_____Afrique culture :Amputé de son bras par les tueurs à gages envoyés par les sorciers, "Manger le sexe des albinos ne fait pas gagner les élections" Matatizo Dunia veut dire "Malheur Chance". Fondation Salif Keïta pour les albinos
Par http://www.777-mafia.com/us/home, vendredi 30 mars 6666 à 11:53 :: ******VIE ESTUDIANTINE*****Betou mé yamb’ ngue na Congo ! (munukutuba) :: #3318 :: rss
Dans la région de Bukombe en Tanzanie, Matatizo Dunia passe pour un chanceux. Cet albinos a été amputé de son bras par les tueurs à gages envoyés par les sorciers, en décembre 2008. Des mois après et un peu plus au nord, sur les rives du Lac Victoria à Mwanza, des pêcheurs apprennent par la radio que des assassins d'un kitokatoka (albinos en swahili) viennent d'être fortement condamnés par les tribunaux. Ils boivent des bières et lancent des blagues salaces à propos du nom de la victime.
Littéralement, Matatizo Dunia veut dire "Malheur Chance". Ses parents ne voulaient sans doute que protéger leur fils, quand ils l'ont nommé ainsi. Pour conjurer le mauvais sort, la tradition dit ici qu'il faut anticiper l'appel du malheur pour l'éloigner...
Nous sommes en effet dans une société où il ne fait pas bon naître la peau et les yeux dépigmentés. Ce que disent ces pêcheurs ivres, beaucoup parmi les élites le croient, soutiennent en cachette que des potions à base d'organes d'albinos procurent fortune et chance électorale, pouvoir et vitalité sexuelle.
Depuis 2006, principalement au Burundi et en Tanzanie, plus de 50 albinos ont été assassinés, des dizaines d’autres mutilés. La tête, les membres et les parties génitales coupés et emportés chez des sorciers.
La situation s'est calmée entre temps, le dernier crime officiellement signalé en Tanzanie datant de mars 2008. "Pas totalement, ici et là dans les villages, des embuscades et des mutilations sont signalées. Mais les albinos vivent dans la peur. Le plus difficile sera de retourner vivre chez nous", tempère le leader d'une association nouvelle dédiée aux victimes. "Mais quelque chose a irrémédiablement changé, conclut-il. Les gens commencent à comprendre que nous pouvons être défendus, que celui qui tue un albinos ne dormira jamais tranquille ».
Des médias engagés contre les sorciers. "Même si les fausses croyances demeurent intactes, nous nous sommes levés, le monde entier nous a encouragé pour dire que personne n'a le droit de nous tuer", estime un des responsables de la principale association tanzanienne (TAZ) des albinos, qui est l'un des rares du pays à avoir poussé les études jusqu'à l'université.
D'après lui, il y avait avant la mobilisation des sacrifices, évoqués de temps en temps dans les médias locaux, dans la rubrique des faits divers. "En fait, poursuit-il, ça ne faisait que renforcer les mythes autour du pouvoir surnaturel que nous sommes supposés posséder. Aucune punition, aucune dénonciation importante des rituels".
Depuis 2008, grâce à la maturité des associations de défense des droits de l'Homme ainsi qu'à leur insertion dans les réseaux internationaux, les médias et Internet se sont appropriés la question. C'est vite devenu une affaire prioritaire sur l'agenda politique et diplomatique. Depuis la tribune des Nations Unies à New York, on dénonce, on condamne.
La jeune ministre française des Droits de l'Homme se précipite au Burundi, débourse sur place 20 000 € pour un asile temporaire à la frontière tanzanienne. La photo en plan poitrine sur laquelle elle tient un enfant albinos a circulé dans toutes les gazette locales, brisé des frontières psychologiques dans des sociétés où beaucoup fuient toujours le contact physique avec un albinos. "Les autorités ont été mises dans l'obligation de nous protéger. Par ailleurs, on a senti un changement effectif dans le rapport quotidien que les gens ont avec nous", analyse le responsable associatif tanzanien.
Education. James de Butombe, infirmier de profession et cousin d'albinos qu'il ne quitte plus par peur des dangers, explique: "Pour réussir la guerre contre les sorciers et les assassins, il faut éduquer leurs clients, les grands commerçants et les hommes politiques, leur expliquer que manger le sexe des albinos ne fait pas gagner les élections, que c'est une connerie. Ensuite, il faut aider ces enfants à aller à l'école, à devenir des grands hommes ».
Même avis de Mokosi qui enseigne les sciences sociales à l'Université de Dar-es-Salam: "Il faut que nos sociétés apprennent à voir des albinos comme des gens normaux. Il faut lever tout ce qui les empêche d'aller à l'école, de travailler, de faire des affaires".
Le plus célèbre des albinos africains, le virtuose musical Salif Keita joue sur ce sujet un rôle incommensurable. Sa fondation agit concrètement, matériellement, pour protéger les personnes menacées, et propose de soutenir la recherche afin d'améliorer le bien-être quotidien des albinos. "Salif Keita est aussi notre symbole, affirme un fan de Mwanza en Tanzanie. Son charisme et sa médiatisation rendent, aux yeux de la société, notre corps plus familier, plus humain et moins étranger".
Prudence, persévérance. Les albinos engagés savent pourtant que la lutte sera dure. Après la compassion, les lunettes, les crèmes et autres biens récoltés ces derniers mois via la mobilisation humanitaire, le plus dur doit être pour eux de pouvoir mener une vie normale, retourner chez eux, et non vivre reclus dans les villages où les autorités les ont rassemblés pour les protéger des assassinats.
Lydia, une albinos du pays devenue Française, est venue en repérage pour son futur documentaire. Elle insiste pour que le problème soit attaqué dans son ensemble: "Il faut accompagner les familles et leur entourage. Nous avons décidé de nous lever nous-mêmes pour témoigner, car nous savons que l'exclusion commence dès notre propre famille. On sait que beaucoup d'infanticides existent, dans les villages, des familles qui rejettent des bébés albinos par peur de subir le mauvais sort".
Elle reste prudente quant aux récentes condamnations des individus accusés d'avoir tué des albinos en Afrique de l'Est. "Ceux qu'on condamne, ce sont les petits bras, des tueurs à gages. Mais tous le monde sait que les commanditaires sont des grands sorciers, leurs clients des hommes riches, capables de débourser des dizaines de milliers de dollars pour un bras d'albinos. Personne ne peut toucher les commanditaires, apparemment".
Dans les deux pays, le Burundi et la Tanzanie, de lourdes condamnations, près d'une vingtaine au total, ont été prononcées ces derniers mois, dont des peines capitales. L'opinion locale a applaudi. Etes-vous d'accord avec ces peines de mort, Monsieur le représentant des albinos de la région de Mwanza? Réponse catégorique: "Personnellement, je rejette la pendaison. Son sens, dans le contexte actuel, est celui-ci: si on tue pour sauver ou réparer des albinos, il s'agit de légitimer d'une certaine manière le sacrifice, tuer pour expier... C'est alimenter le fondement des croyances qui nous menacent!"
Le phénomène des crimes rituels a particulièrement été signalé dans des régions est-africaines naguère prospères et aujourd'hui sérieusement touchées par la détérioration des sols et de l'économie lacustre.
A la veille des élections générales prévues en Tanzanie en octobre 2010, les notables politiques préfèrent alimenter des rumeurs et des croyances surnaturelles en lieu et place des projets de société viables. "Ce qui fait le plus peur, s'inquiète Jumapili, albinos de 30 ans, c'est que des gens importants continuent de solliciter des sorciers. On dit même que les prix des potions ont grimpé ces derniers jours".
La vigilance devrait redoubler également au Burundi voisin où des élections très tendues sont prévues dans moins de 3 mois. A bientôt.
Plusieurs associations existent, le plus souvent portées par les albinos eux-mêmes. A titre d'exemple : au Mali, la Fondation Salif Keïta pour les albinos (responsable: Mamoutou Keïta). Basée au Cameroun, l'Association mondiale pour la défense des intérêts et la solidarité des albinos (Asmodisa). Tanzanie: Association des albinos tanzaniens (TAS). Le VEAC: Village enfants albinos du cameroun/. Albinos Sans Frontières Burundi (directeur: Kazungu Kassim). Association nationale des albinos de Centrafrique (Anaca)
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