l’installation des Anglais de la manière suivante : « Les Gikuyus réalisèrent alors avec amertume que les étrangers auxquels ils avaient accordé l’hospitalité avaient projeté de les dépouiller et de les soumettre par la force 61. » Avec la naissance d’enfants n’ayant jamais connu le joug colonial, les générations perdues donneraient naissance à une génération sauvée, capable de retrouver la pureté toute relative des temps précoloniaux.

Les romans du « désenchantement », d’Achebe à Kourouma, tendent à prouver que cette promesse de renouvellement ne s’est pas réalisée. De nouveaux traîtres apparaissent, dictateurs ou profiteurs, qui ont perdu l’ambiguïté de Pambault et de Mugo. Il est d’ailleurs important de constater que, si la maternité continue à jouer un rôle essentiel dans les romans de Ngugi, Marie-Antoinette et Thomas disparaissent totalement du dernier roman de Tchicaya, Ces fruits si doux de l’arbre à pain. C’est un autre fils de Prosper, Paulin, qui, devenu un fin politicien, incarnera le retour des vieux démons dans une Afrique devenue indépendante.

Bibliographie

La Sainte Bible, traduction de Louis Second, Alliance biblique française, 1963. Bardolph, Jacqueline, Ngugi wa Thiong’o, l’homme et l’œuvre, Présence Africaine, 1991. Dozon, Jean-Pierre, L’Afrique à Dieu et à Diable, États, ethnies et religions, Ellipses 2008. Dumont, René, L’Afrique noire est mal partie, Seuil, 1962. Goedert, Dominique, La Religion et le sacré dans l’œuvre poétique et romanesque de Tchicaya U Tam’si, thèse de troisième cycle, Paris 12, 1987. Ngugi wa Thiong’o, A Grain of Wheat, Heinemann, 1986. Ngugi wa Thiong’o, Detained, a Writer’s Prison Diary, East African Educational Publishers, 1981. Ngugi wa Thiong’o, Devil on the Cross (première édition en Gikuyu : Heinemann, 1982), « African Writers Series », 1985. Ngugi wa Thiong’o, Enfant ne pleure pas, traduit de l’anglais par Yvon Rivière, Hatier, 1983. Ngugi wa Thiong’o, Petals of Blood, Heinemann, « African Writers Series », 1977. Ngugi wa Thiong’o, La Rivière de vie, traduit de l’anglais par Julie Senghor, Présence Africaine, 1988. Ngugi wa Thiong’o, The Trial of Dedan Kimathi (1976, avec Micere Mugo), Heinemann Kenya Limited, 1986. Ogude, James, Ngugi’s Novels and African History : Narrating the Nation, Pluto Press, 1999. Renan, Ernest, Vie de Jésus, Gallimard, 1974. Sharma, Govind Narain, « Ngugi’s Christian Vision : Theme and Pattern in A Grain of Wheat », African Literature Today, n° 10, Freetown, Sierra Leone, 1979, p. 167-176. U Tam’si, Tchicaya, Les Cancrelats, Albin Michel, 1980. U Tam’si, Tchicaya, Ces fruits si doux de l’arbre à pain, Seghers, 1987. U Tam’si, Tchicaya, Épitomé, P.J. Oswald, Collection « L’aube dissout les monstres », 1970. U Tam’si, Tchicaya, Les Phalènes, Albin Michel, 1984. U Tam’si, Tchicaya, Le Ventre, Présence Africaine, 1964. Vincent, Michel, Le Monde romanesque de Tchicaya U Tam’si, Éditions nouvelles du Sud, 1994.

Haut de la page 1 Renan, Ernest, Vie de Jésus, Gallimard, 1974, p. 412-413.

2 La Sainte Bible, traduction de Louis Second, Alliance biblique française, 1963, Évangile selon Matthieu, 27, 6.

3 La Sainte Bible, Actes des Apôtres, 1, 15.

4 La Sainte Bible, Actes des Apôtres, 1, 16.

5 La Sainte Bible, Évangile selon Matthieu, 26, 50.

6 Dumont, René, L’Afrique noire est mal partie, Seuil, 1962.

7 U Tam’si, Tchicaya, Les Phalènes, Albin Michel, 1984.

8 Ngugi wa Thiong’o, A Grain of Wheat, Heinemann, 1986.

9 U Tam’si, Tchicaya, Les Cancrelats, Albin Michel, 1980.

10 Vincent, Michel, Le Monde romanesque de Tchicaya U Tam’si, Éditions nouvelles du Sud, 1994, p. 7.

11 Dozon, Jean-Pierre, L’Afrique à Dieu et à Diable, États, ethnies et religions, Ellipses, 2008, p. 50.

12 Les Phalènes, p. 73.

13 U Tam’si, Tchicaya, Ces fruits si doux de l’arbre à pain, Seghers, 1987.

14 Ngugi wa Thiong’o, La Rivière de vie, traduit de l’anglais par Julie Senghor, Présence Africaine, 1988.

15 Ngugi wa Thiong’o, Enfant ne pleure pas, traduit de l’anglais par Yvon Rivière, Hatier, 1983.

16 A Grain of Wheat, p. 7.

17 A Grain of Wheat, p. 195 : « This thought obsessed him ; it filled him with a foamless fury, a tearless anger that obliterated other feelings and made him unable to sleep. » Les traductions sont de nous sauf précision.

18 Ngugi wa Thiong’o, Petals of Blood, Heinemann, « African Writers Series », 1977.

19 Les Phalènes, p. 185.

20 Ngugi wa Thiong’o, Devil on the Cross (première édition en Gikuyu : Heinemann, 1982), « African Writers Series », 1985.

21 La Sainte Bible, Actes des Apôtres, 1, 19.

22 A Grain of Wheat, p. 37 : « But on the whole Karanja would rather endure the humiliation than lose the good name he had built up for himself among the white people. He lived on that name and the power it brought him. »

23 Ibid., p. 230 : « His first job was in a hood. The hood was a white sack – covered all his body except his eyes. During the screening operations, people would pass in queues in front of the hooded man. By a nod of the head, the hooded man picked out those involved in Mau Mau. »

24 The Trial of Dedan Kimathi (1976, avec Micere Mugo), Heinemann Kenya Limited, 1986, « this heroic peasant armed struggle against the British Forces of occupation ».

25 Les Phalènes, p. 164.

26 Ibid., p. 217.

27 Ibid., p. 217.

28 Ibid., p. 249.

29 Ces fruits si doux de l’arbre à pain, p. 30.

30 Ogude, James, Ngugi’s Novels and African History : Narrating the Nation, Pluto Press, 1999, p. 13, « Whereas in the earlier novels Ngugi captures the moral complexity of the historic war, in the later works the Mau Mau war is singularly seen as the ultimate expression of Kenya’s anticolonial struggle – a class war against the colonising oppressor. »

31 La Sainte Bible, Évangile selon Matthieu, 27, 3.

32 Les Phalènes, p. 33.

33 A Grain of Wheat, p. 7 : « The more feeble she became, the more she hated him. Whatever he did or made, she would deride his efforts. So Mugo was haunted by the image of his own inadequacy. She had a way of getting at him, a question maybe, about his clothes, his face, or hands that made all his pride tumble down. »

34 A Grain of Wheat, p. 195 : « Kihika had everything, Mugo had nothing. »

35 Les Phalènes, p. 30.

36 Ibid., p. 192.

37 Ibid., p. 196.

38 Ibid.

39 A Grain of Wheat, p. 223 : « ‘You asked for Judas’, he started. ‘You asked for the man who led Kihika to this tree here. That man stands before you now. Kihika came to me by night. He put his life into my hands, and I sold it to the whiteman. And this has eaten into my life all these years. »

40 Les Phalènes, p. 198.

41 Ibid., p. 119.

42 La Sainte Bible, Actes des Apôtres, 1, 16.

43 A Grain of Wheat, p. 28.

44 Ibid., p. 15 : « great sacrifice », « A day shall come when brother shall give up brother, a mother her son, when you and I have heard the call of a nation in turmoil ».

45 Ngugi rapporte cette anecdote au second chapitre et la relie directement à la métaphore de la germination : « Sur le moment, nul ne le remarqua. Cependant, en nous tournant vers le passé nous pouvons constater que le sang de Waiyaki contenait une semence, une graine, qui, par la suite, donna naissance à un mouvement qui tira l’essentiel de sa force d’une union avec le sol. » Ceci donne, dans le texte original : « Then nobody noticed it ; but looking back we can see that Waiyaki’s blood contained within a seed, a grain, which gave birth to a movement whose main strength thereafter sprang from a bond with the soil. », p. 12.

46 Les Phalènes, p. 28.

47 U Tam’si, Tchicaya, Le Ventre, Présence Africaine, 1964.

48 U Tam’si, Tchicaya, Épitomé, P.J. Oswald, Collection « L’aube dissout les monstres », 1970.

49 A Grain of Wheat, p. 191 : « You are struck on the left cheek. You turn the right cheek. One, two, three – sixty years. Your back to the wall, you strike back. »

50 Ngugi wa Thiong’o, Detained, a Writer’s Prison Diary, East African Educational Publishers, 1981.

51 Ibid., p. 90, « a hint at the possibilities of a new Kenyatta ».

52 Bardolph, Jacqueline, Ngugi wa Thiong’o, l’homme et l’œuvre, Présence Africaine, 1991, p. 120.

53 Les Phalènes, p. 228.

54 Ibid., p. 246.

55 Ibid., p. 242.

56 Ibid., p. 243-244.

57 Les Cancrelats, p. 244.

58 A Grain of Wheat, p. 245 : « What was the difference between him and Karanja or Mugo or those who had openly betrayed people and worked with the whiteman to save themselves ? Mugo had the courage to face his guilt and lose everything. »

59 Ibid., p. 247 : « ‘I’ll change the woman’s figure. I shall carve a woman big – big with child.’ »

60 Kenyatta, Jomo, Au Pied du mont Kenya, traduit de l’anglais par G. Marcu et P. Balta, Maspero, Paris, 1960, p. 31.

61 Ibid., p. 62.

http://trans.univ-paris3.fr/spip.php?article473

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jeudi 17 novembre 2011

_____If you don't come to Democracy... Democracy will come to you. « Cosmologiquement, l'être humain est ambivalent, à la fois susceptible de développer l'âme individuelle, et nourri à l'inconscient collectif qui prévaut chez les animaux.»

Mercredi 23 mars 2011

..Aux pays des scélérats, ils faut bien d’autres scélérats pour rapporter la pitance

Tu m’aimes ou je te butte !

http://ploutopia.over-blog.com/article-tu-m-aimes-ou-je-te-butte-70020983.htmlac

Tu m’aimes ou je te butte !




http://ploutopia.over-blog.com/article-tu-m-aimes-ou-je-te-butte-70020983.html

Alors, ça y est, les vas-t-en guerres sont partis ! Dassault va pourvoir tester ses avions Rafale en live ( top kiss cool, yeah! ), l’industrie de l’armement va s’en fourrer plein les fouilles, les petits Belges vont jouer dans la cours des grands alors qu’ils n’ont même pas de gouvernement, Sarko va montrer ses biscotos et son gros doigt (encore, il adore, il jubile !), France et Grande Bretagne vont pouvoir récupérer un peu de came noire... Nous voilà repartis pour une nouvelle « guerre chirurgicale » SANS victimes civiles (Si, si, vous z’en faites pas, ça marche !). Nous allons revoir ces images sombres piquées de flash et rayons lumineux sur nos écrans, suivies de discours léonins d’hommes en uniforme garni de médailles sur la précision et la haute technologie de nos frappes. Après les épisodes Vietnam, Yougoslavie, Irak, Afghanistan, enfin la suite de notre télé réalité favorite.




Il y a quelque temps encore, on entendait des débats radio et télé sur les bonnes armes et les mauvaises armes.

Voilà, c’est simple non ? ». « Ah oui, j’oubliais, tu dois savoir que ceux qui décident qui sont les gentils et les méchants, ce sont les fabricants de fusils, et eux, ils sont toujours forcément gentils ».




Montrer sa puissance et sa force.

Diaboliser celui qu’on attaque pour faire passer la pilule.

Classer l’histoire en gentils et méchants, bon et mauvais. Les répressions en Arabie Saoudite, Barheïn ou Palestine, on passe l’éponge. Par contre, ce qui se passe en Libye c’est franchement scandaleux ! « Il massacre des civils, tu te rends comptes! » En sommes nous si sûr ???




Je conseille vivement la lecture de quelques articles sur michel-collon.info ou sur Emceebeulogue pour nuancer un peu tout ce qu’on entend. Lire par exemple Cinq remarques sur l’intervention contre la Libye




Kadhafi est clairement un tyran, mais il est toutefois intéressant de noter qu’il a nationalisé son pétrole au détriment des grandes firmes pétrolières et ..pour un meilleur niveau de vie qu’en Tunisie ou en Egypte par exemple.

N’oublions pas non plus que Ben Ali, Ben Laden, Moubarak, Saddam ou Kadhafi (pour ne citer qu’eux) étaient des grands potes de l’occident !

Aux pays des scélérats, ils faut bien d’autres scélérats pour rapporter la pitance. Non vraiment, tout n’est pas noir ou blanc. Il est important de bien comprendre les enjeux sans jamais tomber dans le piège mensonger de l’humanitaire,

...du soutien de la démocratie et des droits de l’homme proféré par nos politiques impériales shootées à la consommation.




Ca me fait penser à une phrase entendue d’un gamin de 6 ans s’adressant à sa copine: « Tu m’aimes ou je te butte ! ».

Ou encore, « Il est interdit d’interdire ».

Ou encore cette phrase dans le sketch des inconnus avec Jésus qui cogne tout le monde dans la foule et qui termine en disant : « Vous allez finir par vous aimer les uns les autres bordel de merde ! ».

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